Les Franciliens veulent une meilleure qualité de vie

La sécurité bien sûr est la priorité numéro un depuis les attentats du 13 novembre. Mais la pollution, le coût de la vie et l’emploi sont aussi des sujets préoccupants pour les Franciliens et sur lesquels la Région peut agir, au nom de son attractivité.
Mathias Thépot
La pollution de l'air est en effet la première préoccupation écologique des franciliens, devant le réchauffement climatique

Si la campagne des régionales est suspendue depuis les attentats atroces du vendredi 13 novembre à Paris, le président de la République François Hollande a néanmoins assuré qu'il n'était pas question de reporter les élections qui se tiendront les 6 et 13 décembre. C'est donc dans cet environnement lourd que les Franciliens vont être appelés à voter pour des élections qui voient pour l'instant la droite devancer légèrement la gauche au second tour.

Le dernier sondage Ifop donne en effet la liste LR-UDI-MoDem conduite par Valérie Pécresse en tête au premier tour avec 32 % des suffrages, soit sept points de plus que la tête de liste PS Claude Bartolone. Et au second tour, la candidate de droite recueillerait 39 % des voix, soit un point de plus que son adversaire socialiste. Ce résultat est proche de celui publié quelques jours plus tôt par l'institut BVA, qui donne Valérie Pécresse victorieuse au second tour avec deux points d'avance sur Claude Bartolone.

Une bataille acharnée et serrée jusqu'au bout

Selon l'Ifop, le candidat FN Wallerand de Saint-Just réaliserait pour sa part 18,5 % au premier tour et 23 % au second. Il devrait donc provoquer une triangulaire, même si sa percée est moins forte que celle de ses collègues frontistes dans le nord, le sud ou l'est de la France. Par ailleurs, si la gauche remonte autant sur la droite entre les deux tours, sans la dépasser du reste, c'est que sa réserve de voix est plus importante : la liste d'Europe Écologie Les Verts (EELV) et du Rassemblement citoyen conduite par Emmanuelle Cosse, et celle du Front de Gauche conduite par Pierre Laurent recueilleraient respectivement 9 % et 7,5 % au premier tour dans les sondages. Valérie Pécresse ne pourra pour sa part s'appuyer que sur la liste Debout la France de Nicolas Dupont-Aignan, qui obtiendrait 6 % des suffrages au premier tour selon Ifop.

La bataille s'annonce donc acharnée et très serrée jusqu'au bout. Il faut dire que l'enjeu est de taille : conquérir une région peuplée de 12 millions d'habitants, et qui pèse 612 milliards d'euros de Produit intérieur brut (PIB), soit 30 % du PIB français, et 23 % de l'emploi. La mission du successeur de Jean-Paul Huchon (PS) - qui préside la Région depuis 1998 - sera d'autant plus ardue, que l'emploi en Île-de-France ne se porte pas au mieux. En effet, depuis vingt-cinq ans, les principaux secteurs de l'économie francilienne connaissent une dynamique moins forte en termes d'emplois que sur le reste du territoire.

Concrètement, entre 1989 et 2013, l'emploi dans les cinq principales branches de l'économie française (30% de l'emploi en Île-de-France) a crû en moyenne de 2,4% par an, contre 3,2% sur le territoire national, selon les chiffres agrégés par Guy Marty, directeur de l'Institut de l'épargne immobilière et foncière. Et si l'on prend les dix plus importants secteurs de l'économie française (soit 58 % du total de l'emploi en Île-de-France), le constat est le même : une croissance annuelle moyenne de l'emploi de 1,7% en Île-de-France, contre 2,2% en France, entre 1989 et 2013. Pourtant, si l'on raisonne en termes de croissance du produit intérieur brut, l'Île-de-France est plus dynamique, avec une hausse de 3,2% par an en moyenne sur vingt-cinq ans contre 2,8% pour la France entière.

Plus de richesse, moins d'emplois en Île-de-France

En Île-de-France, la dynamique de l'emploi est donc moindre, au contraire de la richesse créée. La structure du tissu économique francilien y est pour beaucoup.

« Les emplois à haute valeur ajoutée sont beaucoup mieux représentés en Île-de-France que sur le reste du territoire », remarque Guy Marty.

Les secteurs du numérique et des nouvelles technologies sont révélateurs de cette tendance. Ils ont, en proportion, besoin de moins de salariés pour dégager de la richesse. Cette tendance peut inquiéter car « les emplois moyennement qualifiés sont très violemment percutés, et le seront au moins autant à l'avenir, notamment par l'informatique et la robotique », redoute Pierre Veltz, président de l'établissement public Paris-Saclay. La Région a, du reste, les moyens de contrecarrer cette évolution : elle consacre notamment 690 millions d'euros par an à l'apprentissage, à la formation professionnelle et à l'emploi, et 230 millions au développement économique, à l'innovation et au tourisme.Par ailleurs, l'autre principale raison à la moindre dynamique de l'emploi en Île-de-France résulte de la baisse de la qualité de vie, notamment à cause de l'envolée des prix des logements. Celle-ci a poussé les populations du cœur de l'agglomération parisienne à s'éloigner.

« En 1968, 74 % des ménages franciliens vivaient à Paris et en première couronne. En 2011, ils n'étaient plus que 60 % », relate Guy Marty.

De plus en plus de Franciliens ont donc investi la seconde couronne, s'éloignant des emplois, principalement situés au cœur de l'agglomération. Une troisième couronne s'est même créée : entre 1968 et 2011, le nombre de ménages a doublé dans les départements limitrophes de l'Île-de-France, l'Eure, l'Eure-et-Loir, l'Oise et le Loiret. Par l'étalement urbain, « on a allongé les temps de transport, ce qui a eu des répercussions néfastes sur le bien-être au travail et le moral des ménages », explique Guy Marty.

Sur ce point aussi, la Région a son mot à dire : elle possède de fortes compétences en matière de transports. Elle y consacre même en 2015 1,8 milliard d'euros par an, soit 36,4 % de son budget (4,95 milliards d'euros). Il faut aussi ajouter à cela la part prépondérante de la Région dans la gouvernance du Stif (Syndicat des transports d'Île-de-France) qui est à la tête d'un budget de 6,5 milliards d'euros. Bref, lorsqu'on vote pour le futur président de la région Île-de-France, on vote en premier lieu pour une meilleure politique des transports.

« Tout commence par les transports », expliquait d'ailleurs Claude Bartolone au moment de la présentation de son programme électoral.

Certes, la Région ne sera pas seule dans les prochaines années à investir dans le transport francilien : dans le cadre de la mise en œuvre de la Métropole du Grand Paris, elle bénéficiera du concours de l'État pour construire les nouvelles gares du Grand Paris, ainsi que les lignes du Grand Paris Express, et du Charles-de-Gaulle Express. Au total, de 2015 à 2030, le gouvernement a prévu 30 milliards d'euros d'investissements de travaux publics.

Avant tout, La question de la pollution de l'air

De quoi largement soutenir les efforts de la Région en la matière. Et cela étant déjà planifié, les candidats concentrent davantage leurs promesses de campagne sur l'amélioration du réseau existant. La plupart militent pour des gares multimodales pouvant accueillir tous les modes de transport, ainsi que pour une modernisation globale des réseaux. Mais entre la gauche et la droite, il subsiste sur ce thème des divergences de fond : à gauche, on mise sur le développement de l'utilisation des transports en commun et plus généralement des modes de mobilité écologiques ; alors qu'à droite, on promet de construire de nouvelles routes afin de désengorger certains axes.

Valérie Pécresse propose ainsi de relancer « les investissements routiers pour fluidifier le trafic et en finir avec les embouteillages ».

L'autre grand thème de la campagne, très lié à celui des transports, concerne l'amélioration de la qualité de l'air. Les pics de pollution récents à Paris et en banlieue ont en effet rappelé que la piètre qualité de l'air réduisait l'espérance de vie des Franciliens. La pollution de l'air est en effet leur première préoccupation écologique, devant le réchauffement climatique, si l'on en croit les sondages de l'association de la qualité de l'air en Île-de-France, Parif. Plus de 2,3 millions d'habitants en Île-de-France subissent, il faut dire, un niveau de pollution supérieur aux normes actuellement en vigueur. Les ménages les plus touchés étant ceux qui vivent à proximité des axes routiers les plus pollués, avec les dégâts sur la santé que l'on peut imaginer.

Pour remédier à la situation, la gauche promet la sortie du diesel à l'horizon 2025. Les propositions les plus ambitieuses en la matière proviennent d'EELV : le parti écologiste milite pour un plan de 3 milliards d'euros qui inclut notamment des aides aux ménages pour changer leur véhicule polluant, l'éradication du diesel de la flotte de bus des transports en commun d'ici à 2021, et un an de forfait Navigo gratuit pour les habitants qui abandonnent leur voiture. Pas de sortie du diesel en revanche dans le programme de Valérie Pécresse, mais un plan de partenariat avec les maires pour les inciter à transformer leurs flottes en véhicules électriques. Le Front National de Wallerand de Saint-Just se contente pour sa part de dénoncer « l'inutile chasse aux automobilistes » de la gauche.

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Mathias Thépot

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Commentaires 2
à écrit le 23/11/2015 à 18:22
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...qu'ils assaient ...le Larzac .

le 12/10/2016 à 14:52
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Si y avait du boulot au Larzac, tout le monde y vivrait...Mais en France, toutes les entreprises sont allées à Paris, car ça fait plus "chic" et "international".

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