Pourquoi Emmanuel Macron convoite tant les investissements étrangers

Depuis six ans, Emmanuel Macron déroule le tapis rouge aux investisseurs étrangers, censés relancer l'industrie, la croissance et l'emploi en France. Si la France a endigué l'hémorragie de capitaux industriels et amélioré son attractivité, son industrie n'a pas rattrapé le retard accumulé dans les années 2000 sur ses voisins.
Emmanuel Macron jeudi 11 mai à l'Elysée lors de son discours sur l'industrie verte.
Emmanuel Macron jeudi 11 mai à l'Elysée lors de son discours sur l'industrie verte. (Crédits : Reuters)

« Pfizer, Nokia, Prologium, Morgan Stanley... ». Lundi, Emmanuel Macron égrenait sur Twitter le nom des investissements annoncés en France au sommet Choose France comme autant de victoires à mettre à l'actif de son bilan économique. Depuis 2017, les investisseurs étrangers sont reçus à la manière des chefs d'Etat à Versailles ou à l'Elysée à l'image d'Elon Musk.

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Rompu au langage des grands financiers, Emmanuel Macron sait comment murmurer à leur oreille. Son Choose France se voulait initialement comme une étape sur la route de la messe de la mondialisation à Davos, avant que la pandémie ne le décale au printemps. Sous les ors du château de Versailles, président et ministres s'emploient comme aucun gouvernement avant eux à restaurer l'attractivité française. « L'exécutif voit dans les investissements directs à l'étranger (IDE) une validation de sa politique économique », observe l'économiste du CEPII Vincent Vicard.

Les investissements étrangers, baromètre de la politique économique

L'efficacité des réformes se juge à l'aune du nombre d'IDE attirés chaque année, en particulier le classement d'EY très scruté. Alors que la France est d'ordinaire distancée dans des comparaisons avec les voisins (déficit public, commercial, part de l'industrie dans le PIB...), le palmarès d'EY lui offre des motifs de fierté. Pour la quatrième année consécutive, l'Hexagone est la première destination des investissements étrangers en Europe devant le Royaume-Uni.

« Autour de 2010, il y a eu une prise de conscience que la France était en concurrence pour les investissements, sous l'impulsion notamment de Christine Lagarde lorsqu'elle était ministre de l'Economie », précise Marc Lhermitte, associé du cabinet EY et responsable du baromètre des investisseurs étrangers. L'ancienne dirigeante du cabinet Baker McKenzie (ndlr, cabinet d'avocat d'affaires) connaissait bien la logique des grandes entreprises américaines et a déjà organisé des rencontres au sommet de l'Etat avec des investisseurs étrangers, préfigurant Choose France.

L'électrochoc du rapport Gallois

Quelques mois après, au tout début du quinquennat Hollande, le rapport Gallois publié en 2012 jetait une lumière crue sur les lacunes françaises, criantes dans une mondialisation plus souvent synonyme de délocalisations que de constructions d'usine.

Le pavé réclame un électrochoc de compétitivité en France, « coût » et « hors coût. » Emmanuel Macron travaille alors comme conseiller économique de François Hollande et manœuvre pour mettre en musique certaines des préconisations du rapport, notamment à travers le Crédit Impôt Compétitivité Emploi (CICE) appliqué dès 2013.

« Dans les quinze années précédant le rapport, les politiques économiques ne donnaient pas la priorité à la compétitivité, mais bien plus au pouvoir d'achat, aux 35 heures et aux services. Dans cette vision post-industrielle, on ne voyait pas l'intérêt de stimuler la production », se remémore Olivier Redoulès, directeur des études chez Rexecode.

L'hémorragie de capitaux et d'emplois industriels a été stoppée

Parvenu à la magistrature suprême, Emmanuel Macron s'emploie depuis à rattraper le retard de compétitivité accumulé, notamment en termes d'industrie. Avec une certaine efficacité : l'emploi industriel s'est stabilisé fin 2022 à son niveau de 2014 sans parvenir encore à rattraper le million d'emplois détruits dans les années 2000.

« Le rebond de l'attractivité remonte à 2015-2016 avec l'effet du CICE et de la première loi Travail. La France a ensuite maintenu des résultats spectaculaires en termes de projets d'investissements. Les gouvernements successifs ont fait un très bon "marketing" de la France », analyse Marc Lhermitte d'EY qui nuance la portée des annonces de Choose France. « Elle n'a fait que la moitié du chemin, notamment en termes d'emploi ». Un projet d'investissement génère 33 emplois en France, soit deux fois moins qu'en Allemagne et au Royaume-Uni « à cause d'une structure de coût élevée et d'un climat social jugé volatile » pointe le rapport.

L'Etat paie cher en subventions les projets d'investissements

En écho, Vincent Vicard souhaiterait que soit communiqué le montant des IDE qui quittent la France en même temps que ceux qui y arrivent, notamment de la part « multinationales françaises qui ont moins maintenu leur production nationale que les groupes allemands ». L'économiste du CEPII réclame aussi davantage de transparence sur le montant des subventions publiques consenties en échange des projets comme l'usine de batteries Prologium à Dunkerque, qui pourraient avoisiner « le milliard d'euros » selon lui.

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Les usines promises doivent surtout patienter plus longtemps en France qu'ailleurs avant de sortir de terre, pointe le rapport d'EY en raison d'« une pénurie de foncier et de lourdeurs administratives ». Autant de temps perdu avant que les chiffres d'investissements se traduisent en emplois et en création de valeur sur le sol français.

Commentaires 20
à écrit le 18/05/2023 à 10:10
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C'est de l'attrape-nigaud ce Choose France. Ce sont les mêmes qui ont racheté les usines et les ont fermées les unes après les autres. Pas étonnant quand on sait que les programmes publics d'investissement type BPI sont tous dirigés par des énarques...

à écrit le 18/05/2023 à 9:21
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Ne serait ce pas notre endettement qui reviendrai sous forme "d'investissement" pour mieux nous endetter ? On peut faire long avec ça ! ;-)

à écrit le 18/05/2023 à 0:53
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Les Français, y compris ce faux site de journalisme économique, sont des analphabètes financiers. Vous vous vantez du rang de la France en matière d'investissements directs étrangers (IDE) et dans le même temps vous vous plaignez inlassablement que d...

le 18/05/2023 à 9:54
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C'est l'arroseur arrosé car manifestement vous avez quelques lacunes en économie... Non un IDE n'est pas un rachat d'entreprise française. C'est une implantation ou un accroissement d'activité d'une entreprise étrangère déjà implantée. Ex dans le cas...

le 18/05/2023 à 23:30
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@dri C'est possible, mais en fait Simeon a raison, l'achat de parts de propriété, y compris d'actions cotées en bourse, est l'activité la plus courante qui définit et constitue l'IDE. Et oui, l'acquisition du capital d'une société française est défi...

à écrit le 17/05/2023 à 19:42
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Bref, les entreprises investissent, ce n'est que pour la gloire du président. Les entreprises n'investissent pas , c'est a cause du président. Pour un journal dit économique, c'est tout de même surprenant. Cela vous arrive d'être heureux par les réus...

à écrit le 17/05/2023 à 18:32
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Cela fait bien longtemps que le président des GOPE de l' UE -feuille de route de bruxelles!- avait poursuivi de vendre la France aux intrants us. Mais quand ceux-ci auront goûté aux 45,3 % de prélèvement -et dont ils sont déjà pour...

le 18/05/2023 à 9:56
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Encore un mensonge, la France n'est pas le payé le plus taxé de l'UE. Allez voir du coté du Danemark pour ça. Pays qui a d'ailleurs une industrie assez forte donc votre argumentation (si c'en est une car on décèle difficilement une logique) ne tient ...

à écrit le 17/05/2023 à 13:23
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Il est clair que faire des affaires avec l'étranger facilite les petits arrangements entre amis. Celui qui avait bradé voici quelques années la branche nucléaire d'Alstom est bien placé pour le savoir.

à écrit le 17/05/2023 à 11:03
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Si les français investissaient plus dans le private equity et dans l'actionnaire de long terme au lieu de mépriser tout risque financier, on aurait des entreprises françaises capables de faire ce que on s'attend des capitaux qu'on essaye d'attirer. ...

le 17/05/2023 à 12:29
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C'est donc tout et son contraire si on vous lit bien.

le 17/05/2023 à 13:19
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qui sème le vent récolte la tempête

le 17/05/2023 à 13:30
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Exact, il est obligé de courir après la capitaux étrangers parce-que l'épargne des français est stérilisée dans la pierre, le livret A et la dette française qul'ils possédent via leur assurance-vie. Au lieu que les dividendes restent en France, ce s...

le 17/05/2023 à 18:39
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C'est en parti vrai, cette mentalité est entretenue par l'état et les banques qui spolient l'épargne des français avec des placements en cartons style livret A (finançant le logement social on le rappelle), de cette manière ils maintiennent les franç...

à écrit le 17/05/2023 à 9:35
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A mesure que nous nous dirigeons inéluctablement vers l'abime ils mentiront de plus en plus...

à écrit le 17/05/2023 à 9:06
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A chaque compromission, La France perd une parti de souveraineté et... l'on sent que c'est la mission qui lui a été assigné puisqu'il n'y a pas fait preuve du contraire !

à écrit le 17/05/2023 à 9:03
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personne ne veut plus revenir dans votre pays schizophrene y subir florange dailymotion, la loi ecocide, eckert, la retroactivite des lois, les taxes sur les superprofits qui n'existent pas, les delits d'entrave a chaque contrariete de la cgt......vo...

le 17/05/2023 à 12:42
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@ churchill...😃 Dans votre cas, c'est la faute à Alzeheimer...nous serons indulgents🤣

à écrit le 17/05/2023 à 8:50
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puisque m macron est encore avec sa vision erroné de la mondialisation qu'il aille au bout de sa pensee et suprime sa fonction et qu'il n'y a plus de president mais un conseil de plusieurs membre renouvele tout les ans et sans possibilite de renouv...

à écrit le 17/05/2023 à 7:37
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La vie des gens, le social et l'écologie ne l'intéressent pas. Donc, en tant qu'ancien banquier, il s'intéresse aux flux financiers et à la prospérité croissante des actionnaires.

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