Baisser de rideau final pour Pere-Noel.fr

C'est la fin d'une aventure forte en rebondissements. Pere-Noel.fr, la société dont les pratiques commerciales surprenantes ont défrayé la chronique, a été mis en liquidation judiciaire par le Tribunal de commerce de Lyon. L'administrateur judiciaire a en effet refusé l'offre de reprise faite par TopAchat, qui s'était porté candidat à la reprise de la société. Le cyber-marchand, qui fait partie de la galaxie Ixo (WebSeductions, Onatoo.com, etc.) désirait reprendre les actifs de Pere-Noel pour une somme symbolique et ne garder que quatre personnes sur la trentaine de salariés encore employés par la société. Dans le sillage de l'annonce de la liquidation, les salariés de Pere-Noel ont d'ailleurs été informés de leur licenciement. Ses deux filiales, l'assembleur informatique Novatek.com et le site de vente de produits high-tech Booston.com, ont également baissé le rideau. L'entreprise s'était déclarée en cessation de paiement un mois plus tôt auprès du Tribunal de Lyon où elle possède une boîte postale. Derniers chiffres en date pour Pere-Noel: la société, cotée au marché libre, affichait un passif de 2,5 millions d'euros pour un chiffre d'affaires annuel en 2002 de 22 millions d'euros.La question est maintenant de savoir si quelqu'un se portera candidat à la reprise des lambeaux de la société, et surtout à celle de la marque, Pere-Noel.fr. Une marque incontestablement connue. Mais si la société se présentait comme le premier site d'e-commerce français, elle devait sa notoriété autant à ses pratiques commerciales douteuses qu'à ses campagnes de communications.Pere-Noel.fr a été créée en 1999 par deux frères, Alexandre, polytechnicien, et Grégoire Für. Le site, sorti le 3 novembre, a choisi de se faire connaître à l'occasion des fêtes de Nöel. Comme d'autres en leur temps, le duo réussit une belle levée de fonds: 12 millions de francs en mars 2000 obtenus auprès de particuliers. Dans la foulée, la société entre sur le marché libre le 9 avril suivant à 17,50 euros le titre. A sa suspension en mai dernier, le titre était tombé à 0,26 euro. Car très vite, les choses déraillent. Les frères Für se montrent sous un jour inquiétant, multipliant les éclats auprès de tous, que ce soit des investisseurs, des clients ou des fournisseurs.En 2000, par exemple, Alexandre accuse Paris Bourse d'avoir manipulé son cours de Bourse. La raison: alors que commence la lente descente aux enfers des valeurs Internet, le titre Pere-Noel dégringole de moitié dès la première journée de cotation. A son tour, Paris Bourse attaquera Pere-Noel en diffamation. Face à ses concurrents, les méthodes de la société ne sont pas plus glorieuses. Le meilleur exemple en est l'affaire avec AbCool.com, défunt site de vente de jouets. Pere-Noel décide tout simplement de déposer le nom de domaine abcool.fr, dont il reroute toutes les connexions vers son propre site. AbCool obtiendra une condamnation en référé. Du côté des clients, Pere-Noel forge sa réputation: les livraisons ne sont pas toujours ou sont mal assurées, le service client, dont le coût est exorbitant, sonne occupé en permanence. Sur le forum de Boursorama, les malheureux racontent leur mésaventure avec le site, qui n'en remporte pas moins un succès certain, Pere-Noel proposant des prix défiant toute concurrence.En parallèle de ces plaintes, Pere-Noel multiplie les communiqués d'auto-glorification, faisant état d'une croissance sans précédent pour des pertes symboliques en comparaison de ses confrères de la Nouvelle Economie. Il crée également des myriades de sites Internet, tels que Novatek, en rachète d'autres comme Booston. Beaucoup d'opérations de croissance externe échouent: c'est le cas de Digitall.fr qu'il voulait reprendre à Lagardère.Peu importe, pendant trois ans Pere-Noel continue de cumuler les mauvais points. Jusqu'au putsch. En octobre dernier, coup de théâtre, les frères Für sont mis à la porte. "Cela ne pouvait plus durer", confie une collaboratrice à latribune.fr. Alexandre, aux commandes de la société, est remplacé par le jeune Thomas Chauvet, un vétéran de Pere-Noel. La question se pose alors: ce départ n'a-t-il pas été prémédité par les deux frères désireux de redorer le blason de la société? A l'époque, Pere-Noel a maille à partir avec le tribunal de Créteil qui instruit des dizaines de plaintes. L'UFC-Que Choisir s'est porté partie civile quelques mois plus tôt. Mais le départ des frères Fur sonne faux. S'ils quittent leurs fonctions opérationnelles, les deux frères détiennent toujours 35% des parts, et Alexandre continue de siéger au conseil d'administration.Toujours est-il qu'en seulement quelques mois de présidence, Thomas Chauvet n'aura pas réussi sa mission. Même si dernièrement des progrès ont pu être notés, tant vis-à-vis des fournisseurs que des internautes. Si le site, dont le nom archi-connu sur Internet faisait des envieux, a tenté de s'essayer aux bonnes manières, c'était trop tard. En attendant, Alexandre et Grégoire Fur devront répondre le 18 septembre prochain devant le tribunal correctionnel de Saint-Etienne du délit de "publicité mensongère".
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