![Adeline Barnault dans la forêt de Villebonsur-Yvette (Essonne).](https://static.latribune.fr/full_width/2266563/adeline-barnault.jpg)
Si les habitants du plateau de Saclay connaissent la silhouette d'Adeline Barnault, jeune femme brune de 38 ans, c'est que depuis 2018 ils croisent sa bicyclette sur le marché de Villebon-sur-Yvette, dans les Amap et dans les villages environnants. L'objectif de sa librairie nomade baptisée Cultureuil ? Faire tomber les murs, aussi bien physiques que symboliques, qui entourent le livre. « Le fait que je me déplace et que j'aille au-devant des personnes permet de les libérer de la timidité ou de l'appréhension qu'ils ont parfois à pénétrer dans les lieux culturels comme les musées, les bibliothèques ou les librairies. »
Un constat que l'ancienne étudiante en histoire et en médiation culturelle a eu tout le temps de mûrir en travaillant huit ans dans une librairie de Gif-sur-Yvette : « Je voulais toucher d'autres gens que les habitués des lieux culturels. » Il y a deux ans, cette grande voyageuse, vététiste depuis l'enfance, qui a pour auteurs préférés Jim Harrison, Joseph Boyden ou encore Henry David Thoreau, s'est inspirée de la distribution de paniers de légumes à prix réduit pour proposer des livres à des familles de Massy.
Grâce au soutien financier du bailleur social Les Résidences Yvelines Essonne, « près d'une trentaine de familles ont reçu gratuitement un tote bag fabriqué par [Adeline] à l'aide de vieux draps de grand-mère, avec dedans cinq ou six livres [qu'elle] avai[t] choisis en fonction des goûts de chacun ». Mme Alves, l'une des résidentes, a très vite saisi l'occasion : « Je lis trois ou quatre livres par mois, mais je suis maintenant à la retraite et ça a un coût... Mes deux petits-enfants de 6 ans ont, eux aussi, reçu des livres d'histoires et ils étaient ravis ! » Adeline, adepte de la décroissance, préfère distribuer plutôt que vendre pour « favoriser l'économie circulaire et le zéro déchet ». Les livres qu'elle donne - des albums jeunesse, des polars, des romans, de la science-fiction, des essais et des bandes dessinées - sont tous de seconde main. « Ce qui encourage ceux qui les reçoivent à les faire circuler. » Mme Alves a ainsi échangé ou déposé dans des boîtes à livres les ouvrages qu'elle a reçus « pour qu'ils profitent à d'autres ». Soucieuse de s'adapter à son public, Adeline peaufine son dispositif d'année en année.
En 2023, elle a ainsi ouvert ses distributions à tous, posant ses tréteaux et ses piles de livres au pied des immeubles devant le centre social de Massy : « Il fallait voir le sourire des enfants ! S'ils avaient pu prendre dix livres, ils l'auraient fait. Cela m'a confirmé que si les gens n'ont pas de livres chez eux, ce n'est pas forcément qu'ils n'en veulent pas ! » La plus belle des rétributions pour celle qui se paie actuellement moins que le smic et qui cherche des financements afin de rendre son activité pérenne (« pourquoi pas une fondation ? ») : que des gens la contactent entre deux distributions parce qu'ils sont en panne de lecture !
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