Des savons d’hôtel pour lutter contre la précarité

En Alsace, des savonnettes usagées collectées chez les hôteliers sont recyclées dans un atelier de travailleurs handicapés puis redistribuées à des associations caritatives.
(Crédits : © Sapocycle/instagram)

La douce odeur d'un savon de luxe flotte dans l'atelier des Papillons Blancs à Colmar, identifié par un logo aux petites bulles bleues. Cinq personnes, handicapées, procèdent minutieusement au nettoyage des savonnettes envoyées le matin même par un hôtel de luxe parisien. À l'intérieur, 20 kilos de savons à peine utilisés sont prêts à être réduits en poudre, transformés à l'état pâteux dans un pétrin de boulanger, passés dans une extrudeuse qui leur conférera leur forme rectangulaire définitive. Identifiés à l'aide d'une petite presse manuelle, les savons seront redistribués plus tard, dans la région, à des organisations caritatives.

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Grâce à l'association SapoCycle, des centaines de jeunes sans domicile fixe ou réfugiés se lavent en Alsace avec des savons haut de gamme. L'idée est née lors d'un séjour en Afrique où Dorothée Schiesser, fondatrice de SapoCycle, accompagnait son mari globe-trotter et dirigeant d'hôtels de luxe. Marquée par la précarité hygiénique d'une partie de la population, alors que les savons à peine utilisés finissaient dans les poubelles des hôtels, elle a trouvé la solution assez simple qui permet de les recycler.

« J'ai voulu ajouter une dimension sociale à mon projet en m'adressant pour le travail manuel à un atelier de personnes handicapées », explique Dorothée Schiesser. L'atelier fonctionne depuis 2018 et ne cesse de progresser : 18 000 tonnes ont été collectées en cinq ans, 36 700 savons ont été recyclés l'année dernière.

« Pas de risque de pénurie »

Cent quarante hôteliers partenaires acceptent de régler une cotisation de 320 euros. En adhérant à la démarche, ils améliorent leur bilan environnemental. Une contribution financière du Fonds social européen couvre les salaires de deux employées. Christelle Juville est payée pour développer un réseau d'hôteliers partenaires, dans toute la France. « Nous ciblons des établissements en quatre ou cinq étoiles, ceux qui n'utilisent pas encore des distributeurs de savon liquide, indiquet-elle. Il n'y aura pas de risque de pénurie au cours des cinq prochaines années. Plus tard, on verra bien. »

En attendant, le jeune Louis, employé dans l'atelier de Colmar, entend bien poursuivre son apprentissage. D'un geste précis, il découpe les savons à la sortie de l'extrudeuse. Devant l'établi, c'est sa collègue Marie qui les conditionne pour l'emballage. Marie-Cécile Jacquin, monitrice, leur apprend à saisir sur l'ordinateur les données des livraisons et des expéditions. Un autre objectif consiste à développer la motricité fine. « Je veux apprendre à utiliser un gerbeur, obtenir la capacité professionnelle », a décidé Louis. « Bubbles saving lives » (« des bulles qui sauvent des vies ») : la promesse affichée sous le logo de SapoCycle, à l'entrée de l'atelier, n'était pas mensongère.

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