Shapr, le Tinder des professionnels, lève 8,5 millions d’euros pour réinventer le networking

A mi-chemin entre Tinder et LinkedIn, le réseau social de networking aux 500.000 utilisateurs veut renforcer sa présence aux Etats-Unis, en France et au Royaume-Uni en recrutant une quinzaine de nouveaux employés et en lançant une version payante.
Sylvain Rolland
Shapr, le Tinder des professionnels, prend le meilleur du monde de la rencontre amoureuse et de celui des réseaux sociaux professionnels pour développer le networking.

Le réseau, ou networking, est devenu indispensable à de nombreuses professions. Problème : comment rencontrer des personnes partageant les mêmes centres d'intérêts, de manière régulière, à la fois pour échanger ses expériences et, pourquoi pas, s'offrir de nouvelles opportunités professionnelles ?

C'est le créneau de la startup parisienne Shapr, qui veut simplifier le networking et en faire « un style de vie ». La pépite de la French Tech vient de réussir une troisième levée de fonds de 9,5 millions de dollars (8,5 millions d'euros), auprès d'investisseurs privés tels que le président de Danone Franck Riboud, la famille Bouygues, la famille Afflelou, le cofondateur de BlaBlaCar Frédéric Mazzella ou encore le cofondateur du groupe Webhelp Olivier Duha. Sans passer par des fonds d'investissements traditionnels, la startup, qui ne dégage pas encore de chiffre d'affaires, a déjà levé 16,5 millions de dollars depuis sa création en 2015.

Un réseau social entre Tinder et LinkedIn

Depuis le lancement, début 2016, de la nouvelle version de sa « plateforme de networking », Shapr revendique 500.000 inscrits, dont 60% aux Etats-Unis, 25% en France et 15% au Royaume-Uni. Cofondée et dirigée par Ludovic Huraux, ancien fondateur du site de rencontres amoureuses Attractive World (racheté en 2016 par son concurrent allemand Elite Rencontre), Shapr se situe au croisement du monde de la rencontre amoureuse et de celui des réseaux sociaux professionnels comme LinkedIn.

« Constituer un réseau, c'est faire des rencontres régulièrement. Mais les réseaux sociaux comme Facebook ne sont pas adaptés pour le networking et enferment l'individu dans son cercle de connaissances. Ceux comme LinkedIn ouvrent sur l'extérieur, mais ils ne favorisent pas les interactions réelles. Et les sites de rencontres se focalisent sur la rencontre amoureuse ou sexuelle, pas professionnelle. Il y avait donc un espace à prendre en trouvant comment faire se rencontrer des inconnus qui partagent des centres d'intérêts communs, pour développer son réseau », explique le Pdg et cofondateur, Ludovic Huraux.

Concrètement, l'utilisateur se voit proposer tous les jours une quinzaine de « personnes qu'il pourrait avoir envie de rencontrer ». Comme sur Tinder, il suffit de « swiper » (balayer l'écran avec son doigt) pour faire défiler les profils et sélectionner les plus intéressants. Si les deux personnes se sélectionnent, il y a « match », c'est-à-dire la possibilité d'entrer en contact sur un chat, pour ensuite prendre un café ou se rencontrer lors un événement. Pour l'heure, le service est totalement gratuit et fonctionne sans publicités.

Améliorer la précision des algorithmes grâce à l'intelligence artificielle

Depuis le début de l'année 2017, Shapr revendique trois millions de « matchs ». Soit à peine six par utilisateur, en sachant que la startup ne communique pas sur le nombre d'utilisateurs actifs, forcément plus faible. En plus de doubler ses effectifs dans les douze prochains mois (de 15 à 30 employés), la startup veut aussi continuer à améliorer ses algorithmes de recommandation, notamment en intégrant davantage d'intelligence artificielle.

« Techniquement, tout l'enjeu est de savoir comment probabiliser l'envie de rencontrer un inconnu », explique Ludovic Huraux. D'où la nécessité de récolter un maximum d'informations « pertinentes » sur les utilisateurs, afin de répondre au maximum à leurs attentes.

L'algorithme prend ainsi en compte la localisation - pour éviter de proposer un profil situé à 500 kilomètres -, les centres d'intérêts professionnels et non-professionnels, le métier, les expériences de chacun ou encore leur historique de rencontres sur l'application. Un système de « scores », calculés en fonction de la popularité de chacun sur la plateforme, permet d'ajuster les recommandations. Une personne beaucoup sélectionnée par les autres - donc « intéressante » - pourra ainsi accéder à des personnes avec un plus haut niveau d'expérience dans son domaine. Le développement du « machine learning » permettra d'affiner encore ce processus complexe de sélection, afin d'éviter les frustrations, comme se voir proposer des personnes qui ne nous intéressent pas ou ne pas obtenir de « match ».

Plus populaire aux Etats-Unis qu'en France

Dès le début, la startup Shapr s'est développée à la fois en France, aux Etats-Unis et au Royaume-Uni. Un choix judicieux, puisque plus de la moitié de son audience est au pays de l'Oncle Sam. La raison est culturelle : l'art du networking y est beaucoup plus développé qu'en France. « Les Américains croient beaucoup au concept de la sérendipité, c'est-à-dire l'idée qu'une rencontre peut changer un destin et qu'il faut provoquer les opportunités », ajoute Ludovic Huraux. Comme beaucoup de startups, Shapr a laissé son siège social et sa R&D en France et délocalisé ses commerciaux aux Etats-Unis, dans sa filiale située à New York.

Logiquement, les utilisateurs se Shapr ont surtout entre 22 et 50 ans. Il s'agit surtout d'entrepreneurs en quête de mentors, d'investisseurs ou d'échange d'idées ; de travailleurs indépendants qui doivent absolument développer en permanence leur réseau ; et de personnes en recherche d'emploi. La plateforme attire aussi des nouveaux venus dans une ville, qui veulent reconstituer un réseau autant professionnel qu'amical, ou encore des professionnels en quête de reconversion, notamment des anciens de la finance qui veulent intégrer des startups.

Une version payante d'ici à la fin de l'année

En pleine croissance, Shapr revendique 2.000 nouveaux utilisateurs par jour. Son défi est d'accélérer pour se renforcer sur ses trois marchés phares, améliorer ses algorithmes de recommandation et lancer une version payante pour enfin dégager des revenus. La startup ne compte pas encore monétiser les données personnelles qu'elle récolte de ses utilisateurs.

Inspirée par LinkedIn, cette version payante devrait voir le jour d'ici à la fin de l'année. Elle permettra de maîtriser sa géolocalisation - pour anticiper un changement de ville par exemple ou développer un réseau dans un autre endroit -, de se voir proposer davantage de profils tous les jours, d'obtenir une meilleure exposition ou de rechercher un profil précis, comme un fondateur de startup qui voudrait recruter son directeur financier. Si cela fonctionne, Shapr pourrait directement concurrencer sur leurs terres les pros du recrutement comme LinkedIn et Viadeo.

Sylvain Rolland

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