De Paris à Mexico en passant par le Bronx, comment inventer la ville inclusive ?

[ CITIES FOR LIFE ] Le concept de ville inclusive regroupe plusieurs aspects : technologique, social, économique, citoyen, etc. Comment inventer une vile inclusive qui agrègerait harmonieusement ces différentes composantes ?
Selon Jean-Louis Chaussade, il faut pouvoir mesurer l'usage en temps réel de l'eau, du gaz, de l'électricité, des déchets, et définir des priorités, qui varient selon les villes. "À Mexico (photo), la première priorité, c'est la sécurité, à Singapour, il s'agit de l'eau."

« La ville est à la fois le support et la conséquence de l'organisme vivant qui l'habite : l'être humain », explique Joël de Rosnay, scientifique, essayiste et prospectiviste.

« Nous devons ubériser la ville en reprenant le pouvoir via la désintermédiation des structures verticales de décision. (...) La ville doit trouver le moyen de renvoyer l'information qu'elle détient grâce à ses réseaux de capteurs - conditions météo, état du trafic - vers les citoyens, via leur smartphone ou l'affichage public, pour les rendre intelligents », ajoute l'auteur de "Je cherche à comprendre : Les codes cachés de la nature", son dernier ouvrage en date.

Outre les données, la ville peut-elle générer ses propres ressources, en particulier énergétiques ? Bientôt, la terre comptera 10 milliards d'humains dont les deux tiers habiteront dans un centre urbain. La question de l'autosuffisance sera alors cruciale selon Jean-Louis Chaussade, directeur général de Suez :

"Si la ville ne peut pas fournir ses propres ressources, elle aura du mal à vivre. On peut par exemple réutiliser les déchets pour produire de l'énergie ou construire plus de bâtiments à énergie positive. Tout en assurant un niveau de service de qualité égale en centre-ville comme en périphérie, souvent moins bien traitée."

Autre élément essentiel : la mesure de la consommation de ces ressources : « Eau, gaz, électricité, déchets : nous devons pouvoir mesurer leur usage en temps réel et définir des priorités, qui ne sont pas identiques selon les villes. À Mexico, la première priorité, c'est la sécurité, à Singapour, il s'agit de l'eau », précise Jean-Louis Chaussade.

La diversité rend la ville attractive

Une ville inclusive se doit d'être accueillante pour toutes les populations, car elle devient ainsi plus attractive pour les investisseurs potentiels. Pour Christian Nibourel, président de Paris Ile-de-France Capitale Économique, dont la mission est justement d'attirer ces investisseurs étrangers, « l'inclusion et la diversité sont des facteurs positifs, comme l'a prouvé l'exemple de Londres, cité cosmopolite et ouverte. Mais pour répondre au défi de l'immigration et des réfugiés sur le long terme, tous les acteurs de la vile doivent échanger des informations ».

Le partenariat public-privé, incarné par le système de partage de véhicules électriques Autolib, mis en place par la Mairie de Paris avec le groupe Bolloré, est un second facteur d'attractivité. Mais en devenant plus attractive, la ville génère aussi plus d'inégalités avec l'afflux de populations précaires, réfugiés ou migrants économiques, attirées par sa prospérité.

« Il est nécessaire de maîtriser ces flux car l'inégalité peut devenir mortelle avec la création de quartiers abandonnés et de zones de non droit. A l'opposé, il faut se prémunir de la propension à vouloir se protéger de la diversité qui aboutit à l'établissement de ghettos pour citoyens aisés. Gérer cette contradiction, c'est par exemple créer la Station F, qui va devenir le plus grand centre de startups au monde, et ouvrir un refuge pour migrants dans le 18e arrondissement car chaque personne vivant sur le territoire parisien doit avoir un refuge », évoque Patrick Klugman, adjoint à la Maire de Paris chargé des relations internationales et de la francophonie.

Le Bronx, du ghetto au quartier branché

Attractif, le Bronx, un des cinq borough (arrondissement) de New York, ne l'était pas vraiment durant les années 1980 et 1990. Symbole de la violence urbaine avec ses gangs, ses règlements de comptes meurtriers et ses hordes de sans-abri poussant des chariots remplis de leurs maigres possessions, le Bronx a su se relever comme l'a raconté Michael Blake, membre de l'assemblée municipale.

« Aujourd'hui, vous pouvez vous balader la nuit et prendre du bon temps dans ce comté, qui est le plus mélangé des Etats-Unis. Dès qu'on parle du Bronx, on évoque tout de suite son passé violent, mais cette époque est révolue », martèle Michael Blake.

L'ancien quartier mal famé a changé la législation sur l'éducation, construit des logements sociaux où vivent 21% des habitants, et a su attirer les investisseurs, car, selon Blake, « l'emploi est la clé pour développer un quartier défavorisé comme le Bronx ». La Bronx Fondation est un des outils de ce renouveau économique et social. Mais, l'essentiel, selon le membre de l'assemblée municipale, lui-même Afro-américain, c'est de persuader les gens qu'ils ne sont pas abandonnés, quelle que que soit leur origine ethnique ou sociale. Un message universel qui peut s'appliquer à toutes les métropoles cosmopolites de la planète, Paris incluse.

Patrick Cappelli,
correspondant de La Tribune à Cities for Life

>> Lire aussi : Dossier complet sur le Forum Smart City du Grand Paris

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Commentaire 1
à écrit le 23/11/2016 à 19:38
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Il faudrait savoir : selon vos articles, il y a des jours où il faut encore inventer les villes inclusives et d'autres où nos fiers élus la pratiquent déjà...

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