Exposition : l’art « populaire » du peintre congolais Chéri Samba

Le musée Maillol organise la première grande rétrospective du célèbre artiste africain.
Chéri Samba
Chéri Samba (Crédits : © Nicolas Lobet Pryzm)

Chéri Samba fait partie des premiers artistes congolais à avoir réussi à exposer aux côtés des Occidentaux. C'était en 1989 à Paris dans « Magiciens de la terre ». L'exposition fit date. Elle affirmait pour la première fois l'existence d'œuvres d'art en Afrique, et non plus uniquement d'objets cultuels. Pour en arriver là et devenir célèbre, l'artiste a dû faire preuve de stratégie. Autodidacte ambitieux, il quitte à 15 ans son village pour Kinshasa, la capitale. Il y peint des enseignes publicitaires et des portraits. Rapidement remarqué, il ouvre son atelier sur rue et expose ses peintures sur sa devanture. Des œuvres aux couleurs vives, aux traits réalistes, qui haranguent la foule.

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Chéri Samba réagit à l'actualité locale, avec humour. Il y ajoute du texte, « pour obliger les passants à stationner », explique-t-il en toute sincérité. Les gens s'attroupent devant son atelier. Il a réussi à installer la « griffe sambaïenne », comme il la nomme en toute modestie. Après une reconnaissance locale, il accède à l'international, par la France. Le commissaire d'exposition André Magnin le découvre alors et l'expose quelques années plus tard. Le collectionneur Jean Pigozzi, fasciné par ce qu'il découvre à son tour, décide de s'intéresser à l'art africain. Les plus de 50 peintures de Chéri Samba exposées au musée Maillol proviennent de son impressionnante collection riche de 10 000 œuvres. Et pour laquelle il n'a jamais mis les pieds en Afrique, s'amuse-t-il à préciser.

L'exposition thématique s'ouvre sur des autoportraits de l'artiste. Se représenter lui permet d'éviter toute ressemblance fâcheuse et donc tout procès. Chéri Samba est pragmatique. C'est aussi une manière de satisfaire son ego tout en faisant son autopromotion. Lorsqu'en 1997 un historien ose écrire qu'il ne sait pas copier la réalité, il lui répond par une œuvre, Chéri Samba corrige l'historien Bogumil Jewsiewicki. S'il est ambitieux et fier, il est aussi pédagogue. « Mon art est populaire, il est destiné au peuple. »

Vers des sujets plus politiques

Les sections suivantes du parcours révèlent un artiste en prise avec la vie quotidienne des Congolais. Il aborde des questions de santé tel le sida, représente les relations au travail, explique la politesse, la réussite. Chéri Samba conseille, éduque. Lorsque sa carrière s'internationalise, son travail évolue vers des sujets plus politiques. Il célèbre l'élection d'Obama, critique le conflit irakien, retrace l'histoire sanglante du Congo/Zaïre, rend hommage aux enfants soldats. Pour que ses propos touchent le plus grand nombre, il choisit de faire rire. « Avec l'humour, on peut choquer, mais le message passe rapidement, précise-t-il. Tout le monde comprend et sourit. » Ses œuvres sont radieuses, pailletées et caricaturales. Un pur moment de joie artistique !

« Chéri Samba, dans la collection Jean Pigozzi », musée Maillol, jusqu'au 7 avril 2024. museemaillol.com

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