Les PDG des grandes entreprises américaines n'ont jamais aussi bien gagné leur vie. Leur rémunération moyenne a en effet grimpé à 14,7 millions de dollars en 2021 selon une enquête du Wall Street Journal, qui porte sur 400 entreprises, publiée ce dimanche 15 mai. Soit un sixième record d'affilée.
Entre salaires, primes, avantages et stocks options, la rémunération totale d'un grand PDG a ainsi bondi l'année dernière de 12% dans le sillage d'une hausse des bénéfices des sociétés, des rendements des actionnaires et de la montée des cours de bourse.
Pour deux tiers des PDG, cette rémunération vient largement sous forme d'actions ou de stocks options investies sur plusieurs années. Sans ces portefeuilles, le salaire moyen des grands patrons américains se situe à 3,1 millions de dollars.
Les 25 premiers dirigeants ont touché une rémunération totale de 35 millions de dollars annuels. Les mieux payés relèvent du secteur des technologies de l'information ou des médias. Depuis le début de l'année toutefois, les marchés boursiers connaissent une sévère chute qui pourrait entamer ce classement en 2022.
En tête de l'enquête du journal pour 2021, Peter Kern, patron d'Expedia, obtient le premier rang avec un package de 296 millions de dollars, alors qu'il a été nommé en avril 2020 à la rescousse du groupe de sites de voyages (Travelocity, Orbitz), fortement touché par l'impact du Covid. Vient ensuite le dirigeant de Warner Bros Discovery, David Zaslav qui a engrangé une compensation de 246 millions de dollars. Tim Cook d'Apple et Jamie Dimon, le patron de la banque JPMorgan Chase, viennent au 4e et 5e rang avec respectivement environ 98 millions et 84 millions de dollars.
+31% pour les 100 plus gros patrons
Une autre étude publiée le 18 avril dernier par le cabinet Equilat sur les 100 plus grosses entreprises américaines indiquait que le revenu médian de leur directeur général a augmenté de 31% en 2021. Equilar a établi son classement annuel à partir des 100 entreprises aux chiffres d'affaires les plus élevés ayant diffusé les informations requises en amont de l'assemblée générale de leurs actionnaires au 31 mars.
Entre les salaires, les primes et les stock-options, ces 100 patrons ont gagné 20 millions de dollars en moyenne en 2021. Le plus cher payé étant le directeur général d'Intel Patrick Gelsinger (178 millions de dollars), détaille Equilar. Il est suivi de Tim Cook d'Apple (99 millions), de Hock Tan de Broadcom (61 millions) et de Satya Nadella de Microsoft (50 millions). Pour rappel, leurs revenus médians avaient reculé de 2% en 2020, année où avait éclaté la pandémie, rappelle le cabinet.
« La forte augmentation des salaires est probablement due au fait que de nombreuses entreprises ont choisi de récompenser leurs PDG par le biais de primes et d'attributions d'actions pour avoir guidé leurs organisations à travers des périodes turbulentes et avoir stimulé la croissance des revenus », avançait alors le cabinet.
Dans le classement figurent seulement neuf femmes, aucune n'étant parmi les 10 patrons les mieux payés, remarque le cabinet.
Un salaire 254 fois plus élevé que celui des salariés
Conséquence de ces fortes augmentations : le rapport entre la paye des patrons et celle de leurs employés a aussi grimpé. Les patrons ont en moyenne gagné 254 fois plus que leurs salariés en 2021, contre 238 fois l'année auparavant. La paye médiane des salariés de ces 100 grandes entreprises a de son côté augmenté de 4%, à 71.869 dollars.
Un rapport du Trésor américain, publié début mars, confirme d'ailleurs que les salaires ont augmenté l'an passé dans un contexte de pandémie de Covid-19. Les employeurs ont ainsi multiplié les offres d'emplois aux salaires bonifiés, assortis d'avantages sociaux. De nombreuses entreprises comme Amazon, Walmart ont franchi le cap des 15 dollars de l'heure pour les salaires les plus bas afin de fidéliser les salariés, impensable avant la pandémie.
Néanmoins, l'étude estime que les salaires américains pourraient être supérieurs de 20% à ce qu'ils sont actuellement s'il y avait plus de concurrence et si la syndicalisation était plus répandue. « Les pratiques des employeurs telles que l'exigence d'accords de non-concurrence et la classification erronée des employés en tant qu'entrepreneurs indépendants ont forcé les travailleurs à accepter des salaires inférieurs et de pires conditions de travail », avancent les auteurs du rapport.
Parallèlement, ils notent que le déclin de la syndicalisation a laissé les travailleurs avec moins de pouvoir de négociation pour contrer le pouvoir des employeurs. Le taux d'employés syndiqués dans le secteur privé a encore reculé dans le pays en 2021, à 6,1%.
« Un marché du travail compétitif est un élément clé d'une économie qui fonctionne bien », avait réagi la secrétaire au Trésor, Janet Yellen, citée dans un communiqué, promettant que son administration mettrait en œuvre les recommandations. Les auteurs du rapport suggèrent notamment des mesures antitrust, de faciliter la syndicalisation et d'augmenter le salaire minimum.