Les communautés virtuelles permettent la confrontation moderne des bonnes pratiques

Le délégué général de l'Association nationale des DRH plaide pour que les managers tirent tout le bénéfice possible des nouvelles communautés qui se tissent dans le secret du monde virtuel.

Il existe depuis la nuit des temps différentes communautés. Religieuses, géographiques, politiques, de pensée, mais aussi d'intérêts, en tête desquelles la société. Entendons par là l'entreprise, qu'elle soit kolkhozienne, prétendument au service de tous, ou bien capitaliste au profit avéré de quelques uns. Illustration de la nuance entre mutuel et commun.

Une communauté économique donc, qui est passé progressivement depuis vingt d'une cohésion autour de valeurs collectives à une émancipation de l'individu sur la base d'une gestion de carrière au beau milieu d'un contexte de compétition. Adieu l'administration collective du personnel, mot singulier désignant une masse plurielle, place à la gestion dynamique des ressources humaines, mot pluriel désignant un groupe d'individus singuliers.

Des communautés à la solidité relative, force est de le reconnaître, surtout lorsque le monde qui nous entoure fait cohabiter subtilement l'esprit d'équipe, cette vieille rengaine managériale, avec une logique plus personnelle qui consiste à protéger ses arrières, et donc son avenir.

On apprend à partager ses erreurs, pour que la sentence soit moins lourde, tout comme on s'attribue des succès pour faciliter notre propre évolution, au détriment forcé de celle des autres. Parce qu'au sein de toute communauté il existe par nature des individus qui se propulsent à la tête d'un groupe, en créant une échelle de valeurs qu'ils s'approprient avantageusement. Dans le monde de l'entreprise, ceux qui veulent devenir ou rester maîtres de leur carrière, c'est-à-dire ceux qui ont eu la promotion dont vous rêviez.

Par réaction, cette même communauté relative nous incite ainsi à mettre en avant nos différences, à les valoriser. Une invitation, d'une manière générale, à exprimer un point de vue, une pensée, ou encore un comportement qui nous soit propre.

Comble s'il en est, le mass market lui-même nous invite à consommer (massivement) ses produits pour avoir l'air différent. "Think Different, think..." selon la formule consacrée. Si je bois ce soda ou que j'utilise ce système d'exploitation, je ne ressemble pas à mon voisin et je dois en être fier.

Mais si maintenant non seulement je ressens mais j'exprime cette différence qui fait de moi un individu censé se distinguer de la masse, il se peut que je partage cette caractéristique avec quelqu'un d'autre, voire des milliers de personnes.

J'appartiens donc de fait à une communauté. Une communauté qui n'a plus rien à voir avec les précédentes citées, car cette communauté est tantôt éphémère, tantôt transversale, parfois désintéressée ou encore même virtuelle.

Bref, le grand retour du point commun.

L'apparition des NTIC (devenues les TIC, car elles semblent avoir perdu de leur nouveauté) a bien entendu cristallisé l'avènement de ces nouvelles communautés, car elle a facilité l'expression personnelle et la nécessité de disposer d'un droit à la gérer.

Jadis manifestations criardes et colorées, et premières Flashmobs, de nos jours "youtube", Wifi, Blogosphère, Internet mobile, sms, chats, forums et autres zones d'échanges et de ressemblance, ces réseaux virtuels de plus en plus réels démontrent si besoin était que bien au-delà de la théorie des six maillons de Stanley Milgram, ces nouvelles communautés peuvent rassembler des individus très différents. Différents, mais ayant au moins un point commun. Celui de lire cette chronique par exemple.

Associations, réseaux d'influence, clubs, lobbys ou tout simplement syndication d'intérêts regroupent de nos jours de nouvelles masses, en quête de nouvelles réussites collectives.

Serait-ce ce même vent qui a remis au goût du jour la démocratisation, au sens large, ou la cruelle exigence d'un dialogue social qui voudrait que toutes les décisions soient collectives ?

Pourquoi pas. Lorsque notre pays affiche un taux de syndicalisation professionnelle parmi les plus bas d'Europe, il est sur la plus haute marche du podium lorsqu'il fait descendre dans la rue des opposants à un nouveau contrat de travail, conduisant au désaveu d'un Premier Ministre. Lorsqu'on s'apprête à légaliser les "class actions", c'est que l'on reconnaît également la légitimité d'une communauté, toute minoritaire qu'elle soit, à prendre la parole et parler plus fort que la rumeur des marchés financiers. Lorsqu'une fédération professionnelle de la restauration et de l'hôtellerie fait d'un dispositif fiscal un préalable à la création ou au maintien de l'emploi. Les faits impactant sont rares, mais les opportunités pour prendre la parole, elles, ne manquent pas.

Il n'y a plus de place pour le doute. Les nouvelles communautés ne sont plus un mythe, c'est une réalité. Elles rapprochent des gens que tout peut opposer, même si leurs similitudes sont minimes et très subjectives. Elles permettent une forme de confrontation moderne, où l'échange de bonnes pratiques côtoie la simple réaction gratuite, où la culture générale naît de la découverte partagée, où l'intérêt individuel peut aller dans le sens d'une certaine solidarité, et où, surtout, la compétence se développe par capillarité.

En 1492, un inconnu nommé Christophe Colomb partait en expédition pour trouver une nouvelle route destinée à rapprocher des hommes. Il découvrit que notre Terre était ronde, au sens propre, et révéla l'existence d'autres cultures et modes de vie, catalyseurs de futures différences et conflits.

Thomas Friedman, dans son dernier ouvrage intitulé "The World is Flat", nous explicite sa théorie selon laquelle notre terre serait devenue plate, au sens figuré.

Un monde dans lequel la collaboration n'a plus de frontière, de couleur, de langue ou encore de nationalité, c'est-à-dire d'obstacle, mais où la recherche d'une harmonie conduit chacun de nous à prendre toute la mesure de l'interdépendance, et à s'en servir de levier pour garder la tête au dessus de notre ligne de flottaison. Un monde où Microsoft pactise avec Linux.

Un monde donc, où que l'on s'assimile à ce rêve mythique ou non, nous sommes tous confrontés, acteurs ou spectateurs, à l'exercice de sa réalité.

Encore une nouvelle communauté !

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