Des conséquences économiques non négligeables

Un secteur touristique en piteux état au Mexique, un marché mondial de la viande de porc bouleversé... L'épidémie de la grippe A (H1N1) produit ses premiers effets économiques.

Selon les estimations du ministre mexicain des Finances, Augustin Carstens, l'épidémie va globalement coûter 2,3 milliards de dollars au Mexique, correspondant à un ralentissement compris entre "0,3 et 0,5%" du produit intérieur brut (PIB). Le ministre a annoncé un plan visant à injecter 2,1 milliards de dollars dans l'économie, incluant des mesures d'incitation fiscale pour 1,3 milliard et un fonds de promotion du tourisme.

C'est en effet ce secteur le plus touché. A Cancun par exemple, les hôtels tournent à 20% de leur capacité, selon les autorités locales. Les sites touristiques balnéaires sont "sûrs", a réitéré avec force mardi le ministre de la Santé mexicain, José Angel Cordova, citant entre autres les stations balnéaires de Los Cabos et de Puerto Vallarta, sur la côte du Pacifique proche des Etats-Unis, et l'île de Cozumel, près de Cancun, sur le littoral atlantique.

Avec environ 23 millions de visiteurs par an, le tourisme est au Mexique la troisième source de devises, après le pétrole et les envois de fonds par les travailleurs immigrés aux Etats-Unis.

Pour tenter de sortir la tête de l'eau, une opération de promotion lancée par plusieurs groupes hôteliers, "Garantie sans grippe ", offre ainsi "des séjours gratuits pendant trois ans au voyageur qui présenterait des symptômes de la grippe huit jours après son retour".

Le ralentissement du tourisme ne concerne pas le seul Mexique. Une organisation professionnelle des agences de voyage espagnoles, Aedave, a demandé jeudi au gouvernement des aides directes pour affronter les conséquences de la grippe pour les professionnels du secteur opérant au Mexique. Selon l'Aedave, 10% des voyages réalisés par les Espagnols en Amérique latine ont le Mexique comme destination.

La situation pourrait s'améliorer progressivement avec une série d'annonces intervenues ces derniers jours. Lundi, l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) a ainsi réclamé la levée des restrictions aériennes prises par certains pays. Mercredi, le Pérou a levé la suspension des vols depuis et vers le Mexique, décidée il y a deux semaines ; l'Argentine se préparerait à faire de même (mais non Cuba).

Ce jeudi, l'Association de tour-opérateurs français (Ceto) a également recommandé à ses membres de reprendre progressivement les voyages vers le Mexique après les avoir suspendus fin avril. Les vols directs entre Paris et la station balnéaire de Cancun, assurés habituellement par Corsairfly, filiale de Nouvelles Frontières, et XL Airways, vont reprendre à partir du 7 juin, a a déclaré René-Marc Chikli, président du Ceto. Air France-KLM a toujours maintenu ses vols à destination de Mexico, a-t-il rappelé.

Ce jeudi, le ministre de la Santé mexicain, le Dr José Angel Cordova, a déclaré que le Mexique comptait "demander un appui sous forme de dédommagement économique". Des mécanismes de dédommagements ont été prévus par les organismes financiers internationaux après l'épidémie de Syndrome respiratoire aigu sévère (Sras) en Asie en 2003, a fait valoir le Dr Cordova, citant comme sources possibles de ces dédommagements  la Banque mondiale et la Banque interaméricaine de développement.

Porc : 2 milliards de dollars perdus par jour

Autre secteur bousculé par la grippe A (H1N1), le marché mondial de la viande de porc. La Chine, la Russie mais aussi la Thaïlande, l'Indonésie, l'Ukraine, l'Equateur ou la Croatie ont limité leurs importations de porc en provenance du Mexique et de certaines régions des Etats-Unis et du Canada, lors de l'apparition de l'épidémie.

Concernant la Chine, le Canada a menacé début mai de porter plainte auprès de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) si elle ne levait pas son embargo sur ses importations de porc. "Les membres de l'OMC sont autorisés à restreindre les importations pour protéger la santé publique" mais "il faut que les mesures soient temporaires et scientifiquement justifiées", rappelle une source proche de l'organisation. Or l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a rappelé fin avril que la consommation de viande de porc n'était pas un facteur de propagation du virus de la grippe A (H1N1).

Le Mexique est également venu à la tribune de l'OMC pour demander des explications à ses 153 pays membres. Quant aux "producteurs américains de porc, [ils] estiment leurs pertes à 2 milliards de dollars par jour", relève Jean-Paul Simier, directeur de l'agriculture au Conseil régional de Bretagne. A ce jeu, les Européens pourraient gagner quelques parts de marché.

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