Pour préserver sa souveraineté technologique, l’Etat espagnol revient au capital de Telefonica

Madrid a annoncé avoir acquis 3% de l’opérateur historique, et entend monter jusqu’à 10%. Le gouvernement s’est ému de l’arrivée surprise au capital ce groupe jugé « stratégique » du saoudien Saudi Telecom Company (STC) au mois de septembre, lequel avait pris une participation de 9,9%.
Pierre Manière
Telefonica est endetté à hauteur de 27 milliards d'euros pour un chiffre d'affaires de 40 milliards d'euros.
Telefonica est endetté à hauteur de 27 milliards d'euros pour un chiffre d'affaires de 40 milliards d'euros. (Crédits : VIOLETA SANTOS MOURA)

Pas question de laisser Telefonica entre les mains d'une puissance étrangère. C'est le message envoyé, lundi soir, par le gouvernement espagnol. Ce même jour, une holding de l'Etat, la Société publique des participations industrielles (SEPI) a annoncé avoir pris une participation de 3% de l'opérateur historique. La manœuvre est inédite : il s'agit tout simplement d'un retour de l'Etat au capital de ce géant des télécoms depuis sa privatisation totale en 1997. Madrid n'entend pas s'arrêter en si bon chemin. Le Premier ministre socialiste, Pedro Sanchez, avait indiqué, au mois de décembre, que l'Etat comptait prendre 10% du capital de l'opérateur.

Pourquoi l'exécutif s'est-il lancé dans une telle opération ? Pour allumer un contrefeu, et empêcher de perdre la main sur cette société jugée « très importante et stratégique pour le pays », selon les mots de Pedro Sanchez. Le gouvernement n'a pas caché ses craintes après la montée au capital surprise, au moins de septembre, du saoudien Saudi Telecom Company (STC). Celui-ci a déboursé 2,1 milliards d'euros contre une participation de 9,9% dans Telefonica, mais sans passer le seuil des 10% qui aurait nécessité le feu vert des autorités.

Lire aussiTelefonica, le géant espagnol des télécoms, veut (encore) réduire ses effectifs

Un enjeu de souveraineté

Or Madrid ne veut pas, en clair, que son géant des télécoms passe sous contrôle étranger. L'enjeu est, à ses yeux, la préservation de la souveraineté technologique du premier opérateur du pays, à l'heure où les services Internet irriguent tous les pans de la société. Telefonica, qui emploie quelque 100.000 personnes dans le monde, est aussi un acteur important dans plusieurs domaines stratégiques. L'opérateur a, notamment, tissé des liens étroits avec le secteur de la défense.

L'exécutif souhaite, aussi, avoir son mot à dire sur les orientations stratégiques du groupe. Celui-ci traverse une période pour le moins mouvementée. Il souffre depuis des années d'une concurrence particulièrement forte de l'autre côté des Pyrénées. La récente fusion entre ses rivaux Orange Espagne et MasMovil va, en outre, lui donner du fil à retordre en donnant naissance à un dauphin particulièrement puissant sur le marché. Telefonica est aujourd'hui, comme d'autres grands opérateurs européens, très endetté, à hauteur de 27 milliards d'euros pour un chiffre d'affaires de 40 milliards d'euros.

Réduction des coûts

Dans ce contexte, Telefonica fait la chasse aux coûts. L'opérateur a, par exemple, récemment décidé de supprimer 3.400 postes en Espagne, soit un employé sur cinq.

Son état-major pourrait aller plus loin. Il pourrait, comme Telecom Italia, décider de vendre son précieux réseau Internet fixe à d'autres acteurs. Cette hypothèse est souvent évoquée. Mais en étant au capital, Madrid aurait alors, s'il le souhaite, les moyens de s'y opposer.

Pierre Manière

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 1
à écrit le 28/03/2024 à 10:21
Signaler
Ils ont envoyé cette boîte au t'as, et maintenant ils reviennent par la petite porte!!! Segolene royal et EDF, version espagnol

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.