Streaming : la folle croissance de Netflix s'enraye

Après des mois d'euphorie, le leader mondial du streaming vidéo a recruté moins d'abonnés que prévu au cours du premier trimestre. Netflix revendique tout de même 208 millions d'utilisateurs payants dans le monde. Pour continuer de s'imposer face à une concurrence accrue, le pionnier du secteur veut accroître la production de contenus locaux et lutter contre le partage de comptes.
Anaïs Cherif
(Crédits : Lucy Nicholson)

Après une année de croissance folle, Netflix est finalement rattrapé lui aussi par les effets de la crise du Covid-19. Si les différents confinements et couvre-feux ont dopé son recrutement d'abonnés au cours des douze derniers mois, le géant mondial du streaming vidéo a séduit moins de nouveaux abonnés que prévu au cours du premier trimestre 2021, selon ses résultats publiés mardi.

Netflix revendique près de 208 millions d'abonnés payants dans le monde (+14%) - soit 2 millions de moins qu'attendu. En cause : une offre faible au premier trimestre - impactée par des retards de productions dus à la pandémie - et une concurrence toujours plus féroce.

"Nous avons eu dix années de croissance sans encombre, c'est juste un peu bancal en ce moment", a sobrement déclaré le patron de Netflix, Reed Hastings, lors d'une conférence aux analystes.

Le groupe californien attribue le ralentissement de la croissance de sa base d'abonnés à "la percée de 2020 liée au Covid-19" et à "une offre de contenus plus réduite au premier semestre de cette année, en raison des délais de production dus à la pandémie", selon un communiqué de presse. Tout en nuançant : "Nous avons fini 2020 avec plus d'abonnés et de revenus que nous n'en aurions eus" sans la crise sanitaire, a souligné le groupe.

Lire aussi : 2020, une année folle pour Netflix et l'ensemble du streaming vidéo

Une concurrence toujours plus accrue

Insuffisant pour rassurer les investisseurs. S'ils avaient anticipé ce ralentissement de la croissance, ils redoutent que cela ne perdure avec la levée progressive des restrictions sanitaires ayant déjà permis par exemple la réouverture des cinémas aux Etats-Unis, le premier marché de Netflix. C'est pourquoi son titre perdait environ 10% après la clôture de la Bourse.

D'autant plus que la plateforme se montre extrêmement prudente avec ses prochaines prévisions : elle ne table que sur 1 million d'abonnés supplémentaires pour ce trimestre en cours, contre 10 millions l'année dernière à la même période. Les performances du groupe "montre que le monde est en train revenir un peu à la normale, aux dépens de Netflix", a réagi dans un tweet Gene Munster, partner du fonds d'investissement Loup Ventures. "Nous pensons que sa croissance à long terme sera quasi-plate, et que Netflix sera cette année l'entreprise la moins performante parmi les "FAANG" (acronyme désignant Facebook, Apple, Amazon, Netflix, Google)."

Le pionnier du secteur doit faire face à des défis de taille. 2020 a été marqué par la structuration du marché avec l'arrivée et le déploiement massif de nouveaux mastodontes, notamment Disney+, HBO Max, Peacock (NBCUniversal)... En un peu plus d'un an seulement, Disney+ est parvenu à séduire 100 millions d'abonnés dans le monde. Sa recette magique : un catalogue important, une marque mondialement connue et des prix bas. Pour s'imposer davantage, Disney+ mais aussi HBO Max vont jusqu'à court-circuiter les cinémas. Ils rendent ainsi leurs films accessibles sur leur plateforme de streaming en exclusivité dès le premier jour de leur sortie en salle.

Lire aussi : Streaming : comment Disney+ veut poursuivre son incroyable croissance en 2021

Augmenter la production de contenus locaux

Avec ces nouvelles offres, Netflix est progressivement en train de se faire rattraper en termes d'abonnés aux Etats-Unis, son plus gros marché désormais proche de la saturation. Le leader mondial doit donc aller chercher sa croissance à l'international. Au cours du premier trimestre, la plateforme a recruté seulement 450.000 abonnés aux Etats-Unis et au Canada, contre 1,8 million en Europe et au Moyen-Orient et 1,4 million en Asie. En 2020, plus de 80% des nouveaux abonnements l'ont été en dehors de l'Amérique du Nord.

Une bonne nouvelle pour Netflix, qui peut mieux se distinguer à l'international par rapport à ses concurrents hollywoodiens, empêtrés dans des accords locaux sur les droits de leur catalogue. S'il tente lui aussi de produire des blockbusters pour son audience mondiale, le groupe californien mise depuis plusieurs années sur des productions locales. La plateforme dit vouloir débourser plus de 17 milliards de dollars en contenus originaux cette année. Une somme considérable qui a plus que doublé en moins de trois ans. Le groupe peut se le permettre. Au cours du premier trimestre, son chiffre d'affaires a bondi de 24% à plus de 7 milliards de dollars. Son bénéfice net, qui s'élève à 1,7 milliard, a plus que doublé en un an.

Lutter contre le partage de comptes

Au-delà des contenus, Netflix veut inciter les utilisateurs qui recourent gratuitement à ses services à passer à la caisse en luttant contre le partage abusif des mots de passe. Bien que ses conditions d'utilisation interdisent clairement le partage de mot de passe et d'identifiant avec "des individus extérieurs au foyer", cette pratique est très répandue. Rien qu'en France, environ 41% des abonnés Netflix ont déjà communiqué leur mot de passe à une personne vivant en dehors de leur foyer, selon une étude du cabinet de conseil BearingPoint publiée en avril.

Le phénomène n'est pas nouveau, mais jusqu'ici le groupe californien fermait les yeux car cela lui permettait de gagner en notoriété. Pour tenter d'y remédier, la plateforme expérimente aux Etats-Unis depuis un mois un nouveau message d'avertissement lors de la connexion. Une fois le message reçu, il peut être demandé d'entrer un mot de passe envoyé par mail ou SMS directement au numéro ou à l'adresse mail du titulaire du compte.

Lire aussi : Grâce au Covid, la télé résiste bien à la « netflixisation » des usages

Anaïs Cherif

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 10
à écrit le 22/04/2021 à 22:55
Signaler
Il paraît que la France les oblige à acheter des séries française pour avoir le droit de diffusion . C'est une bonne idée si cela permet aux contribuables de moins verser .

à écrit le 22/04/2021 à 10:12
Signaler
Oui ça semble logique, la pandémie réduit drastiquement le flux de production des oeuvres de ce genre, l'effet nouveauté étant majeur pour la quête de nouveaux abonnés. Ce qui remet aussi en cause le principe financier qui exige toujours plus de croi...

à écrit le 21/04/2021 à 21:58
Signaler
Après avoir compris que la pandémie servait de support à une prise de contrôle, par les GAFA et les géants du e-commerce US du chiffre d'affaire du commerce local et de la culture dans notre pays, je n'achète plus via les enseignes US...

à écrit le 21/04/2021 à 21:08
Signaler
La croissance des PHONG à taux zéro ca marche bien mais quand les taux remontent ?

à écrit le 21/04/2021 à 17:50
Signaler
Pour 200 € chez Netflix, j'achète 30 livres de poche de plus par an.! Bon...faut savoir lire, donc avoir un cerveau avec plusieurs neurones.

à écrit le 21/04/2021 à 17:27
Signaler
Je trouve qu’il n’y a rien d’intéressant à regarder sur Netflix, les séries sont nulles.

le 21/04/2021 à 19:48
Signaler
N’importe quel humain , de n’importe quelle couleur peut faire la country. Les séries sont des séries que j’ai déjà vu avant Netflix il y a 13 ans de ça donc , je trouve qu’il n’y a rien d’original et de nouveau.

le 21/04/2021 à 20:57
Signaler
Hélas, il faut avoir accès à la.plateforme usa...

à écrit le 21/04/2021 à 17:23
Signaler
Vous ne pensiez pas que la croissance allait continuer à un rythme fou; faut être français pour y croire

à écrit le 21/04/2021 à 16:53
Signaler
Et oui, à un moment, il n'y aura plus personne à conquérir.

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.