Dossier Scribeo

« Les traumatismes crâniens ont souvent un caractère invisible »

Le traumatisme crânien se démarque nettement des autres dommages corporels. Les explications de Maître Hadrien Muller, avocat au barreau de Paris et spécialiste de la question.
Maître Hadrien Muller
Maître Hadrien Muller (Crédits : Maître Hadrien Muller)

« Les traumatismes crâniens ont souvent un caractère invisible »

Le traumatisme crânien se démarque nettement des autres dommages corporels. Les explications de Maître Hadrien Muller, avocat au barreau de Paris et spécialiste de la question.

 Quelle est la particularité des traumatismes crâniens ?

Le traumatisme crânien, contrairement à d'autres types de traumatismes, peut entraîner des dommages que l'on décrit comme étant souvent « invisibles », c'est-à-dire qu'une personne extérieure qui ne connaît pas bien la victime peut ne pas se rendre compte de l'étendue de son handicap. Pourtant, celui-ci est parfois plus grave qu'un traumatisme orthopédique. Le plus délicat est de l'appréhender pleinement. Je rencontre souvent des victimes qui paraissent tout à fait normales au premier abord, mais en réalité, leur vie est complètement chamboulée : elles sont incapables de retravailler, leurs proches ne les reconnaissent pas, leurs projets sont abandonnés... Les séquelles peuvent être très gênantes : troubles de la mémoire, de la concentration, difficultés d'organisation et de planification, vertiges, maux de tête, changements comportementaux, etc. Leur point commun est qu'il faut une bonne connaissance de ce type de traumatisme et une certaine expérience pour les détecter et démontrer leur lien avec l'accident. De plus, ce caractère invisible est souvent accompagné par ce qu'on appelle l'anosognosie, c'est-à-dire une absence de conscience du handicap réel ou une sorte de déni, ainsi qu'une certaine apathie qui n'aide pas la victime à se prendre en main, à pleinement exprimer ses difficultés et essayer de les surmonter.

Comment se déroule l'expertise ?

L'expertise médicale est un moment crucial du dossier. Elle commence par l'étude du dossier médical de la victime, afin d'essayer de retracer tout le suivi médical depuis l'accident. Cette étape est prépondérante pour que l'étendue des dommages soit bien prise en compte et analysée. Il peut arriver que certaines lésions ne soient pas détectées immédiatement, lors de l'arrivée aux urgences, mais plus tard. Cela peut entraîner des discussions animées, car certains experts ne voudront pas reconnaître leur lien avec l'accident, alors même qu'il n'y a pas de preuve d'une autre cause. Ensuite, les experts vont procéder à un examen de la victime, au cours duquel ils peuvent proposer des tests cognitifs. Puis, il y aura une discussion entre professionnels (médecins, avocats, gestionnaires de compagnie d'assurance...) pour tenter de prendre en compte tous les préjudices et de les évaluer. Il y aura souvent plusieurs expertises médicales, car les médecins experts considèrent qu'il faut souvent attendre au moins trois ans pour pouvoir évaluer les préjudices de manière définitive. Les expertises ayant lieu avant ce délai seront donc seulement provisoires. De plus, le traumatisme crânien peut avoir des conséquences dans plusieurs domaines et il faudra souvent un avis spécialisé en ophtalmologie, en ORL, ou en psychiatrie, par exemple.

Qu'en est-il de la réparation ?

La juste réparation suppose avant tout une juste évaluation du dommage, c'est-à-dire une bonne prise en compte et une bonne compréhension des conséquences de l'accident. Pour cela, il faut être accompagné par une équipe de médecins-conseils compétents intervenant dans divers domaines. Il faut également s'assurer que le dossier médical est complet, voire, parfois, effectuer des examens complémentaires pour aider à la recherche de la vérité. J'estime qu'il est également important que la victime soit accompagnée dans tout le processus par un proche qui l'aidera à suivre son dossier et qui pourra témoigner des changements qu'elle a constatés chez la victime depuis l'accident. Enfin, la présence de l'avocat permet d'une part d'organiser l'ensemble de la procédure grâce à toutes les informations disponibles pour défendre les intérêts de la victime, mais également de donner du poids aux demandes auprès de l'assureur qui voudra éviter que l'affaire aille devant un tribunal, que ce soit au niveau des expertises médicales ou du chiffrage des préjudices en eux-mêmes. Dans de nombreux cas, un procès sera nécessaire pour obtenir la meilleure indemnisation possible.

Une procédure peut prendre du temps. Comment obtenir une avance sur l'indemnisation finale ?

Il faut savoir qu'une procédure d'indemnisation pour une victime d'un traumatisme crânien grave peut durer au moins 4 à 5 ans dans la plupart des cas, bien souvent plus. Il sera donc nécessaire d'obtenir des versements provisionnels de manière régulière. Pour cela, il faut apporter des éléments qui démontrent le préjudice subi. Cela commence par les pièces médicales du dossier, mais également des preuves d'une perte de revenus ou de frais à charge. Si l'assureur refuse de verser des avances suffisantes, il est possible de saisir un tribunal en référé à tout moment. Cette situation est fréquente, car les assureurs ont tendance à fortement limiter le montant des provisions, de manière à ce que l'essentiel de l'indemnisation soit versé à la fin du dossier. Dès lors qu'une expertise médicale a eu lieu, le versement d'une provision est facilité si l'état de santé de la victime n'est pas consolidé.

Soyez informés du rôle de votre avocat après un traumatisme crânien.

La consultation du présent article est notamment soumise aux CGU de Scribeo

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