C'est une enquête inédite qui ne manquera pas de faire débat dans un contexte préélectoral. L'Insee a fait un focus sur la propriété en France, à partir de données jamais exploitées.
Il apparaît tout d'abord que la France reste un pays où posséder son logement est une fin en soi. Ainsi, 58% des ménages détiennent au moins un logement, que ce soit leur résidence principale ou un autre bien. Et la majorité des foyers propriétaires ne possèdent qu'un logement.
11% des ménages possèdent près de la moitié du parc immobilier
Reste qu'un quart des ménages vivant en France ont plusieurs logements.
La moitié d'entre eux, soit 13% des ménages, détiennent deux logements et ils possèdent près d'un quart du parc de logements des particuliers. Les ménages restants, avec trois logements ou plus (11% des ménages), possèdent quant à eux près de la moitié du parc (46%).
Au total, les ménages multipropriétaires détiennent les deux tiers du parc de logements des particuliers.
Sans surprise, plus le niveau de vie augmente, et plus les ménages détiennent un nombre élevé de logements. C'est logique, la capacité d'épargner est plus importante, il est alors possible de mobiliser des revenus pour se constituer un patrimoine immobilier, que ce soit une résidence principale, mais aussi une ou des résidences secondaires. Parmi ce patrimoine, se trouvent aussi des investissements locatifs. Ainsi, 58% des multipropriétaires sont aisés ou plutôt aisés, contre 34% de l'ensemble des ménages.
Enfin, interviennent les transmissions intergénérationnelles. Elles aident à se constituer un patrimoine immobilier. Et l'Insee est formel: les héritiers et donataires sont plus aisés que la moyenne des Français. De quoi relancer le débat sur les inégalités, et la façon de les atténuer, notamment en augmentant les droits de succession.
Neuf ménages multipropriétaires sur dix ont plus de 40 ans
Les ménages multipropriétaires sont plus âgés et plus souvent en couple que l'ensemble de la population. Quel que soit le sexe, les personnes seules sont sous-représentées au sein des ménages multipropriétaires.
Les ménages multipropriétaires se concentrent davantage parmi les actifs et les retraités, entre 50 ans et 69 ans (51%). Logique, alors que l'on se constitue un patrimoine tout au long de sa vie.
En revanche, après 70 ans, la proportion baisse : passé un seuil, plus on avance en âge et plus on a tendance à se séparer d'une partie de son patrimoine immobilier, par exemple en faisant des donations aux enfants, en vendant la résidence secondaire où on va moins... Après 70 ans, on se limite à la résidence principale pour les vieux jours.
Les multipropriétaires sont citadins
Autre indication intéressante: la résidence principale de ceux qui ont plusieurs logements se situe plus fréquemment "dans les couronnes des aires d'attraction des villes", assure l'Insee. Autrement dit, ils habitent plus fréquemment dans des métropoles, et notamment dans les coeurs de villes où les prix de l'immobilier sont les plus élevés.
À ce titre, la place de la capitale et des grandes villes est écrasante: 41% des ménages propriétaires de 5 logements ou plus sont résidents de la région parisienne ou d'une ville de 700.000 habitants ou plus, soit 3 points de plus que l'ensemble des ménages multipropriétaires. De quoi nourrir les réflexions sur les fractures entre les villes et les territoires ruraux.
3,5% des ménages détiennent 50% des locations aux particuliers
Quant à savoir à qui appartiennent les logements en location, l'Insee donne une réponse sans équivoque. Il apparaît que là aussi, les biens sont concentrés entre très peu de mains : les ménages qui ont au moins 5 logements représentent à peine 3,5 % du total des ménages, mais à eux seuls, détiennent 50% des biens en location des particuliers.
À eux seuls, ils possèdent 37% des logements du centre des grandes villes. Et là encore, Paris occupe une position particulière : les ménages propriétaires de 5 logements ou plus possèdent 58% des logements mis en location situés dans Paris, contre 22% des bien directement occupés par leur propriétaire.
Logique d'accumulation patrimoniale et optimisation fiscale
Cette concentration répond à une logique d'accumulation patrimoniale. Après avoir acheté des biens pour sa résidence principale et secondaire, on achète pour louer à des tiers.
Et pour ce faire, ces foyers ont plus souvent recours à des outils juridiques et fiscaux, qui leur permettent d'optimiser leur patrimoine. Le plus répandu est la société civile immobilière, la SCI. Ainsi, 10% des ménages multipropriétaires possèdent au moins un logement via ce type de dispositif. Et c'est très marqué: le recours aux SCI croît avec le niveau de vie. Ainsi, 41% des ménages multipropriétaires ayant une SCI sont aisés, contre 25% pour l'ensemble des multipropriétaires.
À peine un tiers des 20% des ménages les plus modestes sont propriétaires
À l'autre bout du spectre, en revanche, on ne sera pas surpris de découvrir que, parmi les 20% de personnes les plus modestes, 67% des ménages ne possèdent aucun logement.