Spécialiste de l’isolation à base de polystyrène biosourcé, Corstyrène veut aussi s’affirmer dans l’hydrogène vert

Spécialisée dans l’isolation des bâtiments, la société située à Aléria s’affirme comme un modèle en termes de transition écologique depuis plus de cinquante ans. Elle relève aujourd’hui le challenge de la construction hors site et déplore les carcans administratifs pour la production de l’hydrogène vert.
(Crédits : DR)

Depuis sa création il y a 53 ans, Corstyrène s'affirme comme une des plus solides et des plus exemplaires entreprises de Corse en termes de transition écologique. Installée à Aléria, en Plaine orientale, au cœur d'un parc photovoltaïque de sa création, elle s'est spécialisée dans la confection des matériaux d'isolation à base de polystyrène expansible à destination du bâtiment, aussi bien individuel, collectif qu'industriel.

Et elle s'est donnée pour principe intangible de mener une existence verte et vertueuse. Elle produit ainsi trois fois plus de courant qu'elle n'en consomme, organise le tri sélectif de tout ce qui s'utilise sous son toit, recycle et valorise les chutes de polystyrène, régénère l'eau dont elle se sert dans sa chaîne de production - affranchie de tout adjuvant toxique. En outre, l'entreprise collectionne les certifications les plus exigeantes, déploie sa production en circuit court et s'est engagée dans la production d'hydrogène vert, bien que freinée malgré elle dans son élan.

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La société a d'ailleurs rallié le cercle fermé de la CEC, la Convention des entreprises pour le Climat.

« L'écologie est inscrite dans notre ADN. Rien de ce qu'on entreprend, rien de ce qu'on investit ne s'exonère de la volonté affirmée de réduire toujours davantage l'empreinte carbone », confie Sophie Guillot, sa directrice générale.

Le virage du polystyrène biosourcé

Fondée par Even Guillot, un entrepreneur visionnaire récemment disparu, Corstyrène, désormais dirigée par son fils, est devenue un groupe leader en Corse dans le secteur de l'isolation, son cœur de métier, avec des sites délocalisés en Sardaigne et dans le Var. La réglementation thermique européenne, de plus en plus draconienne, la construction basse consommation et le souci de mieux isoler pour économiser l'énergie ont dopé l'activité de la société.

« En 20 ans, nous avons quasiment triplé notre production d'isolants et nous sommes confiants en l'avenir, car le polystyrène a encore de beaux jours devant lui : il est légerune bille de polystyrène est constituée d'air à 98%, il est économique, c'est une matière indestructible à la stabilité thermique illimitée. »

Dans le droit-fil de sa stratégie verte, Sophie Guillot explique que la société a négocié le virage du polystyrène expansé biosourcé : la matière première n'étant plus le pétrole, mais la biomasse. Elle est plus chère et donc, le prix à la vente plus élevé, de l'ordre de 40%. « En optant pour l'isolant biosourcé, le constructeur fait un choix responsable et citoyen. Il représente aujourd'hui environ 20% de notre production, mais ce sera 100% à l'horizon 2040. »

Non seulement l'outil industriel est performant, mais il s'impose comme un modèle anti-CO2. En effet, chaque année, Corstyrène fait venir 80 camions de matière première (en provenance de France, d'Allemagne et des Pays-Bas) pour fabriquer la large gamme de ses isolants. Si la société n'existait pas, les besoins de la Corse seraient de 1.800 camions. Le marché de Corstyrène est essentiellement local, le groupe alimente les grandes enseignes de matériaux de construction présentes dans l'île, réussissant ainsi l'alliance entre circuits-courts, économie circulaire et sobriété carbone.

Au total, 3 millions d'euros (en machines et bâtiments) ont été investis dans son unité de fabrication, beaucoup plus économe en gaz et en électricité pour un produit fini de meilleure qualité. Par ailleurs, la totalité des chutes de polystyrène expansé est recyclée pour être réintégrée dans le process de transformation.

Corstyrène

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Hydrogène vert : le parcours du combattant

Fidèle à ses principes d'innover, l'entreprise s'est lancée depuis six ans dans la production d'hydrogène vert, ce qui fait d'elle un précurseur en la matière, injectant pour cela 1,5 million d'euros.

« Nous avons répondu à un appel à projets national et nous avons été sélectionnés avec trois autres entreprises françaises. Ce succès nous a permis de réaliser une première station de production quotidienne de 4 kilos d'hydrogène destiné à la mobilité. »

Ainsi, grâce à Corstyrène Energy, toute la flotte des chariots élévateurs du site industriel d'Aléria, équipés de piles à combustible, fonctionnent à l'hydrogène vert. Une nouvelle station de production beaucoup plus grande était dans les tuyaux pour permettre, entre autres, aux sociétés de transport de rouler à l'hydrogène vert et à la Collectivité de Corse d'électrifier les quais de ses deux grands ports de commerce d'Ajaccio et de Bastia et ainsi réduire les émissions nocives générées par un trafic maritime forcément dense pour une île.

Mais le projet a du plomb dans l'aile pour au moins deux raisons : malgré la politique volontariste du gouvernement, les progrès technologiques ne tiennent pas la distance des promesses de l'État, et l'enveloppe de 4 milliards - confiée à l'Ademe pour soutenir la production d'hydrogène bas carbone via des appels à projets - ne cible prioritairement que les géants industriels du secteur au détriment des PME.

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En guise de remède à sa frustration, Corstyrène a mis à contribution, dès cette année, sa filiale Kalliste Bois Industrie, située à proximité, pour développer la construction hors site de maisons composées de modules en bois de 50 m2 qui s'imbriquent les uns aux autres selon la surface de logement souhaitée. Un habitat modulaire qui est, de surcroît, énergétiquement autonome. « Tout est conçu et fabriqué sur place avant livraison. Les chutes de matériaux sont valorisées et les modules montés sur pilotis pour préserver la biodiversité... »

Corstyrène, qui emploie 46 salariés, produit 1.700 tonnes de produits isolants par an et réalise l'isolation de 1.200 logements. Son chiffre d'affaires s'élève à 20 millions d'euros.

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