
Elles hébergent 38% de la population nationale. Les petites villes - de moins de 20.000 habitants - vont bénéficier d'un plan de relance de 3 milliards d'euros sur six ans, soit le temps du mandat municipal 2020-2026. Ce dernier sera porté par l'Agence nationale pour la cohésion des territoires (ANCT), avec des crédits du ministère de la Cohésion des territoires, de la Banque des territoires, de l'ANCT, du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema) et de l'Agence nationale pour l'habitat.
Quels critères pour la "centralité" ?
Le gouvernement entend "partir des territoires", "apporter une réponse sur-mesure", "mobiliser davantage de moyens", "combiner une approche locale et nationale" et "se donner du temps". Parmi les dix mesures-clés sur soixante mises en avant par l'exécutif: le financement de postes de managers de centre-ville, via une subvention de 40.000 euros pour deux ans, et d'un diagnostic "flash" post-Covid, à 100 %, comprenant un plan d'actions en faveur de la relance du commerce de centre-ville.
Si les élus locaux concernés se satisfont d'un dispositif qui décline le programme "Action Cœur de Ville", dédié aux villes moyennes, à un échelon plus fin, ils s'interrogent d'ores et déjà sur l'expression "mille premières centralités", employée par la ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales Jacqueline Gourault. "Pourquoi 1.000 et pas 500 ou 1.500 ?", relève le maire (radical-centriste) d'Igny (10.000 résidents, Essonne). "En réalité, c'est le préfet qui va décider des communes éligibles, mais sur quel base ? A celui qui va crier le plus fort ?" ajoute Francisque Vigouroux.
"Je ne sais pas comment vont être évalués les critères de centralité, mais je suis bien en peine de vous dire quelle est la ville-centre de mon agglomération, à part Paris qui se trouve à 25 kilomètres", renchérit Romain Colas, maire (PS) de Boussy-Saint-Antoine (8.000 habitants, Essonne).
"Il faut arrêter le délire !"
Autrement dit, les communes périphériques redoutent d'être écartées du plan "petites villes de demain". "On ne parle pas de schéma de développement territorial ou de liens entre les collectivités, mais on réfléchit en silo et on oublie les alentours", regrette un membre du bureau de l'association des petites villes de France (APVF). A cet égard, la création de 800 France Services, un "endroit où l'on puisse trouver une solution aux problèmes", tel que l'avait annoncé le président Macron lors de sa conférence de presse post-grand débat national, est qualifié de "déconcentration de façon napoléonienne". Ces lieux uniques sont pensés pour accueillir les services de l'Etat et ceux des collectivités.
L'accompagnement sur deux jours pour mener une co-construction sur des actions complexes, comme la reconversion d'un site en friche, agace tout autant les édiles. "Il faut arrêter le délire ! Cela nécessite 2, 4 voire 6 mois" s'exclame ainsi Francisque Vigouroux. Idem avec le fléchage de 1 milliard d'euros de dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) vers la rénovation énergétique des bâtiments. "Il faudra voir comment cela se décline dans le projet de loi de finances définitif, car outre cette mesure, ce plan ne parle pas d'investissement", pointe encore le maire d'Igny.
700 tiers-lieux supplémentaires
Ce plan de relance permet par ailleurs de financer jusqu'à 75% d'un poste de chef de projet pour accompagner la collectivité dans la définition et la conduite de son projet de territoire, d'accompagner la création de 1.000 îlots de fraîcheurs et "d'espaces publics plus écologiques" et de bénéficier de l'avantage fiscal Denormandie dans l'ancien jusque-là réservé aux villes moyennes. Ou encore de créer 200 "Fabriques du territoire", ces tiers-lieux qui mêlent espaces de travail et ateliers d'activités partagées, ainsi que 500 "Micro-folies", des tiers-lieux numériques et culturels.
Sans oublier des aides financières et l'accompagnement de la Fondation du Patrimoine pour "accélérer" la rénovation du patrimoine non classé. De même qu'il facilitera la prise en charge des déficits d'opération pour les projets de reconversion de friches urbaines pour réaménager des terrains déjà artificialisés. Il s'agit là des 300 millions d'euros indirectement débloqués au profit des promoteurs immobiliers pour construire du logement neuf. Une filière qui, elle aussi, attend beaucoup du projet de loi de finances 2021 pour repartir du bon pied.