Lithium : l'Inde va explorer et exploiter ses premières mines à l'étranger en Argentine

L'Inde a conclu avec l'Argentine son premier contrat de prospection-exploitation de lithium à l'étranger. Il porte sur cinq blocs de saumure au lithium couvrant une superficie de près de 15 800 hectares. Le pays souhaite à travers ce projet réduire sa dépendance envers la Chine pour s’approvisionner en ce composant, essentiel notamment pour les batteries des voitures électriques.
C’est la première fois qu’une société gouvernementale d’Inde se lance dans un projet d’exploration et d’exploitation minière de lithium à l’étranger.
C’est la première fois qu’une société gouvernementale d’Inde se lance dans un projet d’exploration et d’exploitation minière de lithium à l’étranger. (Crédits : WASHINGTON ALVES)

Pour développer sa production de véhicules électriques et arriver à la neutralité carbone en 2070, l'Inde a besoin de lithium. Une matière rare qu'elle importe principalement de Chine actuellement - plus des deux-tiers de ses 33 millions de dollars d'importation en 2022-2023, selon les chiffres gouvernementaux - avec l'objectif de réduire cette dépendance.

Et c'est vers l'Argentine que le pays se tourne. L'Inde a annoncé dans la nuit de lundi à mardi avoir signé un accord de 24 millions de dollars pour un projet d'exploration et d'exploitation minière de lithium sur les terres argentines. Ce dernier lie les compagnies publiques Khanij Bidesh India (Kabil) côté indien et Camyen SE côté argentin et porte sur la province de Catamarca, la plus riche en lithium du pays.

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Une première pour l'Inde

C'est la première fois qu'une société gouvernementale d'Inde se lance dans un projet d'exploration et d'exploitation minière de lithium à l'étranger. Kabil commencera « l'exploration et le développement de cinq blocs de saumure au lithium couvrant une superficie d'environ 15.703 hectares », est-il précisé dans le communiqué - soit plus de 22.000 terrains de football. L'accord lui octroie un « droit d'exploration et d'exclusivité » et « suite à l'existence/découverte du minéral de lithium, le droit d'exploitation pour la production commerciale ». Il est aussi indiqué que l'entreprise publique se prépare à ouvrir une succursale à Catamarca. Le coût du projet est d'environ 200 millions de dollars.

« C'est un jour historique pour l'Inde et l'Argentine (...) une étape qui jouera non seulement un rôle crucial dans la conduite de la transition énergétique pour un avenir durable, mais également garantir une chaîne d'approvisionnement résiliente et diversifiée pour les minéraux critiques et stratégiques essentiels pour diverses industries en Inde », a réagi dans un communiqué le ministre du Charbon et des Mines, Pralhad Joshi.

L'Amérique du Sud, eldorado du lithium

Ce n'est pas pour rien que l'Inde s'est rapprochée de l'Argentine. Ce pays fait partie du « Triangle du lithium » avec le Chili et la Bolivie : ils recensent à eux trois plus de la moitié des ressources mondiales totales de lithium, selon les experts, soit le plus grand gisement au monde de cet or blanc très convoité. L'Argentine a en plus la particularité d'avoir « les deuxièmes plus grandes ressources de lithium, les troisièmes plus grandes réserves et la quatrième plus grande production au monde », met en avant l'Inde dans son communiqué.

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Avant Kabil, d'autres sociétés - publiques ou non - se sont lancées en Amérique du Sud à l'assaut du lithium. Mi-décembre, le groupe public russe Uranium One a passé un accord avec la Bolivie pour l'installation d'une usine pilote d'extraction de lithium dans les salines du sud du pays. L'entreprise russe, qui appartient au géant russe de l'énergie atomique Rosatom, assumera la totalité de l'investissement d'ici 2025, soit 450 millions de dollars. Elle a été sélectionnée parmi sept candidats à un appel d'offres lancé par l'entreprise publique bolivienne Yacimientos de Litio Boliviano il y a plus d'un an.

Un mois plus tôt, mi-novembre, Eramet a annoncé l'acquisition d'un vaste ensemble de concessions minières de lithium (120.000 hectares) dans la région d'Atacama au nord du Chili « pour un paiement initial de 95 millions de dollars ». Le groupe français a par ailleurs démarré en 2023 l'exploration de concessions détenues dans le salar d'Arizaro, en Argentine. Et doit commencer en ce début 2024 la production de lithium dans le gisement voisin Centenario avec son partenaire chinois Tsingshan. Il a même déjà décidé du lancement d'une deuxième phase pour l'exploitation de ce même gisement.

Une demande vouée à bondir

Le lithium est un composant essentiel aux batteries, notamment pour les véhicules électriques. La seule électrification des transports à l'horizon 2040 engendrera une multiplication de la demande en lithium de plus de 40 au niveau mondial, selon l'Agence internationale de l'Énergie (AIE). Mais pas seulement : elle aura aussi des conséquences sur la demande du cobalt et du nickel - elles seront environ multipliées par 20 - et dans une moindre mesure du cuivre (x3) dans des scénarios de décarbonation compatibles avec l'accord de Paris sur le climat.

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Et si le lithium est très présent en Amérique du Sud, ce n'est pas le cas de tous les métaux. « 50 à 70% des ressources en métaux se trouvent en Afrique », affirmait la commissaire de l'Union Africaine (55 pays) lors d'un entretien avec l'AFP fin septembre, à l'occasion du premier sommet mondial consacré aux « métaux critiques » organisé par l'AIE. Si bien que les pays du continent africain voient dans l'augmentation de la demande une opportunité de développement unique.

Reste que, actuellement, « le raffinage des métaux est très concentré en Chine », avait rappelé à cette même occasion Fatih Birol, le directeur de l'AIE, à l'AFP. À elle seule, elle assure « près de 70% de la production de terres rares », selon Emmanuel Hache, chercheur spécialiste des matières premières, et Benjamin Louvet, gérant d'actifs, auteurs du récent ouvrage « Métaux, le nouvel or noir ». Côté raffinage, « dans le seul segment des batteries, la Chine raffine environ 67% du cobalt, 62% du lithium, 60% du manganèse, et 32% du nickel » mondial, soulignaient-ils.

(Avec AFP)

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Commentaires 2
à écrit le 17/01/2024 à 9:12
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A l'autre bout du monde don... et ils nous disent qu'ils ont compris et Davos qui nous parle de "régionalisation". Que des bavards impénitents.

à écrit le 16/01/2024 à 12:28
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Voilà ce que ca donne les pays gérés par les socialistes ! Quand c'est la faillite on vend les meubles! Et devinez qui vient alors pousser des cris de souveraineté et de nation ?

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