La pression monte encore sur les entreprises. Alors que l'économie tricolore marque le pas et que la zone euro est en récession, les salariés doivent encore se serrer la ceinture. L'inflation a certes ralenti depuis plusieurs mois en raison notamment des baisses sur les prix de l'énergie mais elle demeure à un niveau élevé. L'indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH) s'est établi à 5,5% en juin contre 6,1% dans la zone euro selon les chiffres dévoilés par Eurostat ce mercredi 19 juillet. Dans l'Hexagone, l'indice des prix devrait également freiner à 5,6% en 2023 et 2,4% d'après la Banque de France.
Mais l'institution bancaire a révisé légèrement à la hausse ses projections pour 2023 en juin dernier en raison des prix toujours élevés dans l'alimentaire. Face à cette persistance de l'inflation, les entreprises ont prévu de lâcher plus de lest que prévu sur les fiches de paie. D'après le dernier baromètre réalisé par le cabinet LHH dévoilé à la mi-juillet, les entreprises ont prévu un taux global d'augmentation des budgets dédiés aux NAO de 4,7% en 2023. C'est 0,7 point de plus que lors de la dernière enquête réalisée à la fin de l'année 2022. Il s'agit « d'un record en dix ans ».
Plus de hausses générales dans la majorité des entreprises
La plupart des catégories professionnelles devraient bénéficier d'une hausse généralisée dans les entreprises interrogées. Trois-quarts des dirigeants ont affirmé qu'ils allaient accorder des augmentations générales pour les ouvriers, les employés et les agents de maîtrise ou encore les techniciens. Chez les cadres, cette proportion atteint les deux tiers. S'agissant des hausses individuelles, deux tiers des entreprises se sont montrées favorables à faire un geste pour les employés et les ouvriers.
Ce ratio s'établit à 80% pour les techniciens et agents de maîtrise et 90% pour les cadres. « Au global, plus de la moitié des salariés des entreprises pratiquant des augmentations individuelles en bénéficient », souligne le cabinet LHH spécialisé dans les ressources humaines.
Des primes qui peuvent se substituer à des hausses de salaire
Les entreprises ont également prévu des leviers complémentaires pour soutenir le pouvoir d'achat des salariés. Parmi les mesures plébiscitées figurent les primes de partage de la valeur. 45% des entreprises interrogées prévoient de verser des primes pour un montant moyen de 800 euros. D'autres pourraient favoriser l'intéressement ou la participation des salariés dans l'entreprise. Le gouvernement a fait voter un texte de loi à l'Assemblée nationale à la fin du mois de juin.
ll retranscrit un accord national interprofessionnel (ANI) signé en début d'année par 4 syndicats sur 5. Dans une note dévoilée mardi 18 juillet, le conseil d'analyse économique (CAE) a tiré la sonnette d'alarme sur les risques de substitution entre revalorisations salariales et primes. « La mise en place de ces primes aboutissent à des effets de substitution entre 15% et 40% », a expliqué l'économiste Camille Landais lors d'un point presse.
« Pas de spirale prix-salaires » en 2023 selon la Banque de France
Ces hausses plus importantes qu'anticipé dans les entreprises pourraient laisser craindre une inflation persistante au-delà de 2023. Déjà à l'été 2022, les milieux conservateurs redoutaient une boucle prix-salaires dans la zone euro. Autrement dit, les hausses de salaires allaient alimenter la flambée des prix partout sur le Vieux continent. Un an après, cette boucle n'a pas eu lieu. La désindexation des salaires sur les prix dans la plupart des grands pays de la zone monétaire a écarté complètement ce risque.
S'agissant de 2023, le scénario noir devrait être évité. « Les salaires augmentent mais moins vite que l'inflation. Il n'y a pas de spirale prix-salaire », souligne un cadre de la Banque de France en pointe sur ces questions. Le salaire moyen par tête nominal devrait augmenter de 5,5% en 2023 d'après les dernières projections de la banque centrale. En prenant en compte l'inflation, le salaire réel devrait néanmoins reculer de 0,9% de 2023 après une précédente baisse de 1,4% en 2022.
La demande toujours en berne
Les indicateurs de la demande sont au rouge. La consommation des ménages devrait reculer de -0,2 point cette année d'après l'Insee.« Aujourd'hui, la demande s'écroule », a alerté, Jean-François Robin, directeur de la recherche macroéconomique chez Natixis lors d'une réunion avec des journalistes. Sur le front de l'investissement, les ménages vont considérablement réduire la voilure cette année (-6,7%) après une année déjà compliquée (-1,3%).
Le resserrement de la politique monétaire de la BCE a pesé sur la demande partout en Europe. L'annonce de la prochaine hausse des taux attendue la semaine prochaine risque une fois de plus de plomber la demande. La récession dans la zone euro pourrait se prolonger au-delà du premier semestre. Autant dire que l'automne s'annonce très sombre.