La startup de la semaine : Mirakl veut s'imposer comme "l'arme anti-Amazon"

Toutes les semaines, La Tribune braque les projecteurs sur une pépite méconnue de la French Tech. Cette semaine, Mirakl. Spécialiste de l'édition de marketplaces, la startup a levé 62 millions d'euros fin février. Elle veut fédérer un écosystème autour de ses marketplaces afin qu'elles résistent mieux à la concurrence des géants Amazon et Alibaba.
François Manens
La pépite française Mirakl a levé un total de
La pépite française Mirakl a levé un total de (Crédits : Mirakl)

En 2018, un milliard de dollars de chiffre d'affaires de ventes a été réalisé sur les marketplaces gérées par Mirakl, et pourtant, la startup est peu connue du grand public. En sept ans, le logiciel d'édition et gestion de marketplace de la startup les a hissé en tête d'un marché très jeune. Résultat : la jeune pousse a levé 62 millions d'euros en série C fin février, dans un tour mené par l'américain Bain Capital Ventures (LinkedIn, DocuSign, Lime). Désormais, Mirakl veut créer un écosystème entre ses clients et partenaires pour réaliser des synergies, le tout afin de mieux lutter contre la toute-puissance d'Amazon et d'Alibaba.

Numéro 1 des logiciels de marketplace

Une marketplace est un espace sur le site d'e-commerce d'un opérateur - par exemple Amazon, Cdiscount ou la Fnac - accessible à certains vendeurs extérieurs. Le client peut donc acheter sur la plateforme de l'opérateur un produit proposé par un vendeur tiers. C'est une opportunité de visibilité inédite pour certaines PME qui peinent à attirer sur leur propre site (quand elles en ont un) car les clients ne les connaissent pas. En échange, elles versent à l'opérateur une commission sur chaque vente, et ces derniers en profitent également pour récupérer de précieuses données sur le comportement d'achat de leurs clients. Amazon a lancé sa marketplace en 2003, et depuis 2016 plus de la moitié des unités vendues sur sa plateforme viennent de vendeurs tiers.

Si les géants comme l'entreprise américaine et Alibaba ont créé leur propre marketplace, d'autres grands groupes n'ont ni l'expertise ni les compétences pour faire de même. C'est ici que Mirakl entre en jeu. La startup édite un logiciel de création et gestion de marketplace, disponible en SaaS (service contre un abonnement mensuel) à destination d'opérateurs. Et leur mise en place peut être rapide : il n'a fallu que deux mois et demi à Mirakl pour créer la marketplace de Brico-privé. La jeune pousse se cache ainsi derrière des marketplaces BtoC (Carrefour, Fnac, Wallmart, Nature&Découvertes, Auchan) qui représentent aujourd'hui deux tiers de son activité. Elle développe aussi le BtoB (Satair) depuis deux ans. Elle espère à court terme réaliser la moitié de son chiffre d'affaires dans chacun des deux marchés. En tout, plus de 200 clients, dont de nombreux grands comptes, ont intégré une marketplace Mirakl à leur site d'e-commerce.

"Les fabricants s'équipent de plateformes pour fédérer leur écosystème de distribution. Et pour les vendeurs, ces plateformes représentent de nouvelles débouchés. 30.000 entreprises vendent sur les marketplaces Mirakl, dont 8.000 françaises", développe Philippe Corrot, cofondateur de la startup.

Mirakl est confortablement installé en tête de ce marché relativement nouveau. La startup devance à l'international MarketPlacer, Share Tribe ou encore Near.me, et s'impose en France devant Izberg (derrière les plateformes d'Alstom, Suez ou Vente Privée) et Wizaplace (Engie).

Créer un écosystème pour continuer d'exister

Les marketplaces permettent, par exemple, de tester l'appétence des clients pour de nouveaux produits, sans engager de lourds investissements. Sur les conseils de Mirakl, Best Buy Canada a ouvert sa marketplace aux vendeurs de produits pour bébés, et s'est étonnement installé en leader du marché canadien sur ce segment. Le fabricant de pièces aéronautiques Satair a quant à lui ouvert sa marketplace pour proposer quatre fois plus de pièces, et a pu résister à l'entrée d'eBay sur son marché.

La marketplace est donc un moyen efficace pour s'imposer comme référence sur son marché. Adrien Nussembaum, co-fondateur de la startup, encourage ses clients a devenir les "Amazon de leur secteur". Une autre façon de se protéger contre une potentiel invasion d'un géant de l'e-commerce.

"Historiquement, les entreprises achètent le moins cher possible pour vendre le plus cher possible. Mais ce modèle ne marche plus, il faut désormais créer un écosystème autour de soi, et c'est ce que permet la marketplace", prévient-il.

Si Philippe Corrot n'hésite pas à qualifier son entreprise "d'arme anti-Amazon", la startup n'a ni la force de frappe logistique et technologique, ni la diversité de services du géant. Pour compenser ce manque, Mirakl mise sur la création d'un écosystème des plateformes. Devant plus de 400 entreprises clientes et partenaires, la jeune pousse lançait mercredi dernier Mirakl Connect, sorte de réseau social pour les acteurs de l'écosystème. L'objectif est double : ils se placent, avec leurs clients, au centre de cette nouvelle économie. Ensuite, ils espèrent fédérer les entreprises technologiques et logistiques de l'ensemble de la chaîne. C'est aussi l'occasion d'exposer aux vendeurs la pluralité de plateformes sur lesquels ils peuvent présenter leurs produits.

82 millions d'euros levés depuis 2012

Aujourd'hui, Mirakl réalise 75% de son chiffre d'affaire à l'étranger. En plus de son bureau américain basé à Boston, l'entreprise dispose d'équipes à Munich, Sao Paolo ou encore Londres. Sa division de recherche et développement qui compte plus d'une centaine d'employés (sur 220) reste quant à elle à Paris. "Avec une mauvaise expérience sur la marketplace, non seulement le client ne revient plus sur la marketplace, mais il ne revient plus sur le site de l'opérateur", avertit l'un des développeurs. Pour exclure les mauvais vendeurs, Mirakl établit un score à partir de différentes données.

Les axes d'optimisation de la plateforme sont nombreux : de l'automatisation de la saisie de donnée, à des vérifications de la qualité et à l'identification de tentatives de fraudes. Mirakl est d'ailleurs en cours d'obtention de l'agrément SOC 2 relatif à la sécurité des données et au respect de la vie privée. Une garantie nécessaire pour les millions de données récoltées sur ses marketplaces, qui ont une valeur importante et peuvent attirer les convoitises.

Aujourd'hui, la startup n'est pas rentable, mais enchaîne les investissements grâce aux 82 millions d'euros qu'elle a levé en trois séries, et affiche un chiffre d'affaires "plus proche des 50 millions que des 10 millions d'euros". Mais si elle tient le cap en 2019, tous les indicateurs sont au vert après une année 2018 couronnée de succès. Son chiffre d'affaires des ventes sur ses marketplaces a doublé et 60 nouvelles places de marchés ont été ouvertes.

François Manens

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Commentaires 3
à écrit le 30/10/2020 à 23:18
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J’ai entendu Philippe Corrot sur BFM business en début d’année. Je viens prendre des nouvelles de Mirakl. Enfin nous pouvons espérer la création en France et Europe d’une entreprise capable de concurrencer Amazon. Il est difficile de comprendre p...

à écrit le 11/06/2019 à 14:59
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Pour déboulonner Amazon, il va falloir se retrousser les manches, et notamment dans la relation client, qui est le parent pauvre de la VPC française, market place ou non.

à écrit le 09/06/2019 à 16:20
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Il me semble qu’une star-up fait aussi ça à Toulouse (toulouseboutiques.com) sinon le concept est cool 👍

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