Ehpad : quels logements pour le papy-boom ? (2/3)

SÉRIE MAISON DE RETRAITE - ÉPISODE #2. Si l'on parle beaucoup des Ehpad, ces établissements conviennent surtout aux aînés qui perdent la tête et aux plus dépendants. Pour les autres, différentes solutions permettent de vieillir dans de bonnes conditions. En aménageant son logement, en résidence service ou en habitat inclusif ou partagé. Quel logement peut-il le mieux convenir et à quel prix ?

Quand on parle de maison de retraite, on pense toujours à l'Ehpad. Pourtant, ces établissements ne concernent que les plus dépendants qui ont besoin de surveillance et de soins quotidiens. Il existe plein d'autres solutions pour vivre en sécurité la période du grand âge. En résidences ou en colocations, comment vieillir dans un cadre adapté et sans se sentir isolé ?

Ehpad : un hébergement de fin de vie

Unités médicalisées bien plus que véritables domiciles, les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) ont pris le relais des unités de soin de longue durée des hôpitaux (USLD). Aujourd'hui, on y entre à un âge moyen de 87 ans et la majorité des résidents sont très dépendants. Mais si elle fait peur, cette dépendance ne concerne qu'une partie des seniors et surtout les plus âgés : 13% des 80 à 84 ans, 27% des 85 à 89 ans et la moitié des plus de 90 ans, selon l'Insee.

Conçus dans les années 2000, les Ehpad ne font plus recette. Ils doivent donc changer.

Lire aussiEhpad : que faut-il changer pour une meilleure prise en charge des personnes âgées ? (1/3)

« Ce qui devait être des lieux de vie sont devenus des lieux de soins, mal adaptés pour des personnes qui y passent en moyenne deux ans et demi, souligne Luc Broussy, président de l'association France Silver Eco. Les baby-boomers qui ont écouté les Stones et mangent chinois au dîner n'accepteront pas de vieillir dans les Ehpad d'aujourd'hui. »

De nos jours, on compte 600 000 places occupées, tandis que 108.000 places de plus seront nécessaires en 2030. Ces établissements resteront en effet indispensables, notamment pour les malades d'Alzheimer et les derniers mois de vie.

Mais comment doivent-ils évoluer pour retrouver un modèle économique qui ne se boucle pas au détriment des résidents ?

« Il faut rendre de l'attractivité au métier, suggère Didier Sapy, directeur général de la Fédération nationale des organismes gestionnaires d'Ehpad et de services à domicile. Le minutage des tâches au minimum empêche d'aider les résidents en échangeant avec eux, ce qui est pourtant le vrai sens du métier. Le tarif horaire devrait aussi être fixé au niveau nécessaire, c'est-à-dire à 30 euros de l'heure et non plus 23 euros comme aujourd'hui

Autre piste d'évolution, transformer ces établissements en plateformes pour offrir des services aux seniors des environs, avec des activités à la journée, des consultations médicales spécialisées, du portage de repas, etc. Autant de façons de rentabiliser les investissements tout en ouvrant les établissements sur l'extérieur pour en améliorer l'ambiance.

Avant d'entrer en Ehpad vers 87 ans, on souhaite rester à domicile à moins de se sentir trop isolé. Où emménager dans un logement adapté aux fragilités de l'âge et répondant à nos envies ?

 Les résidences autonomie

 Lorsque les Ehpad n'existaient pas, les villes avaient développé des collectifs seniors, avec des services adaptés à leurs besoins. Ces collectifs sont devenus des résidences autonomie qui offrent logement, restauration et activités collectives. Avec des loyers aux tarifs modérés, elles sont gérées par des communes ou des associations. On compterait aujourd'hui 98.000 seniors en résidence autonomie, mais une partie n'a pas été réhabilitée et leur aspect dégradé n'incite pas à s'y installer. L'association Arpavie, soutenue par la Caisse des dépôts et consignations (CDC), gère quatre-vingts résidences autonomie.

« La formule aura besoin de 100.000 places supplémentaires d'ici 2030, estime Laure de la Bretèche, directrice déléguée des politiques sociales de la CDC et présidente d'Arpavie. Avec des résidences rénovées, qui disposent de moyens en termes de surveillance de l'état de santé, d'assistance et de services de soins. Pour y parvenir, ce parent pauvre des politiques publiques aura besoin d'un vrai plan d'investissement national. »

Les résidences service seniors

Version privée de la formule, les résidences services seniors proposent aussi des appartements aménagés pour l'avancée en âge. Après l'échec de la première génération des années 1980, dont les appartements vendus à leurs résidents posaient des problèmes lors des transmissions, la nouvelle génération fonctionne bien.

En commercialisant l'immobilier auprès d'investisseurs, le départ ou le décès des occupants locataires n'entraîne plus de problèmes de gestion. Le groupe DOMITYS, membre du Groupe AG2R LA MONDIALE, Aleader, est n°1 sur le marché avec 225% de parts de marché et plus de 20.000 logements du studio au T3. Avec 120 appartements, chaque résidence propose des espaces communs (restaurant, piscine, salon multimédia, salle de sport...), ainsi qu'une offre de services à la carte : restauration, ménage, blanchisserie, esthétique et coiffure, ateliers, animations, petits voyages, etc. Suivant la localisation et les services contractés, le locataire règle d'un simple loyer de 1.100 à 4.000 euros par mois.

« Nos résidents ont entre 75 et plus de 100 ans, explique Olivier Wigniolle, Président exécutif de DOMITYS. Ils sont autonomes, mais les appartements sont adaptés à l'avancée en âge. Plus de 70% des occupants sont des femmes. Elles arrivent souvent après la perte de leur conjoint, pour retrouver un lien social, grâce aux animations et aux activités. Chaque résidence compte une équipe de 25 collaborateurs, dont un animateur coordinateur, pour répondre aux attentes et besoins des résidents. »

Aujourd'hui, on compte environ 70.000 seniors logés dans ce type de résidence. Domitys a pour objectif d'en construire 100 de plus d'ici 2026, soit près de 28 500 logements où vivront plus de 30.000 seniors.

En commercialisant l'immobilier auprès d'investisseurs, le départ ou le décès des occupants locataires n'entraîne plus de problème de gestion. Le groupe Domitys est leader avec 25 % de parts de marché et plus de 17.000 logements du studio au T3. Avec 120 appartements, chaque résidence propose des espaces communs (bar, salle télé, grand écran et salle de sport...), ainsi qu'une offre de services à la carte : restauration, ménage, blanchisserie, esthétique et coiffure, ateliers, animations, petits voyages, etc. Suivant la localisation et les services contractés, le locataire règle en moyenne 2.000 à 4.000 euros par mois.

« Nos résidents ont entre 75 et 90 ans, explique Olivier Wigniolle, président exécutif Domitys. Ils sont à peu près autonomes lorsqu'ils emménagent et les appartements sont adaptés à l'apparition de fragilités. Plus de 70% des occupants sont des femmes. Elles arrivent souvent après la perte de leur conjoint, pour retrouver un lien social, grâce aux animations et aux activités. Chaque résidence compte un animateur en chef et 25 collaborateurs pour 110 à 120 appartements. »

Aujourd'hui, on compte environ 70.000 seniors logés dans ce type de résidence. Domitys a pour objectif d'en construire 100 de plus d'ici 2026.

Autres solutions très en vue en ce moment, les logements alternatifs dits inclusifs ou partagés.

Habitat inclusif

En habitat inclusif, chacun dispose de son appartement adapté et des espaces de vie commune permettent des activités collectives. Ces habitats font l'objet de projets discutés entre les habitants pour choisir les services à contracter et partager entre chaque logement.

Habitat partagé

L'habitat partagé et accompagné est une forme de colocation senior. Il propose 7 ou 8 studios avec sanitaires privés et un accès extérieur autonome. Dans chaque maison, un vaste espace salon et cuisine regroupe les occupants qui s'engagent à y partager les repas ainsi que certaines activités de la vie quotidienne (cuisine, rangement...). Des équipes d'auxiliaires de vie sont présentes dans ces formules d'habitat. Âge & Vie est une solution de ce type créée en Franche-Comté dans différentes communes rurales. Une solution rachetée par le groupe Korian en 2018 pour le développer. Aujourd'hui, Âge & Vie compte 143 sites regroupant deux maisons de huit occupants. Ils sont situés dans des petites communes et conçus en partenariat avec les partenaires locaux. Ces colocations accueillent des seniors dépendants jusqu'à l'avant-dernier échelon de perte d'autonomie.

« Aujourd'hui, 5.000 personnes vivent dans ces habitats partagés, mais les besoins sont estimés à 130.000 d'ici 2030, souligne Olivier Lebouché, président d'Âge & Vie. Avec un tarif de 1.800 euros par mois logé nourri blanchi, après déduction de l'aide à l'autonomie et du crédit d'impôt, ces collectifs de petite taille restent accessibles et moins onéreux que les Ehpad. Ils disposent d'une astreinte 24/24H avec un quota d'une auxiliaire de vie pour deux locataires, ce qui permet des échanges réguliers. »

 Le béguinage

Enfin, le béguinage fonctionne sur le même principe avec plusieurs petits pavillons de plain-pied regroupés autour d'une cour centrale. Le tout réuni dans un espace clos et sécurisé avec des services spécifiques. Certains sont gérés par les collectivités locales avec des loyers modérés autour de 600 euros par mois.

Avec différents partenaires, comme La fondation des Petits Frères des Pauvres, la Caisse des Dépôts a formé le réseau HAPI pour soutenir les porteurs de projets inclusifs et partagés. Selon Laure de la Bretèche, « ces projets traduisent une transformation de la vision sociétale de l'avancée en âge. Des personnes se regroupent pour faire face ensemble au vieillissement. Elles sont libres de choisir comment et avec qui elles vivront cette nouvelle partie de leur vie. Avec ces initiatives, les âgés seront peut-être plus visibles dans notre société qui  a tendance à cacher ses aînés. »

Bien sûr, la plupart des Français préféreraient vieillir là où ils ont des repères et des souvenirs. Mais les domiciles ne sont pas toujours adaptés et multiplient les risques de chute qui accélèrent la perte d'autonomie. Quelles solutions et technologies pour vieillir tranquillement chez soi ou dans un collectif ? Une question à laquelle répondra le troisième épisode de cette série maison de retraite.

Commentaires 3
à écrit le 27/07/2023 à 0:10
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Pour ceux qui ont des revenus satisfaisants, je conseille les établissements du groupe CLARIANE.

à écrit le 26/07/2023 à 15:04
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Prenons l'exemple de mes voisins (un couple M. âgé de 85 ans en traitement et Mme 83 ans atteinte de démence. Autonomie très réduite). Pas de place trouvée par leur fille dans établissement médicalisé, la fille domiciliée à 30 km). L'organisation pou...

à écrit le 26/07/2023 à 8:20
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Ben oui c'est toujours plus facile de prendre le fric de ceux qui ont perdu la tête. Il existe une maison de retraite auto gérée quelque part dans le sud ouest il me semble, les plus en forme aidant les moins en forme permettant de nourrir le lien so...

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