Les pays émergents, nouvel eldorado nucléaire

Le constructeur nucléaire russe Rosatom vend comme des petits pains ses réacteurs. Le Vietnam, le Bangladesh, le Biélorussie et la Turquie espèrent mettre en chantier des centrales russes dès 2012. Également en lice, les Coréens tentent eux de capitaliser sur leur spectaculaire victoire d'Abu Dhabi, talonnés par ... les Japonais, prêts à tout pour continuer à vendre des réacteurs.
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Fukushima n'a pas refroidi toutes les ardeurs nucléaires, loin de là. En 2011, environ 60 pays, vierges de tout réacteur, ont consulté l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) pour faire leur premier pas vers l'atome. «Nous nous attendons à ce que cette année le Vietnam, le Bangladesh, les Émirats arabes unis, la Turquie et la Biélorussie débutent la construction de leurs premières centrales nucléaires,» a déclaré fin février Kwaku Aning, directeur adjoint de l'agence onusienne. La Jordanie et l'Arabie saoudite pourraient suivre leur exemple en 2013, a-t-il ajouté.

Des arguments sonnants et trébuchants

Ce ne sont pas des EPR français qui vont fleurir dans ces contrées. La grande majorité de ces nouveaux convertis à l'atome ont signé des contrats fermes avec AtomStroyExport (AES), la filiale export de la puissante agence nucléaire russe Rosatom. Pour convaincre, les Russes n'hésitent pas à déployer, à côté de leur très persuasive politique diplomatique, des arguments plus sonnants et trébuchants. A l'instar de la proposition qu'ils viennent de faire mercredi 7 mars à la Jordanie. Ils offrent au voisin d'Israël de financer, construire et exploiter pas moins de quatre réacteurs de 1.200 MW, selon un accord du même type que celui signé avec la Turquie en mai 2010. Cette offre intervient alors que la Jordanie, engagée de longue date dans un processus d'appel à candidatures international (l'Atmea d'Areva et de Mitsubishi, le VVER de Rosatom et le Candu canadien ont été présélectionnés) est supposée désigner le vainqueur d'ici à la fin du mois de mars.

20 milliards de dollars sur la table à Ankara

En Turquie, les Russes ont devancé les occidentaux, et notamment Areva en discussion depuis des années sur un projet finalement abandonné en 2000, en mettant sur la table 20 milliards de dollars pour construire 4 réacteurs sur les bords turcs de la Méditerranée, dans la région de Akkuyu. Dans un premier temps, ils seront propriétaires à 100% mais proposent d'ouvrir à terme 49% du capital à des intérêts turcs. Un second site est à l'étude en Turquie, à Sinop, sur les rives de la Mer noire. Avant Fukushima, l'électricien japonais Tepco tenait la corde. Depuis, un protocole d'accord a été signé avec le constructeur japonais Toshiba. Les Français EDF, GDF Suez et Areva seraient en discussion pour venir en renfort.

Les Japonais appelés à la rescousse en Biélorussie

Au Bangladesh et en Biélorussie, les Russes sont seuls en lice (avec des contrats signés fin 2011) même si le président biélorusse vient fin février de faire un appel du pied aux Japonais. « Si vous décidez de construire une centrale nucléaire quelque part, la Biélorussie doit être en tète de liste », a-t-il lancé à l'ambassadeur du Japon. Au Vietnam, les Japonais sont dans la course. Ils ont été retenus, avec les Russes, pour construire les deux premiers réacteurs du pays. Les Coréens, grands vainqueurs surprise fin 2009 de l'appel d'offres géant d'Abou Dhabi où les Français se sont cassés les dents, sont pressentis pour le 3ème réacteur. Le Vietnam veut disposer d'un réacteur en 2020 mais prévoit 10 unités en 2030. Comme les Russes, qui ont offert à Hanoï des prêts de 9 milliards de dollars pour financer leur VVER, les Japonais proposent des financements préférentiels et une « assistance » pour construire routes, ports et autres infrastructures pour bâtir ces centrales.

Les problèmes de financement et d'infrastructure freinent davantage que Fukushima

La bataille reste vive sur ce marché, finalement peu refroidi par Fukushima, même si capacités de financement, considérations géopolitiques et infrastructures insuffisantes constituent des freins plus consistants que les considérations liées à la sûreté. Les candidats à l'atome se bousculent : Thaïlande, Indonésie, Egypte, Kazakhstan, Pologne, Lituanie, Chili, Arabie Saoudite (qui a annoncé un programme de 80 milliards de dollars en juin 2011 pour se doter de 16 réacteurs nucléaires d'ici à 2020), la Malaisie, le Koweït, le Maroc, même le Nigeria et Israël, sans compter le Kenya, les Philippines, le Venezuela ou le Soudan ... Rares sont les pays qui ne se sont pas lancés dans des programmes ou affichés des options plus ou moins sérieuses vers le nucléaire.
Mais attention, sur les 65 pays « candidats » au nucléaire recensés par l'AIEA en septembre 2010, la moitié n'était pas fermement engagée dans un tel programme, notait alors l'agence. Et sur cette trentaine de pays juste « intéressés », 17 disposaient de réseaux électriques d'une puissance très insuffisante pour une centrale nucléaire (inférieure à 5 gigawatts, alors que les réseaux d'une puissance comprise entre 5 et 10 GW sont déjà très limites pour un réacteur).
 

Retrouvez ici notre dossier spécial Fukushima

Commentaires 2
à écrit le 03/04/2012 à 8:00
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J'ai déjà expliqué que la première qualité d'un être-humain est de reconnaître ses erreurs...Il y a 70 ans, nous en avons fait une monstrueuse (que l'initiateur Mr Opeinhemer a clairement expliquée). L'énergie nucléaire (civile et militaire) est le p...

à écrit le 08/03/2012 à 16:46
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Et pourquoi au pays des sarkozistes les ventes se portent-elles aussi mal ?

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