Haine en ligne : le Conseil constitutionnel censure la loi Avia

Dans une décision rendue ce jeudi, le Conseil constitutionnel a très largement censuré la "loi Avia", qui vise à lutter contre les contenus haineux sur Internet. Sa mesure phare, qui obligeait les plateformes à retirer en 24 heures les contenus illicites, a été jugée incompatible avec la liberté d’expression.
Anaïs Cherif
(Crédits : Pixabay / CC)

La fameuse "loi Avia" reste décidément très controversée. Adoptée mi-mai par le Parlement, cette loi visant à lutter contre les contenus haineux sur Internet avait enduré une navette parlementaire houleuse. Dans une décision rendue ce jeudi, le Conseil constitutionnel a censuré le cœur du texte, jugé incompatible avec la liberté d'expression et de communication.

En cause : l'obligation pour les plateformes et les réseaux sociaux de supprimer dans les 24 heures les contenus "manifestement illicites", qui leur ont été signalés par les utilisateurs ou la police. Cette mesure phare, au cœur de la loi, était directement inspirée d'un texte allemand similaire, entré en vigueur en janvier 2018.

Pour le Conseil constitutionnel, cette disposition n'est pas compatible avec la liberté d'expression. Elle pourrait "inciter les opérateurs de plateforme en ligne à retirer les contenus qui leur sont signalés, qu'ils soient ou non manifestement illicites", en qualifiant de "particulièrement bref" le délai de 24 heures imposé à certains opérateurs. Le Conseil constitutionnel a donc considéré que "le législateur a porté à la liberté d'expression et de communication une atteinte qui n'est pas adaptée, nécessaire et proportionnée au but poursuivi."

Il donne ainsi raison aux opposants du texte, qui craignaient une censure excessive des plateformes au regard du montant des sanctions financières, avec des amendes pouvant grimper jusqu'à 1,25 million d'euros. Cette disposition "encouragera mécaniquement les plateformes à retirer - par excès de prudence - des contenus pourtant licites", déplorait au début de l'année le rapporteur de la commission des Lois du Sénat, Christophe-André Frassa (LR).

Lire aussi : Haine en ligne : pourquoi la loi Avia divise toujours

L'absence de contrôle du juge dénoncée par le Conseil constitutionnel

Au-delà du simple délai, le Conseil constitutionnel regrette également l'absence d'intervention effective d'un juge pour qualifier les contenus illicites. "Les éléments constitutifs de certaines [infractions] peuvent présenter une technicité juridique ou, s'agissant notamment de délits de presse, appeler une appréciation au regard du contexte d'énonciation ou de diffusion des contenus en cause", souligne la décision.

Dans le détail, la "loi Avia" instaurait notamment un délai d'une heure seulement pour que les sites retirent les contenus désignés comme "terroristes" et pédopornographiques, signalés par la police. Le Conseil constitutionnel a pointé du doigt un délai trop court, ne permettant "pas d'obtenir une décision du juge avant d'être contraint de le retirer".

Anaïs Cherif

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Commentaires 5
à écrit le 19/06/2020 à 14:10
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Perte de temps parlementaire... ridicule

à écrit le 19/06/2020 à 12:29
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Encore une échec des parlementaires LERM, il est vrai qu'aucun d'eux n'est a la hauteur pour entrer dans un gouvernement!

à écrit le 18/06/2020 à 23:15
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On n'a pas la même info sur d'autres sites. " D'après les mots du Conseil constitutionnel, la loi incitait ainsi "les opérateurs de plateforme en ligne à retirer les contenus qui leur sont signalés, qu’ils soient ou non manifestement illicites".....

à écrit le 18/06/2020 à 18:02
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Nous avons des comptables au pouvoir, de mauvais comptables diront certains mais des comptables à savoir des gens dénués d'idées de ce fait difficile de savoir pourquoi ils ont commis cette énième erreur, soit pour faire payer les GAFA parce que les ...

à écrit le 18/06/2020 à 17:55
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y a eu un article dans lepoint.fr la dessus le pb de cette loi, c'est qu'il y a de la haine qui est tout a fait autorisee, voire bienvenue et respectable , mais que par contre, y a aussi de la haine intolerable, qui indigne la gauche francaise et do...

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