Comment la CCI Hauts-de-France a changé son business model  ?

Face à la baisse de ses ressources fiscales, la CCI Hauts-de-France, établissement public sous tutelle de l'Etat, dirigé par des chefs d'entreprises, se transforme. Avec les projets Cap 2022 et Cap 2025 , elle a fait évoluer son business model. Avec pour objectif d'atteindre l'équilibre financier.
La CCI a vu fondre ses recettes fiscales, de 110 millions en 2012 à 50 millions en 2019.
La CCI a vu fondre ses recettes fiscales, de 110 millions en 2012 à 50 millions en 2019. (Crédits : CCI Hauts-de-France)

« C'est un peu comme si nous avions perdu un gros client : nous avons dû trouver d'autres moyens de nous financer », résumait Philippe Hourdain, président de la CCI Hauts-de-France, lors de son point presse de rentrée, qui a pris cette année la forme de bilan de mandature. Les élections consulaires sont en effet organisées du 27 octobre au 9 novembre prochains.

« Le service aux entreprises, l'investissement dans des grosses infrastructures comme le Port de Calais, la représentation des intérêts économiques, resteront toujours notre cœur de métier sauf qu'à la manière d'une entreprise, nous devons faire évoluer notre modèle économique ».

Avec un budget annuel de l'ordre 150 millions d'euros hors filiales (400 millions d'euros avec les filiales de formation), la CCI a vu fondre ses recettes fiscales, de 110 millions en 2012 à 50 millions en 2019. L'année prochaine, les budgets fléchés vers la CCI Hauts-de-France ne devraient plus totaliser que 27 millions, même si la chambre consulaire continuera de représenter quelque 180.000 entreprises.

Cheminement vers la fusion

La cause de cette baisse de budget ? Le remplacement progressif des centres de formalités des entreprises (CFE) par un service électronique dématérialisé, la réforme de l'apprentissage et de sa taxe (loi Avenir professionnel de 2018), la baisse du produit de la Taxe pour frais des CCI (TCCI) mais aussi la mission de développement économique, désormais confiée aux conseils régionaux et métropoles.

Face à cette évolution inéluctable, les 14 CCI du Nord et du Pas-de-Calais ont été les premières en France à entamer, dès 2007, un long cheminement vers la fusion, qui aura pris presque dix ans. Au 1er janvier 2017, le rapprochement, cette fois, des deux entités en Nord de France et Picardie, avait établi des statuts différents, entre les CCI picardes conservant une indépendance financière avec le statut de CCI dites territoriales et les CCI picardes, à savoir Amiens-Picardie dans la Somme, l'Oise et l'Aisne. Depuis le 1er janvier 2019, toutes sont passées sous le statut de « locales », sous l'égide de l'entité régionale.

L'intérêt de la mutualisation des moyens et des expertises locales a pourtant été reconnu par le rapport de la Cour des comptes publié en mars dernier. Alors qu'en parallèle, l'institution du palais Cambon émettait de sérieux doutes sur leur efficacité et sur leur viabilité. « L'expérience montre que le regroupement d'établissements en un établissement régional unique ne conduit pas nécessairement à remettre en cause les implantations territoriales de proximité auxquelles les utilisateurs - en l'occurrence les chefs d'entreprise - sont attachés », souligne le rapport. « Comme le montre l'exemple des Hauts-de-France, un équilibre peut être trouvé entre la rationalisation du réseau et le maintien de la proximité. »

De l'intérêt de la mutualisation

Grâce à ce mouvement de mutualisation, les effectifs pilotages et supports ont pu diminuer de 40 % sur le périmètre Nord-Pas-de-Calais de la région Hauts-de-France entre 2013 et 2016. Il y a trois ans, la Chambre actait encore le départ de 200 collaborateurs pour ne plus employer aujourd'hui que 1.000 salariés (2.400 salariés avec l'ensemble des filiales de formation).

Afin d'assurer sa pérennité, la CCI Hauts-de-France a justement beaucoup misé sur la formation. Elle est même devenue aujourd'hui second opérateur de la formation en région, derrière l'Education nationale, avec plus de 30.000 personnes formées chaque année. La CCI est par ailleurs la seule chambre consulaire de France à avoir obtenu pour l'ensemble de ses centres, dès la fin de l'année 2020, la certification QUALIOPI, afin d'accéder à des fonds publics ou mutualisés.

La CCI Hauts-de-France compte désormais près d'une dizaine de filiales en formation, dont les plus importantes sont CEPI Management à Lille, CPLE (Centre de pratiques de langues étrangères), l'école de commerce ESC Amiens, l'école d'ingénieurs ESIEE et le centre de formation Interfor, la prestigieuse école d'animation Rubika à Valenciennes, à Abbeville dans la Somme ; et dernier intégré, StartEvo basé à Saint-Omer et rayonnant sur Calais et Boulogne-sur-Mer.

Formations tout azimuts

Hors filiales de formation, la formation proposée par la CCI a généré 52 millions d'euros de chiffre d'affaires. « La CCI Hauts-de-France permet ainsi de former tout au long de la vie, à la fois le chef d'entreprise mais aussi ses collaborateurs », résume le président de la CCI Hauts-de-France. Par exemple, un programme de Booster TPE « spécial relance », d'une valeur de 1.000 euros HT, mis en place par la CCI, bénéficie d'une prise en charge par la Région Hauts-de-France et le FEDER, le fonds européen de développement régional. Il existe d'autres formules dédiées à la création d'entreprise ou au développement, dans des domaines aussi variés que le financement du développement, les ressources humaines, la digitalisation, etc.

Toujours en tant que partenaire du conseil régional (comme des autres collectivités locales), la CCI est depuis peu devenue la cheville ouvrière du Plan Régional de la Formation pour l'accompagnement des demandeurs d'emploi vers la création.

Nouvelles expertises

Parmi les autres nouvelles sources de financement, la CCI propose des prestations d'études économiques, aussi bien aux chefs d'entreprises qu'aux collectivités. « Dans le cadre de la revitalisation des centres villes et centres-bourgs, nous avons par exemple travaillé en partenariat avec le conseil régional et l'Etat pour fournir une ingénierie aux petites villes et centres bourgs », souligne Philippe Hourdain. Le services études facture désormais près de 700.000 euros de chiffre d'affaires.

Enfin, la CCI commercialise également des expertises. « Nous disposons entre autres d'un expert de l'éolien, conventionné avec les collectivités, qui permet d'aider les entreprises de la région à aller gagner des marchés partout en France », souligne Philippe Hourdain. A cela s'ajoutent des programmes spécifiques d'accompagnement, financés en partie par le conseil régional. Comme Hauts-de-France Prévention pour soulager les difficultés de trésorerie des entreprises.

Et Philippe Hourdain de conclure : « Même si la crise sanitaire de la Covid-19 est venue contrecarrer le rythme normal de l'évolution de notre business model, le travail effectué pour embarquer les élus et les collaborateurs dans une nouvelle dynamique a été colossal. Les résultats sont là ».

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