Télécoms : Bruxelles donne son feu vert au mariage entre Orange et MasMovil en Espagne

La Commission européenne a donné, ce mardi, son aval au mariage entre Orange Espagne et son rival MasMovil. Ce deal permettra la création d’une coentreprise, valorisée à près de 19 milliards d’euros. Il va donner naissance à un nouveau géant, capable de concurrencer frontalement l'opérateur historique Telefonica.
Pierre Manière
Christel Heydemann, la patronne d'Orange.
Christel Heydemann, la patronne d'Orange. (Crédits : Reuters)

Après plus de deux ans de difficiles négociations, Orange a finalement décroché la timbale. La Commission européenne a autorisé, ce mardi, le mariage de sa filiale espagnole, Orange Espagne, avec son rival MasMovil. Ce deal va permettre la création d'une coentreprise, valorisée à près de 19 milliards d'euros. Avec environ 36 millions de clients dans le mobile et dans l'Internet fixe, celle-ci disposera de solides atouts pour concurrencer Telefonica, l'opérateur historique et ses 40 millions de clients. Certaines dispositions permettront, à terme, à Orange de prendre le contrôle de ce nouveau poids lourd ibérique des télécoms. Orange et MasMovil ont convenu que chacun d'entre eux pourront décider de coter la nouvelle entité en Bourse - et ce entre 24 et 42 mois après la clôture de l'opération, attendue fin mars. Ce qui permettrait au groupe français d'accroître sa participation, à hauteur de 51%.

Pour le champion français des télécoms, cet autorisation de Bruxelles constitue un vrai soulagement. Les négociations avec la Commission européenne ont été particulièrement longues, dures, et incertaines. L'institution a fait capoter de nombreuses fusions dans les télécoms ces dernières années. Elle voit souvent d'un mauvais œil ces opérations de consolidation à l'échelle nationale, qui réduisent la concurrence et favorisent, de facto, des hausses de prix pour les consommateurs. Dans son communiqué, la Commission européenne rappelle qu'elle redoutait que « l'opération, telle qu'elle avait été initialement notifiée, ne restreigne la concurrence sur les marchés de détail de la fourniture de services internet mobiles et fixes en Espagne ».

Le roumain Digi va récupérer des fréquences

Elle craignait, en particulier, que ce mariage n'entraîne « des hausses de prix significatives pour les consommateurs espagnols, bien supérieures à 10% »« Les gains d'efficacité que l'opération aurait pu engendrer, tels que les économies de coûts ou le déploiement supplémentaire de la 5G ou de la fibre optique, n'auraient pas compensé les effets anticoncurrentiels significatifs de l'opération », insiste-t-elle.

C'est pourquoi la Commission européenne a imposé des « remèdes » importants à Orange et MasMovil pour les autoriser à se marier. Concrètement, ils vont devoir céder des actifs à Digi, un opérateur roumain particulièrement agressif en Espagne, afin qu'il continue à jouer les trublions sur le marché. Digi va récupérer des fréquences 4G et 5G détenues par MasMovil. Cela lui permettra « de construire son propre réseau mobile, et d'exercer une forte pression concurrentielle » sur l'ensemble Orange-MasMovil. En outre, Digi aura la possibilité, s'il le souhaite, de louer leur réseau mobile, le temps qu'il bâtisse le sien, via un accord d'itinérance. Cela dit, cette option reste « facultative » souligne la Commission européenne, qui rappelle notamment que Digi dispose déjà d'un accord d'itinérance avec Telefonica.

Une consolidation à tempérer

Cette solution satisfait pleinement Margrethe Vestager, la vice-présidente de la Commission européenne, en charge de la politique de concurrence.

« Les remèdes proposés permettront à Digi, l'opérateur de réseau mobile virtuel le plus important et à la croissance la plus rapide en Espagne, de reproduire la forte pression concurrentielle exercée jusque-là par MasMovil, affirme-t-elle. Ils permettront aux consommateurs espagnols de continuer à bénéficier d'un marché des télécommunications concurrentiel, en termes de prix, de qualité et de connectivité 5G. »

Cette « consolidation » du marché espagnol est, in fine, à tempérer. Au terme de l'opération, Digi va, de fait, se présenter comme un rival plus sérieux et menaçant qu'il ne l'était. Cette concurrence ne fait, toutefois, pas peur à Orange. Une source proche de l'opérateur confie que celui-ci préfère batailler avec des rivaux qui déploient, comme lui, leurs propres infrastructures, qu'avec des « coucous », au modèle ultra-low cost, qui ne font que s'appuyer sur le réseau des autres.

Pierre Manière

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