Et pendant ce temps, l'Autriche restructure sa dette...

Vienne a été un des plus féroces adversaires de la restructuration de la dette grecque. Mais, parallèlement, elle organise celle de la banque Hypo Alpe Adria, nationalisée en 2009, aux dépens, notamment de la Bavière...
L'Autriche a réduit de 55 % sa dette envers la Bavière

Pendant que l'Europe refuse de discuter de la dette grecque et que d'aucuns s'inquiètent des conséquences fâcheuses d'une restructuration des créances de l'Hellade pour les économies des retraités bavarois, l'Autriche - un des pays les plus actifs dans ce refus - tranche dans le vif... Et restructure sa dette. La République alpine a en effet passé un accord mardi 7 juillet avec l'Etat de Bavière concernant les créances de ce dernier envers la banque autrichienne nationalisée et en faillite Hypo Group Alpe Adria (HGAA).

La folie Hypo Alpe Adria

Pour comprendre la situation, il convient de réaliser un léger retour en arrière. Hypo Alpe Adria a été une des banques les plus actives d'Autriche au début des années 2000. Propriété du Land autrichien de Carinthie, alors dominé par le politicien d'extrême-droite Jörg Haider (dont le parti a participé au gouvernement fédéral de 2000 à 2005), HGAA s'est beaucoup développé en Europe du Sud-est. Trop sans doute. En mars 2007, quelques mois avant l'éclatement de la crise des subprimes, la Carinthie vend la majorité des actions de la banque à la banque régionale publique bavaroise BayernLB.

Le rachat par BayernLB

Après la faillite de Lehman Brothers en septembre 2008, BayernLB est en grande difficulté, car à l'image de nombreuses banques régionales allemandes, elle s'est montrée fort imprudente dans ses investissements. Et HGAA n'est pas le moindre de ses soucis. Les prêts accordés par cette banque dans les Balkans deviennent rapidement non recouvrables. En décembre 2008, l'Etat bavarois doit renflouer BayernLB à hauteur de 10 milliards d'euros. La banque bavaroise tente alors d'aider sa filiale carinthienne et lui accorde un crédit de 2,3 milliards d'euros. Mais en vain, on découvre alors l'ampleur de la gestion désastreuse et clientéliste de HGAA durant les années 2000. En décembre 2009, BayernLB jette l'éponge et HGAA est nationalisée par l'Etat fédéral autrichien pour un euro symbolique.

Le défaut de Vienne

L'affaire aurait pu s'arrêter là. Sauf que Vienne a laissé pourrir la situation et n'a pas renfloué HGAA. Il faut attendre la fin de 2013 pour que le gouvernement autrichien ne réagisse. La conjoncture s'est encore dégradée dans les Balkans, la facture augmente. Vienne décide alors de créer une « structure de défaisance » ou Bad Bank, une banque qui regroupera tous les mauvais actifs de HGAA. Cette structure s'appelle HETA. En mars dernier, la découverte d'un nouveau « trou » dans les comptes de HETA de 7,6 milliards d'euros, soit 2,3 % du PIB autrichien, conduit Vienne à utiliser l'arme atomique. Tous les paiements aux créanciers sont suspendus jusqu'en mars 2016. Un moratoire sur près de 11 milliards d'euros de dettes le temps de trouver une « résolution », autrement dit une restructuration de la dette de HETA, donc indirectement de la République d'Autriche. Techniquement, ce n'est pas un défaut souverain. Mais dans les faits, cela en a toutes les apparences : un Etat de la zone euro décide de suspendre ses engagements. D'autant que s'il y a restructuration, en théorie, les garanties du Land de Carinthie pourraient s'appliquer. Or, ce Land ne peut payer. C'est donc même un double défaut qui se prépare. Sans mémorandum, sans discussion, sans réaction internationale.

Querelle austro-bavaroise

C'est dans ce contexte que s'est envenimée la querelle avec la Bavière. En effet, BayernLB n'a pas récupéré son crédit de 2,3 milliards d'euros. HGAA et HETA (donc le gouvernement autrichien) prétend qu'il ne s'agissait pas de crédit, mais d'une recapitalisation de l'actionnaire. Les Autrichiens sont décidément mauvais payeurs ! En 2012, les Bavarois ont porté l'affaire devant la justice et le 8 mai 2015, un tribunal de Munich a condamné l'Autriche à verser 2,75 milliards d'euros à BayernLB. Vienne refuse ce jugement. La tension monte alors entre la République alpine et le Land bavarois qui se retrouve désormais dans la situation de tous les autres créanciers de HETA.

Accord avec Munich

Logiquement, si l'on en croit la dureté de l'Allemagne vis-à-vis de la dette grecque et l'inquiétude supposée par la presse française des retraités bavarois, le gouvernement régional bavarois aurait dû se montrer ferme face aux méthodes autrichiennes. Mais il n'en a pas été ainsi. Munich et Vienne ont discuté et la Bavière a accepté de ne recevoir que 1,3 milliard d'euros, soit 45 % de la créance de BayernLB. En réalité, cette somme est un seuil. Si le règlement de la dette de HETA amène une annulation de la dette supérieure à 45 %, Munich touchera cette somme quand même. Si les pertes sont moindres, la Bavière touchera la différence, si elles sont supérieures, la Bavière conservera ses 1,3 milliard d'euros.

Contours d'une restructuration

Bref, l'Autriche commence à dessiner les contours d'une restructuration massive de la dette de HETA qui devrait s'accompagner d'un refus d'exercer la garantie de la Carinthie. Les autres créanciers qui ont engagé un recours devant la Cour constitutionnelle autrichienne savent donc à quoi s'attendre au cas où leur demande est déboutée.

Fureur en Bavière

En attendant, l'Autriche met donc à contribution les contribuables bavarois qui auront dans l'affaire un manque à gagner de 1,4 milliard d'euros. Rappelons, pour mémoire, que la Grèce n'a, en tant que telle, rien coûté à ces mêmes contribuables. Du reste, les milieux politiques bavarois s'en sont émus... Le leader des Freie Wähler (Electeurs libres, centristes), troisième parti au parlement bavarois parle « d'annulation de la dette autrichienne ». On s'en émeut d'autant plus que lorsque BayernLB a vendu pour un euro HGAA à l'Etat autrichien, la banque bavaroise avait renfloué HGAA à hauteur de 850 millions d'euros contre la garantie de Vienne sur les dettes de la banque vendue. Et voici que Vienne obtient une réduction de sa garantie. La facture a donc du mal à passer en Bavière. Les retraités bavarois ont décidément bien à se plaindre de l'inconscience et de l'incompétence de certains Etats européens...

Commentaires 27
à écrit le 18/07/2015 à 22:40
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Romaric Godin ou ce qu'il reste de la presse libre en France, le seul qui donne un information différent des autres et qui a tout a fait raison, pourquoi écrire ce que 20 autres écrivent en même temps, c'est ça avoir le choix de l'information

à écrit le 16/07/2015 à 6:22
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Qui finance L'UE Par habitant l'Allemagne n'arrive qu'en septième position en tant que payeur net. Du côté des récepteurs c'est la Hongrie qui arrive en première position, suivie de la Lituanie, la Grèce n'arrive qu'en troisième position. Je répète...

à écrit le 14/07/2015 à 17:41
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Je lis souvent les articles de Romaric Godin et je suis toujours stupéfait du nombre de posts hostiles qu'il suscite.Je me demande s'il existe ailleurs un journaliste qui soit aussi honni par des gens qui visiblement n'écrivent que pour déverser leur...

à écrit le 13/07/2015 à 9:14
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Deux poids, deux mesures : implacable rudesse pour les Grecs qui ont rapporté de l'argent aux caisses allemandes, laxisme pour les copains germaniques ! De plus, à lire les commentaires farouchement anti-grecs, on peut légitimement douter de la compé...

à écrit le 13/07/2015 à 9:14
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Deux poids, deux mesures : implacable rudesse pour les Grecs qui ont rapporté de l'argent aux caisses allemandes, laxisme pour les copains germaniques ! De plus, à lire les commentaires farouchement anti-grecs, on peut légitimement douter de la compé...

à écrit le 10/07/2015 à 12:40
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La Grèce n'a rien coûté à ces contribuables allemands ??!! Qui finance la BCE qui donne des milliards d'euros aux grecs ? L'Allemagne ! C'est le seul pays qui en a les moyens ! Alors oui les Allemands ont déjà beaucoup payé pour la Grèce.

le 13/07/2015 à 0:17
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Personne ne donne de l'argent aux grecs. On leur prête. Certes à des taux intéressants, mais il s'agit bien de prêts. C'est en cas de défaut que ça aura vraiment des conséquences sur le contribuable. Et encore, étalées sur des années et des années.

le 16/07/2015 à 6:13
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Qui finance L'UE Par habitant l'Allemagne n'arrive qu'en septième position en tant que payeur net. Du côté des récepteurs c'est la Hongrie qui arrive en première position, suivie de la Lituanie, la Grèce n'arrive qu'en troisième position. Je répèt...

à écrit le 09/07/2015 à 22:47
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Mr Godin ferait mieux d'aider tsipras a faire ces propositions car le temps tourne J'ai lu dans les propos de Mr Godin que tsipras serait peut être un grand homme de la grece Attendre 23h30 le dernier jour de l'ultimatum alors qu'on négocie depuis ...

à écrit le 09/07/2015 à 22:27
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Pauvre Godin ! Puisque les faits s'obstinent à lui donner tort en ce qui concerne la Grèce et amis géniaux stratèges de Syriza, il s'attaque à l'Autriche. Malheureusement c'est encore raté car il oublie juste que la restructuration d'une banque n'a a...

à écrit le 09/07/2015 à 20:13
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Article tres interessant! Mais, je ne comprends pas pourquoi les agences de notation n'ont pas considere ce moratoire de l'Etat autrchien comme un defaut de paiement. Les titulaires des obligations n'ont pas recu leur coupon a temps et en heure. Cela...

à écrit le 09/07/2015 à 18:42
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Effectivement un jour il faudra sans doute réduire la dette grecque Mais ce n'est pas le moment Tout a ete mîs dans des usines a gaz financières pour que ça ne soit pas d'actualité avant 2020 C'est du Pipo d'extrême gauche Le vrai probleme est q...

à écrit le 09/07/2015 à 18:39
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De vrais bolchéviques ces Autrichiens...

à écrit le 09/07/2015 à 17:46
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@momo qu'est ce qui vous permet de parler de comptes trafiqués? quelles sont vos qualifications compétences et sources pour dire cela? Sinon vos propos sont tout aussi trafiqués que vous!

à écrit le 09/07/2015 à 17:43
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Plus je lis Godin et plus je pense qu'il ne comprend rien aux affaires économiques et financières. Comment peut-on comparer la restructuration de dette privée avec la restructuration d'une dette publique qui sert à financer les besoins d'un état au j...

à écrit le 09/07/2015 à 17:20
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Plus je lis Godin et plus je pense qu'il ne comprend rien aux affaires économiques et financières. Comment peut-on comparer la renégociation d'une dette privée avec la renégociation d'une dette publique qui sert à financer les besoins au jour le jour...

à écrit le 09/07/2015 à 17:00
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Leparmentier va-t-il s'en émouvoir dans le monde, son copain de Selfi Quatremer va-t-il s'en alarmer dans libé et le point va-t-il ajouter le président autrichien à sa une de cette semaine......

à écrit le 09/07/2015 à 16:03
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Faut pas tout mélanger pour embrouiller la ménagère.En ce qui concerne la Grèce on discute pas de sa dette mais de la prise en charge de son budget de fonctionnement pour les prochaines années.Le fait de lui réduire la dette de 60% voire même l'effac...

le 09/07/2015 à 18:04
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La France n'a pas d'excédent primaire et emprunte elle aussi pour payer ses dépenses courantes.

à écrit le 09/07/2015 à 15:53
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En ce qui concerne la Grèce ,il s'agit de payer ses frais de fonctionnement et ceci pour les années à venir car elle n'est pas capable de s'autofinancer ,ça n'a rien a voir avec une dette dont on connait le montant.

à écrit le 09/07/2015 à 15:49
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Pauvres retraités Bavarois, peut-on parler de persécution à leur égard ? Il serait fort avisé de poser cette question à M. Leparmentier !

le 18/07/2015 à 22:43
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je propose J Quatremer aussi

à écrit le 09/07/2015 à 15:28
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C est le rersultat de deals mafieux avec des investisseurs louches en Croatie et aux pays des Balkans. Savez vous combien de top managers de ces banques bavaroises sont en tôle actuellement ??? Ca aussi il faut le dire !

à écrit le 09/07/2015 à 15:23
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C'est en effet compliqué mais il y a une différence énorme : il s'agit d'affaires commerciales. Rien à voir avec la Grèce. Les cousins teutons ont des comptes embrouillés puisque banques régionales et caisses d'épargne ont des missions totalement dif...

à écrit le 09/07/2015 à 15:21
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Godin le fait il expres? Il est en train de comparer la pertes des économies privés de personnes dans leur placement financier avec la perte des impots payés par ls citoyens. Si l'auteur ne comprend pas la différence, c'est de l'imcompétence. Au ...

le 11/07/2015 à 9:26
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Pardon, mais si l'Etat autrichien a racheté la banque, il s'agit bien d'une dette publique.

à écrit le 09/07/2015 à 15:17
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Oh que c'est petit... :p

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