"L'Europe doit faire preuve de souplesse sur la rigueur"

Nicolas Forest, directeur de la stratégie taux chez Dexia Asset Management, analyse la décision de l'Eurogroupe de modifier l'objectif de déficit public de l'Espagne pour 2012.
Nicolas Forest (Dexia Asset Management)/DR.

Le gouvernement Rajoy a obtenu sans trop de difficulté de mettre un peu d'eau dans l'amère potion de la rigueur en Espagne. Lundi soir à Bruxelles, les ministres des Finances de la zone euro ont fixé à 5,3% le déficit public maximal de la péninsule pour 2012. Cela représente tout de même une consolidation budgétaire nette de 3,2% en 2012 et 3,3% en 2013, l'objectif de 3% de déficit en 2013 étant maintenu. La croissance en berne annonce à l'évidence d'autres ajustements.

 La révision de l'objectif de déficit espagnol en 2012 est-elle la marque d'un sain pragmatisme ou au contraire le signe que les nouvelles règles de gouvernance dans la zone euro sont inapplicables ?

Cela montre un tournant. C'est la première fois que l'Europe fait preuve d'une certaine souplesse face à des révisions des chiffres de déficit. Que l'on retienne 5,8% ou 5,3% ne fait pas beaucoup de différence. Le fond du sujet c'est que la Commission européenne accepte l'idée qu'en 2012 une grande économie comme l'Espagne ne respecte pas son objectif de déficit.

C'est donc un précédent ?

Cette attitude devrait en effet perdurer car la plupart des pays observent une croissance inférieure à celle prévue. Il est important de réduire la dette mais pas au prix d'une récession sanglante. La révision du chiffre espagnol n'est pas une surprise. Je ne serais pas étonné qu'il y ait une nouvelle révision.

L'objectif de ramener le déficit dans tous les pays de la zone euro à 3% du PIB en 2013 est-il réaliste ?

Tout dépendra de la croissance dans les grands pays comme la France et l'Allemagne mais aussi dans le reste du monde. En Espagne, par exemple, la réduction de la dette publique, en plus du "deleveraging" (réduction de la taille de bilan. NDLR) du secteur privé ne peut se faire qu'à condition d'avoir un excédent de la balance des paiements courants. Cela n'est possible qu'avec un euro faible et une croissance mondiale soutenue. La balance des paiements courants espagnole est encore dans le rouge mais elle s'est améliorée. L'Irlande a dégagé un excédent en 2011. L'Espagne a retrouvé ses parts de marché de 2007. L'Irlande aussi est revenue à un niveau correct. Les choses avancent dans le bon sens mais cela demande du temps. L'Europe doit faire preuve de souplesse sur la rigueur. Il faut acheter un peu de temps.

Tout cela ne plaide-t-il pas une fois de plus pour une relance de la demande allemande ?

L'Allemagne n'est pas l'Espagne. Elle n'a jamais brillé par une demande intérieure forte. Malgré les augmentations de salaires, il y a eu peu de rebond de la consommation allemande. Le taux de change effectif de l'euro, qui est relativement bas, reste donc la clé d'une bonne convalescence de l'économie européenne. Il est important que la BCE ne soit pas la première banque centrale à remonter ses taux et qu'elle laisse la liquidité sur le marché. Le LTRO (the longer term refinancing operations) a certes permis de régler le risque de liquidité mais il reste maintenant à gérer le risque de crédit qui mettra du temps à se tasser.

Commentaires 3
à écrit le 13/03/2012 à 20:47
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L'Europe doit surtout nous foutre la paix et s'occuper des vrais dossiers, sans nous mettre couche après couche de législation et autres barrières anticoncurrentielles qui ne servent que les intérêts des multinationales dont les milliers de lobbyiste...

à écrit le 13/03/2012 à 17:47
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Dexia...Dexia... c'est pas cette banque qui a fait faillite à cause de ses placements hasardeux ? Moi je me méfierais quand même avant de donner la parole à un "directeur stratégie" de chez eux... Est-ce qu'en sport on demande des conseils stratégiqu...

le 14/03/2012 à 12:15
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Tout à fait, on donne la parole à des incompétents qui ne connaissent rien en économie (la vraie, pas la pipeau enseignée depuis une trentaine d'année basée sur l'école de Chicago qui nous a fournie les pseudos "prix Nobel d'économie" ou plutôt un ra...

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