Internet des objets : Carrefour s’allie à Bouygues Telecom

Le géant de la distribution va greffer des capteurs sur quelques milliers de conteneurs roulant permettant d'approvisionner ses hypers. Grâce aux données récoltées, Carrefour espère, à terme, réaliser d’importantes économies sur sa logistique.
Pierre Manière
Un Carrefour Market, à Bruxelles.

Dans les grands groupes et les plus importants cabinets d'étude, tout le monde en convient : l'Internet des objets (« IoT » pour « Internet of Things », disent les intimes) va « tout révolutionner » dans les années à venir. L'idée est simple : en glissant des capteurs connectés à Internet dans leurs machines, leurs véhicules, leurs produits ou lieux de ventes, les entreprises vont collecter des monceaux de données sur leur utilisation et leur environnement. Ce qui leur permettra, au final, d'améliorer leurs processus de production, de logistique, de gestion des stocks, de maintenance, mais aussi de proposer de nouveaux services aux clients. Reste que jusqu'à présent, force est de constater que bien peu de ces nouveaux processus ont effectivement vu le jour.

Il n'empêche que depuis quelques semaines, plusieurs initiatives singulières sont apparues. Après Orange, qui s'est associé avec Vinci pour tester des « aires d'autoroutes connectées », Bouygues Telecom vient de s'allier avec Carrefour. Plus précisément, le géant de la distribution travaille avec Objenious, la nouvelle filiale de l'opérateur dédiée à l'Internet des objets. Ici à terme, l'idée est de greffer des mini-capteurs sur sa flotte de 150.000 conteneurs roulant. Grandes palettes en fer dotées de montants grillagés, ces « roll-conteneurs » permettent d'acheminer les marchandises des dépôts vers les hypermarchés. Leur gestion est donc un élément-clé de la chaîne logistique de Carrefour, qui espère que les données récoltées (leur localisation, leur vitesse de rotation...) permettront d'optimiser les livraisons. Le géant de la distribution espère notamment pouvoir anticiper les casses fréquentes de ces matériels. Ce qui lui permettra, en définitive, de réaliser d'importantes économies sur cette face cachée mais primordiale de son business.

Les réseaux bas débit plébiscités

Pour l'instant, le projet n'est qu'à ses prémices. Une expérimentation va voir le jour courant 2017. Elle concernera 10.000 « roll-conteneurs ». Pour Objenious, il s'agit d'un test important, puisqu'il permettra de vérifier que son nouveau réseau bas débit LoRa - dédié à l'Internet des objets et qui récupérera les informations des capteurs - fonctionne correctement. En plein déploiement, cette nouvelle toile couvrira, d'après Objenious, tout l'Hexagone d'ici la fin du mois de décembre, contre « 60% à 70% » aujourd'hui. Sachant que ce réseau, concurrent du pionnier toulousain Sigfox, permet de connecter des capteurs à bas coût et peu énergivores pendant des années. Ce qui en fait une technologie de choix pour connecter un grand nombre d'objets.

Directeur des projets chez Carrefour, Alexandre Berger, estime que sur le papier, cette technologie est prometteuse pour améliorer la distribution :

« Au début, on a passé en revue plusieurs technologies. On s'est d'abord orienté vers la RFID (*). Mais on a éliminé cette option quand on a entendu parler des technologies bas débit. Avec la technologie LoRa, on a ainsi la capacité de suivre les 'roll-conteneurs' à distance, lorsqu'ils circulent. En outre, contrairement à la RFID, on n'a pas besoin d'installer des antennes et autres portiques dans nos entrepôts ou dans nos magasins. »

Pour Stéphane Allaire, le patron d'Objenious, les tests à venir permettront d'éprouver la technologie :

« On va voir comment les capteurs se comportent sur le terrain. Il faut vérifier qu'ils résistent bien aux chocs ou qu'ils fonctionnent correctement dans leur environnement - lorsque, par exemple, les 'roll-conteneurs' sont enfermés dans des camions. Ensuite, on vérifiera que notre couverture est sans faille. Avant, enfin, de tester la plateforme qui restituera toutes les données. »

Carrefour, un client de marque

Pour Objenious, l'enjeu est de taille. Si les tests se déroulent bien et si Carrefour industrialise sa solution, la filiale de l'opérateur de Martin Bouygues accrochera un cador du CAC 40 à son tableau chasse. Une jolie publicité sur laquelle Bouygues Telecom pourra capitaliser pour ferrer d'autres gros poissons. Alors qu'en parallèle, son rival Orange, leader des télécoms en France, met les bouchées doubles dans l'Internet des objets, et déploie lui-aussi un réseau bas débit concurrent sous la même technologie.

(*). L'identification par fréquence radio, ou RFID (Radio-frequency identification) est une méthode permettant de récupérer des données de « radio-étiquettes » collées à des objets. Celles-ci sont lues à distance lorsqu'elles passent à proximité d'antennes ou de portiques spéciaux. On retrouve souvent, par exemple, de tels dispositifs en guise d'antivol dans les magasins.

Pierre Manière

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