"L'Etat et l'administration doivent apprivoiser les nouvelles technologies"

/>latribune.fr.- La nomination, dans le nouveau gouvernement, de Claudie Haigneré comme ministre délégué à la Recherche et aux nouvelles technologies vous satisfait-elle ?Pierre-Marie Vidal.- Je suis très satisfait de voir que le gouvernement a retenu l'idée d'une attribution ministérielle dédiée aux nouvelles technologies. Mais le Club du e-public se sent plus concerné par la nomination d'Henri Plagnol au secrétariat d'Etat à la Réforme de l'Etat, auprès du ministre de la Fonction publique. Nous croyons que le développement de l'usage des nouvelles technologies dans l'administration peut être extrêmement utile à la réforme de l'Etat. Le fait qu'il y ait un Secrétariat d'Etat qui y soit totalement consacré est extrêmement positif.Notre intention, avec l'envoi de la lettre ouverte au Premier ministre, n'était pas de marquer notre inquiétude : il s'agissait plutôt de nous manifester pour défendre la cause des NTIC à un moment charnière. Il est temps de réformer notre administration pour la faire vivre dans son temps. Quand Jean-Pierre Raffarin parle de "nouvelle gouvernance", j'entend aussi pour ma part "nouvelle façon d'administrer". L'Etat, l'administration doivent apprivoiser, utiliser les nouvelles technologies. Comme il y a vingt ans lorsque l'informatique a obligé l'entreprise à revoir certains de ses modes d'organisation, aujourd'hui, l'usage des NTIC dans le service public peut aider à une évolution de l'attitude de l'administration. Pour faciliter la vie des administrés mais aussi et surtout une occasion de mettre en valeur la qualité du travail de l'administration dont la plupart d'entre nous ne soupçonnent pas l'importance. En fait pour "réhabiliter" le travail de l'administration qui est le plus souvent méconnu. Ce thème était-il présent dans les programmes des candidats ? Tous les candidats, sans exception, ont consacré un "chapitre" de leur programme aux nouvelles technologies. Mais il était généralement consacré au développement de l'accès Internet, de la démocratisation de cet accès et au haut débit. Le thème de la réforme de l'administration grâce aux nouvelles technologies était moins présent. Il y a pourtant une révolution à faire, qui n'est d'ailleurs pas tant technologique que psychologique. L'administration doit apprivoiser les nouvelles technologies, comme les entreprises l'ont fait avant elle. Mais à la différence des entreprises, l'administration a un mode d'organisation qui ne favorise pas la mise en réseau, notamment parce qu'elle est organisée en secteurs de compétence séparés les uns des autres( finance, agriculture, santé, social ... ). L'interministériel est une notion administrative qui est rarement tournée vers l'usager. De plus, l'Etat a parfois délaissé la formation de ses personnels, moins bien formés à l'informatique, l'ouverture aux avantages des NTIC est plus difficile. L'administration a cependant un avantage sur l'entreprise pour engager cette réforme : les nouvelles technologies ne risquent pas d'y déboucher sur des licenciements. Dans l'administration gain de productivité ne veut pas obligatoirement dire licenciement, mais plutôt flexibilité des horaires de travail, enrichissement des taches ou plus grande disponibilité humaine pour la relation avec les administrés que nous sommes tous.Henri Plagnol vous semble-t-il sensible à ces arguments ? Il est encore trop tôt pour le dire. Mais je note déjà que c'est un Européen convaincu et qu'il peut être sensible au fait que la France, dans ce domaine, est très en retard. Dernier exemple en date : l'expérience de vote électronique qui a eu lieu à Vandoeuvre-les-Nancy à l'occasion de la présidentielle a été rejetée par le Conseil constitutionnel. Au lieu de se contenter de ce rejet, le Conseil aurait dû créer très vite un groupe de travail pour définir les conditions dans lesquelles le vote électronique pourrait être recevable. En Grande-Bretagne, en Belgique, ce genre de débat est clos depuis longtemps. Y a-t-il une réforme emblématique à mettre en place pour marquer la volonté de l'Etat "d'apprivoiser" les nouvelles technologies, comme vous le souhaitez ? Je n'en suis pas sûr : je préférerais une multitude de petites mesures qu'une mesure emblématique. Dans de nombreux cas, réformer l'administration grâce aux nouvelles technologies passe par des idées simples. On pourrait, par exemple, prévenir par mail le titulaire d'un passeport que celui-ci approche de sa date d'expiration, en lui permettant d'engager par retour les démarches de renouvellement. Ou mettre en ligne, en accès libre, les résultats des enquêtes publiques, qui ne sont aujourd'hui consultables qu'à certaines heures et dans de mauvaises conditions. Cela permettrait aussi de valoriser le travail des services publics qui ont préparé ces dossiers.Je pense également aux appels d'offres publics : réalisés en ligne, ils seraient complètement transparents, pourraient être contrôlés à distance et permettraient d'ouvrir le processus des appels d'offres, aujourd'hui très lourd, à un plus grand nombre d'entreprises. Bercy a tenté l'expérience pour ses achats de fournitures de bureau et cela fonctionne très bien. De nombreuses expériences sont aujourd'hui en cours de réalisation, c'est au gouvernement de les encourager, de faire preuve de volonté politique. Si c'est le cas, le Club du e-public sera à ses côtés.
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