Mi-Facebook mi-WhatsApp, le phénomène Line part à l’assaut des ados français

Cette application de messagerie enrichie, lancée au Japon après le tsunami il y a deux ans, compte 230 millions d’utilisateurs. Prisée des jeunes pour ses autocollants virtuels, des icônes reflétant leurs humeurs, Line se lance à l’assaut de l’Europe, où elle a déjà séduit 15 millions d’Espagnols.
Delphine Cuny
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Déjà lassé d'Instagram ? Alors vous connaissez peut-être Line, l'application mobile sociale qui monte. Lancé en juillet 2011 au Japon après la catastrophe de Fukushima qui avait endommagé les infrastructures télécoms du pays, ce service de messagerie instantanée sur smartphone fonctionnant initialement via WiFi, connaît une croissance spectaculaire depuis deux ans.

La jeune société, filiale du groupe Internet sud-coréen NHN (rebaptisé Naver), éditeur de portails et de jeux en ligne, revendique 230 millions d'utilisateurs aujourd'hui dans une cinquantaine de pays, après avoir franchi les 100 millions en janvier. Les Japonais sont accros (47 millions), les Thaïlandais et les Taïwanais aussi (respectivement 18 et 17 millions) et depuis peu les Espagnols également : 15 millions d'utilisateurs dans un pays où l'application de voix sur IP WhatsApp Messenger avait déjà fait des ravages.

Line vise désormais la France et devrait annoncer des partenariats avec des marques locales : en Espagne, la société s'est par exemple alliée aux clubs de foot du Real Madrid et du Barça.

Sept milliards de messages par jour

Derrière les services « classiques » de voix sur IP mobile (appels et messages gratuits), la marque de fabrique de Line ce sont en effet les « stickers », des milliers de vignettes virtuelles qui rappellent les émoticônes des messageries instantanées en plus abouti et plus « kawaï » (mignon en japonais), pour exprimer ses humeurs : ils sont très prisés des jeunes, notamment les filles, qui représenteraient 60% des utilisateurs.

Sept milliards de messages seraient ainsi envoyés en moyenne par jour ! L'application est gratuite pour le grand public, ce qui a fait son succès à l'heure où WhatsApp devenait payante. Mais Line fait payer les marques, les entreprises, qui veulent créer leur compte officiel auquel peuvent s'abonner les utilisateurs afin de leur envoyer des informations, des promotions personnalisées etc.

Line se décline aussi en applications spécifiques de jeux et de photo avec des filtres, des pinceaux et des cadres, etc pour personnaliser son cliché à la manière d'un dessin. Et ça rapporte : Line a été classée l'application rapportant le plus de recettes sur la boutique Google Play pour appareils Android en juillet (jeux mis à part). La société a généré un chiffre d'affaires de 75 millions d'euros au deuxième trimestre (+77% par rapport au trimestre précédent) et devrait atteindre les 100 millions au troisième trimestre.

« La moitié des recettes proviennent des jeux, 30% des stickers et 20% des entreprises qui ouvrent des comptes officiels et offrent stickers sponsorisés » explique Sunny Kim, la directrice du développement Europe-Amérique de Line.

En phase d'investissements marketing important, dont des campagnes TV, pour soutenir son expansion internationale, la société vise la rentabilité l'an prochain.

Né et pensé pour le mobile, contrairement à Facebook

« En deux ans, nous avons évolué pour devenir une plateforme de communications en temps réel plus sociale. Mais Line est très différent d'un réseau social web comme Facebook : nous sommes nés et pensés pour le mobile, nous ne stockons pas votre historique, nous ne partageons pas vos données ni ne révélons votre numéro de téléphone, tout se fait entre personnes qui ont échangé leur numéro. Et les contacts de votre répertoire téléphonique ne sont pas les mêmes que vos amis Facebook » relève la jeune femme. « Nous créons de nouveaux marchés, c'est ce qui fait peur à Facebook, qui a essayé de lancer aussi des stickers dans son service de messagerie » s'amuse Sunny Kim, qui relève que « jamais nous n'aurions pensé devenir concurrent de Facebook il y a deux ans. »

Line a néanmoins un peu copié Facebook pour sa « Timeline » et Instagram (racheté par le réseau de Mark Zuckerberg) pour la photo. Line communique sur le nombre de téléchargements mais pas sur le nombre d'utilisateurs actifs qui est sans doute inférieur aux 230 millions annoncés. La croissance est cependant exponentielle : avec la version espagnole, l'application vient de conquérir des millions d'adeptes au Mexique, en Argentine, et séduit les hispanophones aux Etats-Unis.

Installée à Los Angeles, près des décideurs marketing et des grands groupes de divertissement, Sunny Kim prépare avec prudence le lancement de Line d'ici à la fin de l'année sur les terres de Facebook et WhatsApp, « un marché très concurrentiel. »

« L'appli la plus aimée des opérateurs »

L'objectif est d'atteindre 300 millions d'utilisateurs avant la fin de l'année. Line lancera bientôt un service d'appels vidéo, à la Skype ou FaceTime, et ne craint pas de s'aliéner les opérateurs pour autant.

« Nous sommes l'application la plus aimée des opérateurs télécoms » se targue Sunny Kim. « Parce que nous favorisons la consommation de données. Nous avons besoin des opérateurs, d'un service optimisé. Nous avons des partenariats en Asie et nous en aurons bientôt en Europe. Nous allons aussi lancer un magasin en ligne où les achats dans notre monnaie virtuelle « Line coins » pourront passer par la facture des opérateurs. »

En Corée du Sud, le marché domestique de la maison-mère où Line n'a pas encore détrôné le pionnier de la voix sur IP, Kakao Talk, ce dernier avait dû batailler ferme contre les opérateurs qui avaient dégradé le débit pour bloquer ses services qui venaient rogner leurs recettes, relançant le débat sur la Net neutralité.

Depuis, les opérateurs dans le monde ont mûri sur le sujet de la voix sur IP et ont même lancé leurs propres applications de messagerie, comme Libon d'Orange.

Delphine Cuny

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Commentaires 2
à écrit le 24/09/2013 à 14:18
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"Line a néanmoins un peu copié Facebook pour sa « Timeline » et Instagram (racheté par le réseau de Mark Zuckerberg) pour la photo" Bref rien de nouveau sous le soleil.

à écrit le 24/09/2013 à 11:54
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"Lancé en juillet 2011 au Japon après la catastrophe de Fukushima qui avait endommagé les infrastructures télécoms du pays"... Vous en avez pas mare de balancer le nom de Fukushima à toutes les sauces même quand ça n'a aucun rapport ? La "catastroph...

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