Malgré un retour de la consommation, l'économie française reste fragile

Les mesures d'urgence économiques et sociales annoncées par Emmanuel Macron à la suite du mouvement des "Gilets jaunes" et le maintien d'une faible inflation devraient stimuler le pouvoir d'achat des Français et limiter le ralentissement de la croissance en 2019, a annoncé la Banque de France ce jeudi 14 mars. En revanche, l'institution a révisé à la baisse ses prévisions pour le PIB de 2019 à 1,3% contre 1,4% précédemment en raison notamment d'une baisse de la demande extérieure.
Grégoire Normand
La Banque de France anticipe des gains de pouvoir d'achat autour de 2% par habitant en moyenne.
La Banque de France anticipe des gains de pouvoir d'achat autour de 2% par habitant en moyenne. (Crédits : Reuters)

Les mauvaises nouvelles s'accumulent pour l'économie française. Après l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) la semaine dernière, la Banque de France a de son côté révisé ses prévisions de croissance pour 2019 à 1,3% contre 1,4% au mois de décembre. Pour 2020 et 2021, ils anticipent une croissance du produit intérieur brut (PIB) de 1,6% et 1,7%. Le ralentissement de l'activité mondiale et la multiplication des risques sur la scène internationale pèsent sur la demande adressée à la France.

En dépit du coup de frein à prévoir, les économistes de l'institution bancaire se montrent relativement optimistes sur la demande intérieure. Les mesures d'urgence économiques et sociales annoncées par Emmanuel Macron le 10 décembre dernier devraient limiter l'inflexion au regard des baisses observées dans la plupart des grandes économies européennes. Pour l'Italie par exemple, l'OCDE prévoit une récession pour cette année et un fort ralentissement pour l'Allemagne qui reste bien plus exposée à la baisse du commerce international que la France. Le modèle économique de Berlin, basé en partie sur l'industrie automobile et les exportations, se retrouve actuellement en forte difficulté.

Lire aussi : Le coup de frein sur l'économie mondiale plus marqué que prévu

Le pouvoir d'achat dopé par les mesures "Gilets jaunes"

La consommation des ménages apparaît clairement comme le moteur de l'économie française en 2019. Après plusieurs semaines de protestation des "Gilets jaunes", le président de la République avait annoncé un certain nombre de mesures destinées à doper le pouvoir d'achat des revenus modestes.

Alors que les économistes de l'Insee avaient estimé au mois de décembre que l'impact global « serait de 0,5 point de revenu disponible brut (RDB, c'est-à-dire les revenus dont disposent les ménages après opérations de redistribution) durant le premier trimestre 2019 », ceux de la Banque de France avancent que « ces dispositifs devraient se traduire par un impact de l'ordre de 0,7 point de pourcentage de pouvoir d'achat supplémentaire en 2019. »

Selon Olivier Garnier, directeur des études et des relations internationales à la banque centrale, « entre décembre et mars, il y a eu un gain de 0,7 point de pourcentage de revenu disponible brut. C'est le gain le plus important depuis 2007. Après c'est une moyenne, il faut regarder la distribution des gains par catégorie ».

Les hausses des salaires devraient également accélérer dans les prochains mois, permises notamment par des gains de productivité. La variation du salaire moyen par tête devrait passer de 1,6% en 2017 à 1,9% en 2018, 2,3% en 2019 et 2020.

Cette hausse du pouvoir d'achat devrait doper la consommation des ménages à la fois en 2019 et 2020. Après avoir constaté une forte hausse du taux d'épargne fin 2018 dans le contexte des mobilisations sociales, cet indicateur devrait plonger au cours des prochains mois. Ainsi, la progression de la consommation des ménages doublerait en 2019, passant de 0,8% en 2018 à 1,6% cette année et en 2020.

Une inflation au ralenti

Outre les mesures d'urgence économiques et sociales, le pouvoir d'achat des foyers français est également soutenu par « une inflation totale faible grâce au repli des prix du pétrole ». Après avoir connu un pic à l'été dernier à 2,6%, l'inflation a progressivement marqué le pas à la suite de la chute du prix du baril et de l'absence de la hausse de la taxe carbone après le recul du gouvernement. Le prix du baril en moyenne passerait de 71,1 euros en 2018 à 61,7 euros en 2019, et 61,3 euros en 2020.

En janvier dernier, l'indice des prix progressait de 1,4% et il pourrait se situer autour de 1% certains mois. Les simulations opérées par les experts prévoient une poursuite de cette baisse de l'inflation cette année avec 1,3% en moyenne annuelle en 2019. Les prix pourraient rebondir à partir de 2020 (1,6%) et 2021 (1,7%).

L'inflation sous-jacente, c'est-à-dire sans prendre en compte les prix de l'énergie et de l'alimentation, s'établirait à 0,9% en 2019. Elle pourrait connaître un rythme plus soutenu à partir de 2020 (1,2%) et 2021 (1,5%). Cette évolution s'expliquerait en grande partie par une amélioration du marché du travail (baisse du chômage) et des hausses de salaires plus importantes alors que les prix de l'énergie joueraient un rôle moindre.

Coup de frein de l'investissement des ménages

En 2018, l'investissement des ménages a freiné au point même de reculer à partir du second semestre. Les récents chiffres de mises en chantier et ventes de logements suggèrent que ce recul devrait se poursuivre en 2019 à -0,7% contre 1,9% en 2018.

Du côté des entreprises, l'investissement devrait être plus dynamique que la croissance de l'économie tricolore. L'institution bancaire projette une progression de 3,6% en 2019 contre 3,8% en 2018. Le taux d'investissement devrait se maintenir autour de 24% dans les prochaines années. Enfin, le taux de marge des entreprises devrait fortement s'améliorer en 2019 à 33,7% avec la transformation du CICE en baisse de cotisations mais cet effet sera temporaire. Cet indicateur devrait retrouver un rythme autour de 32% les prochaines années comparable à la période 2016-2018.

Chômage en baisse à prévoir

Sur le front du chômage, les prévisions sont relativement favorables. La Banque de France anticipe un taux de chômage au sens du bureau international du travail (BIT) à  8,7% en 2019 contre 8,3% en 2020, et 8% en 2021 après 9,1% en 2018 sur la France entière.

Au niveau des créations d'emploi, l'organisme bancaire a fortement revu à la hausse ses chiffres pour 2018 avec 257.000 créations (+21.000 par rapport à décembre). En revanche, les chiffres sont nettement moins favorables pour 2019 (124.000) et 2020 (179.000). Sur l'année 2018, les créations d'emploi ont été nettement moins soutenues à partir du second semestre avec la chute des emplois aidés et le ralentissement de l'activité.

Lire aussi : Le nombre d'emplois aidés dégringole

Craintes sur la croissance mondiale

En dépit de ce tableau relativement rassurant pour l'économie française, le directeur des statistiques a relevé de nombreux aléas susceptibles d'avoir des répercussions sur la croissance tricolore. Parmi les points évoqués, « le coup de frein sur la demande mondiale pèserait sur l'activité jusqu'à mi-2019, même si la France est un peu moins exposée que certains des ses grands partenaires de la zone euro », rappellent les auteurs du document. Les incertitudes autour du Brexit ont plongé un certain nombre d'industriels dans le flou le plus total. Des décisions d'investissement ou d'exportations peuvent être affectées par les multiples rebondissements politiques outre-Manche.

Ils pointent également les tensions commerciales à l'échelle internationale, « dont le développement demeure incertain ». Après avoir signé une trêve au mois de décembre dans l'escalade des mesures protectionnistes, les deux plus grandes puissances économiques devaient trouver un accord avant le premier mars dernier. Mais le président Trump a finalement levé cet ultimatum devant la complexité des négociations.

Le chef d'État américain a laissé entendre qu'un "sommet pour signer" l'accord serait possible avec le président chinois Xi Jinping à la fin du mois. Outre la guerre commerciale, beaucoup d'incertitudes demeurent également sur une possible remontée des prix de l'énergie et notamment ceux du pétrole. Ce qui pourrait à terme peser sur l'inflation.

Grégoire Normand
Commentaires 13
à écrit le 15/03/2019 à 14:36
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A en croire le bulletin d’information Maghreb Confidentiel, le président français Emmanuel Macron doit se rendre au Maroc pour sa deuxième visite officielle au cours du mois d'avril prochain. Aux côtés du roi Mohammed VI, il devrait inaugurer la nouv...

à écrit le 15/03/2019 à 12:08
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heureusement que l'industrie ne represente plus que 15% du PIB en France et qu'on a les aides sociales..; j'aime bien aussi le prix du baril a 61,3 euros en 2020. trop fort les economistes.....

à écrit le 15/03/2019 à 8:26
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1.3% de croissance, attention tout le monde les "experts" sont à la barre ! :D

à écrit le 15/03/2019 à 7:58
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Avoir fait l'ena pour pareil resultat ! Les enarques sont les meilleurs..... dans le pire.

à écrit le 15/03/2019 à 5:15
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2%. Hors taxes ?

à écrit le 14/03/2019 à 23:12
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La France a inventé la croissance molle permanente. Il faut bien avoir conscience qu'en période de ralentissement mondial - et donc de fort ralentissement en Allemagne, Italie, Royaume-Uni… - c'est un atout. Les entreprises et consommateurs français ...

le 15/03/2019 à 10:02
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@balafenn: Devrons-nous faire notre deuil des divines surprises comme celle de 1997, cette croissance qu'espérait Juppé et que Jospin a certainement gaspillée?

le 15/03/2019 à 14:37
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AA A en croire le bulletin d’information Maghreb Confidentiel, le président français Emmanuel Macron doit se rendre au Maroc pour sa deuxième visite officielle au cours du mois d'avril prochain. Aux côtés du roi Mohammed VI, il devrait inaugurer la ...

à écrit le 14/03/2019 à 20:52
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Je vote pour celui ou celle qui dit : " je vais faire ce que je peux, mais je ne maîtrise rien. Je suis débordé par la complexité: financière, technologique, environnementale, sociétale". L'état ne solutionne pas le chômage, la pauvreté, le changemen...

à écrit le 14/03/2019 à 19:42
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Les marges minimales à 10% ça ne va pas arranger les choses, le ministre a calculé que ça ne ferait que 50 centimes de plus par mois par consommateur, il a dû se tromper, par jour, pas par mois, annoncer peu ne peut masquer les calculs réels. Les GS ...

à écrit le 14/03/2019 à 18:21
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Consommer de l'import ou des produits délocalisés ne risque pas de résoudre les problèmes, cela nous oblige de vivre a crédits, merci a l'UE! Nous sommes obligés de vivre au dessus de nos moyens!

le 14/03/2019 à 19:11
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Ce n'est pas l'UE qui oblige les français à acheter des produits chinois à bas coûts.

le 15/03/2019 à 7:33
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Mais c'est elle qui ouvre les frontières a tout vents!

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