Facebook part en guerre contre les médias et le gouvernement canadien

Après plusieurs mois de discussions et de menaces, Meta, la maison mère de Facebook et Instagram a coupé l’accès aux médias canadiens sur ses plateformes. Ce boycott fait suite au vote d’une loi canadienne sur l’obligation de conclure des accords commerciaux entre les réseaux sociaux et les médias pour mieux payer les journalistes. Si Meta, mais aussi Google, refusent de payer les médias canadiens, ces derniers ont déjà accepté les conditions imposées par les gouvernements de plusieurs États dans le monde.
Meta souhaite faire plier le gouvernement canadien sur sa nouvelle loi.
Meta souhaite faire plier le gouvernement canadien sur sa nouvelle loi. (Crédits : GONZALO FUENTES)

Une nouvelle guerre est entamée entre les réseaux sociaux Facebook et Instagram et des médias. Au Canada, les deux géants du numérique Meta et Google font pression sur le gouvernement pour revenir sur un texte de loi tout juste promulgué.

« Aujourd'hui, nous confirmons que le contenu d'actualité ne sera plus disponible sur Facebook et Instagram pour tous les utilisateurs au Canada », a indiqué Meta dans un communiqué, soulignant avoir prévenu « à plusieurs reprises » que cette mesure serait prise.

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Ces derniers mois, Meta et Google ont déjà indiqué effectuer des tests sur une petite partie de la population canadienne, restreignant leur accès à des sites d'informations. La menace de boycott des médias canadiens est donc maintenant mise à exécution. Pour Google, la loi canadienne a besoin d'être corrigée et « si elle reste inchangée, (elle) pourrait avoir un impact sur les produits que les Canadiens utilisent et sur lesquels ils comptent tous les jours », avait déjà commenté le porte-parole de l'entreprise en février.

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« Si le gouvernement ne peut pas défendre les Canadiens contre les géants du web, qui le fera? », a réagi, de son côté, le ministre du Patrimoine Pablo Rodriguez. Facebook n'avait « aucune obligation » à couper cet accès, la loi n'étant pas encore formellement entrée en vigueur, a-t-il ajouté. Le bureau du ministre a également souligné qu'il avait « rencontré Facebook et Google cette semaine » et qu'il restait ouvert à de nouvelles discussions. En cas d'accord, les Canadiens pourraient retrouver l'accès aux articles de leurs médias nationaux sur les réseaux sociaux.

Une loi pour que les géants du web payent les journalistes

La nouvelle loi oblige les géants du numérique à conclure des accords commerciaux équitables avec les médias canadiens pour les publications partagées sur leurs plateformes, sous peine de devoir recourir à un arbitrage contraignant. Le mois dernier, le Premier ministre Justin Trudeau a déclaré que l'entreprise était « profondément irresponsable et déconnectée » en refusant de payer les journalistes pour leur travail. Son opposition au projet de loi, a-t-il déclaré, est « erronée (et) dangereuse pour notre démocratie et notre économie ».

La nouvelle loi, vivement critiquée par les deux géants de la Silicon Valley, a pour objectif de soutenir le secteur de l'information au Canada qui, selon le ministre, est « en crise ». La porte-parole de Google Jenn Crider a déclaré que l'entreprise « fait tout pour éviter un résultat que personne ne veut » et cherche à travailler avec le gouvernement « pour avancer ». Le géant du web a proposé des amendements au texte mais Jenn Crider a dit jeudi que « jusqu'ici, aucune de nos préoccupations n'a été prise en compte ».

Plus de 450 médias d'information canadiens ont fermé leurs portes depuis 2008, d'après le ministère du Patrimoine. Ce projet de loi est inspiré de celui adopté en 2021 par l'Australie, premier du genre au monde. Le texte avait été facilement adopté après que Facebook et Google aient trouvé des accords afin d'éviter d'être soumis à un arbitrage contraignant.

Le paiement des « droits voisins » déjà instauré en Europe

Confrontée à la même situation, l'Union européenne a instauré en 2019 un « droit voisin » qui doit permettre la rémunération des éditeurs de presse pour les contenus utilisés par les plateformes en ligne. Après avoir rechigné, Google a signé en novembre des accords avec des journaux français, une première mondiale. L'AFP a signé avec Google fin 2021 un accord qui rémunère l'agence pendant cinq ans pour ses contenus présentés par le géant américain, ainsi que deux contrats commerciaux, également d'une durée de cinq ans.

Mais l'application du « droit voisin », a été critiquée dans un rapport parlementaire publié en janvier qui regrette « l'opacité » du dispositif et préconise plus de transparence et le recours à des négociations collectives. « Deux ans après l'adoption de la directive et la promulgation de la loi, le nombre d'accords de rémunération au titre du droit voisin est tout à fait marginal et l'intention du législateur n'a pas été respectée », a notamment fustigé ce rapport de la mission d'information, présidée par Virginie Duby-Muller (LR) avec pour rapporteur Laurent Garcia (apparenté MoDem).

Selon les députés : « les éditeurs et les agences de presse n'ont pas les moyens d'une coopération assainie avec les plateformes numériques compte tenu de l'opacité de leur fonctionnement ». Et « rares sont ceux à avoir perçu une rémunération au titre du droit voisin. Le contenu des accords passés est opaque », relèvent-ils.

Twitter menacé en Europe pour sa politique de modération de contenus

Une autre bataille oppose aussi un réseau et des Etats en Europe : celle de la modération de contenus. Twitter doit renforcer ses moyens d'ici au 25 août pour être capable de respecter l'ambitieuse nouvelle législation européenne sur les contenus en ligne, a averti jeudi le commissaire européen Thierry Breton après sa rencontre avec Elon Musk. « Si la technologie n'est pas prête, ils doivent disposer de suffisamment de moyens pour combler l'écart. J'ai parlé de ce sujet spécifique avec Elon Musk », a déclaré le commissaire à la presse, à l'issue d'une réunion au siège de Twitter à San Francisco, où la nouvelle directrice générale de la plateforme Linda Yaccarino était également présente.

Ce texte est une des réglementations les plus ambitieuses en matière de contrôle des contenus en ligne depuis l'avènement des réseaux sociaux. Il impose une longue liste de règles aux plateformes, places de marché et moteurs de recherche, comme l'obligation d'agir « promptement » pour retirer tout contenu illicite ou préjudiciable dès que la plateforme en a connaissance. L'ancien ministre français des Finances doit également rencontrer Mark Zuckerberg, le patron de Meta, pour s'assurer de la mise en conformité de Facebook et d'Instagram.

(Avec AFP)

Commentaires 3
à écrit le 23/06/2023 à 18:55
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Facebook est désormais plus puissants que certains pays. Ils collectent des informations sur vous, même si vous n'avez pas de compte. Le meilleur moyen de lutter, c'est d'utiliser le navigateur "Mozilla Firefox" qui est respectueux de la vie p...

à écrit le 23/06/2023 à 9:48
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En gros, les Facebook Google et autres ne produisent rien, se contentant de de faire payer les annonceurs pour nous "fourguer" des produits dont nous nous n'avons pas besoin et quasiment tous frelaté.

à écrit le 23/06/2023 à 8:49
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Nous voyons et lisons des "informations" partout, tous les sites même firefox a ses actualités avec en général deux trois trucs sérieux pour 10 profondes crétineries. Le problème de fond ne sera donc pas résolu. "Qu'avons nous fait de la sagesse que ...

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