C'était l'une des stars, cette semaine, du Mobile World Congress, le salon du mobile de Barcelone. Cette grand-messe annuelle de l'industrie des télécoms a fait la place belle à la 5G. La nouvelle génération de réseau mobile est le produit phare des opérateurs du monde entier. Si, pour le grand public, la 5G est synonyme d'une meilleure connectivité sur smartphone, cette technologie est surtout la première à avoir été conçue pour les entreprises. Les opérateurs télécoms comptent sur ce nouveau réseau pour numériser tous les pans de l'économie. Tous vantent d'importants gains de production et de compétitivité. Mats Granryd, le directeur général du GSMA, qui organise le Mobile World Congress, l'a martelé : « La plus grande opportunité du secteur du mobile, c'est l'Internet industriel », a-t-il lancé lors de l'inauguration du salon.

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Les efforts de Huawei

Parmi les champions des télécoms, le chinois Huawei ne ménage pas ses efforts pour transformer les usines avec ses réseaux 5G privés. Il travaille, par exemple, avec son compatriote Midea, un fabricant d'appareils électroménagers et de climatiseurs. Dans ces usines, les robots mobiles ont chassé les traditionnels chariots élévateurs. Ceux-ci alimentent des chaînes de production où des bras robotisés ont remplacé la plupart des employés. Au bout du bout, le contrôle qualité est effectué par des caméras dopées à l'intelligence artificielle. Les données des machines alimentent enfin des logiciels de maintenance prédictive pour prévenir les pannes.

Dans le secteur de la santé, VMware a présenté un prototype d'ambulance équipée de casques à réalité virtuelle et augmentée

Les ports en voie de transformation

Les ports sont une autre industrie en voie de transformation. À Anvers, en Belgique, Orange travaille sur différents cas d'usage liés à la 5G. Parmi eux, l'opérateur français a équipé les remorqueurs, de puissants bateaux qui aident les porte-conteneurs à entrer et à sortir du port, de caméras et de différents capteurs. Les données radars et sonars sont remontées en temps réel. Elles permettent, in fine, d'augmenter le trafic. Au port chinois de Qingdao, dans l'est du pays, Huawei a déployé « un système intelligent et d'automatisation complète ». Dans les terminaux de marchandises, des caméras et robots autonomes ont remplacé les dockers. Toutes les opérations sont contrôlées, à distance, par des opérateurs devant leurs écrans.

Le secteur de la santé est aussi dans le viseur de l'industrie du mobile. À Barcelone, l'éditeur de logiciels américain VMware a présenté un prototype d'ambulance singulier. L'intérieur est bardé d'écrans et de caméras, permettant aux ambulanciers de bénéficier des conseils de spécialistes sur le chemin de l'hôpital. Le personnel dispose de casques à réalité virtuelle et augmentée pour récupérer les informations pour prodiguer certains soins d'urgence. La 5G assure notamment la sécurité et la continuité des communications, même si le réseau est surchargé, ce qui n'était pas possible avec la génération précédente.

« Des stades intelligents »

Un autre gros marché est celui des villes et des services publics. Comme la plupart des opérateurs télécoms, Deutsche Telekom développe des solutions avec la 5G pour contrôler à distance l'éclairage des rues, améliorer la circulation routière et le stationnement, optimiser le ramassage des déchets, ou encore surveiller les sites sensibles grâce à des flottes de drones. Ericsson, lui, mise sur l'avènement des « stades intelligent », un marché qu'il évalue à 24,5 milliards de dollars d'ici à 2028. Avec des partenaires, le géant suédois des équipements télécoms a imaginé une application mobile payante pour connecter les supporters, qu'ils se trouvent au stade ou non. Elle donne surtout la possibilité d'accéder pendant un match à tout flux vidéo disponible, et aux différents angles de caméra, en temps réel. Une fonction permet de revenir en arrière, par exemple, lors d'une décision arbitrale litigieuse. Ici, la 5G est vantée pour ses gros débits, comme sa capacité à attribuer des parties du réseau à des usages précis.

L'Europe en retard

L'industrie du mobile ne manque pas d'idées. Mais depuis l'arrivée de la 5G, autour de 2020, la conversion des entreprises se fait attendre en Europe. « Il y a encore peu de 5G industrielle en France, et en Allemagne, souvent citée en exemple en Europe, ce n'est pas mirobolant non plus », constate Laure de La Raudière, la présidente de l'Arcep, le régulateur des télécoms en France. D'après Christian Leon, le patron d'Ericsson France, le problème est d'abord que « l'Europe a pris du retard dans le déploiement de la 5G ». Le dirigeant argue que seule 25 % de la population du Vieux Continent est couverte en 5G via les fréquences dédiées, contre 85 % aux États-Unis et 95 % en Chine. C'est très insuffisant, selon lui, pour espérer envisager un vrai essor de la 5G industrielle. Cela préoccupe la Commission européenne, qui envisage de réviser sa régulation des télécoms pour permettre aux opérateurs d'investir davantage dans les réseaux. C'est, à ses yeux, la compétitivité du continent qui est en jeu.