Bruxelles veut faciliter les aides d'Etat à l'industrie européenne pour lutter contre la concurrence américaine et chinoise

Bruxelles va proposer ce mercredi de faciliter les aides d'Etat dans l'UE pour soutenir la transition verte des industriels européens menacés par les subventions américaines de l'administration Biden ou encore la concurrence déloyale venue de Chine. Cette proposition est controversée parmi les Vingt-Sept, même si l'urgence est là : des milliers d'emplois sont en jeu dans la chimie, la sidérurgie et toutes les filières de la transition écologique.
Ursula von der Leyen a été mandatée en décembre par les dirigeants des Vingt-Sept pour étudier une réponse au plan d'aide protectionniste à 370 milliards de dollars décidé par l'administration américaine.
Ursula von der Leyen a été mandatée en décembre par les dirigeants des Vingt-Sept pour étudier une réponse au plan d'aide protectionniste à 370 milliards de dollars décidé par l'administration américaine. (Crédits : JOHANNA GERON)

L'Europe est bien décidée à mettre son propre plan sur la table pour contrer les subventions accordées par l'administration Biden à des industriels.

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La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, détaillera ce mercredi, en début d'après-midi, différentes pistes pour faciliter des aides d'Etat aux industriels européens menacés par les subventions américaines. Elles seront ensuite débattues lors d'un sommet des chefs d'Etat et de gouvernement de l'UE les 9 et 10 décembre à Bruxelles, avant des décisions en mars.

Ursula von der Leyen a été mandatée en décembre par les dirigeants des Vingt-Sept pour étudier une réponse au plan d'aide protectionniste à 370 milliards de dollars décidé par l'administration américaine l'été dernier. Il réserve par exemple aux véhicules électriques sortis d'usines nord-américaines le bénéfice de primes à l'achat.

Aider les entreprises impliquées dans les énergies renouvelables

 « La Commission souhaite accorder aux Etats membres plus de flexibilité dans l'octroi d'aides » aux entreprises impliquées dans les énergies renouvelables (solaire, éolien...) et la décarbonation de l'industrie (hydrogène, électrification, efficacité énergétique...), stipule un document de travail de l'exécutif européen, consulté par l'AFP. Certains investissements dans de nouvelles usines pourront être soutenus notamment par des « avantages fiscaux ».

Cette proposition, défendue par Paris et Berlin, est controversée parmi les Vingt-Sept, et au sein même de la Commission. Après le sommet de l'Eurogroupe lundi 16 et mardi 17 janvier, le ministre de l'Economie français, Bruno Le Maire, insistait fortement sur la nécessité de mettre en place des aides publiques en faveur de l'industrie européenne. « Je veux aujourd'hui plaider pour une nouvelle donne en matière de politique industrielle européenne. Je pense que c'est la priorité pour 2023 » a déclaré le locataire de Bercy lors d'un point presse.

Des aides qui profiteraient essentiellement à l'Allemagne et la France

Le carcan des subventions nationales est déjà assoupli depuis le début de la pandémie en 2020. L'ouvrir encore risque de profiter aux grands pays riches, essentiellement l'Allemagne et la France, qui pourraient favoriser de façon excessive leurs entreprises au détriment de leurs concurrentes de l'UE.

Ces deux pays ont représenté respectivement 53% et 24% des aides d'État notifiées depuis mars 2022 dans le cadre d'un assouplissement lié à la guerre en Ukraine, contre seulement 7% pour l'Italie, en troisième position.

« La compétitivité de l'UE ne peut pas être construite sur des subventions non ciblées permanentes ou excessives », ont averti les ministres des Finances de sept pays membres, dont l'Autriche, le Danemark et la Finlande, dans une lettre commune.

France et Italie réclament des financements communs

Pour atténuer le risque de fragmentation du marché unique, d'autres, France et Italie en tête, réclament de nouveaux financements communs. Ursula von der Leyen a promis en janvier de travailler à l'instauration d'un fonds de souveraineté européen, qui permettra « à moyen terme » d'investir dans la recherche ou le capital d'entreprises stratégiques. Mais l'idée est rejetée par plusieurs pays comme l'Allemagne, les Pays-Bas ou la Suède, hostiles à toute augmentation de leur contribution au budget de l'UE. Sur ce sujet aussi, le débat s'annonce vif. « On peut faire de la politique économique sans dépenser d'argent », a souligné cette semaine le ministre allemand des Finances Christian Lindner qui propose plutôt de « réduire la bureaucratie ».

A court terme, la Commission n'envisage aucun nouveau financement de l'UE. Elle table sur la mobilisation des fonds existants, notamment le plan de relance européen à 800 milliards d'euros (NextGenerationEU), avec éventuellement des redéploiements pour augmenter la part actuellement consacrée à la transition verte (250 milliards d'euros).

Bruxelles prévoit aussi une nouvelle législation qui permettra de fixer des objectifs de production dans des secteurs clé pour la souveraineté européenne, de soutenir des projets impliquant plusieurs pays européens, en accélérant et simplifiant les autorisations et financements.

L'industrie européenne est dans la tourmente

Privée de son accès au gaz russe bon marché, l'Europe paie le prix fort de la guerre en Ukraine. Les tarifs imposés aux industriels européens ont été multipliés par trois par rapport à la moyenne de la dernière décennie, alors qu'ils sont restés stables en Asie et en Amérique du Nord. Le choc est d'autant plus rude qu'il s'accompagne d'une envolée des prix de l'électricité.

Pour lutter contre le changement climatique, l'UE va investir des centaines de milliards d'euros dans les industries vertes (panneaux solaires, batteries, hydrogène...). Elle risque de se retrouver dépendante d'entreprises chinoises bénéficiant de subventions massives et de moindres contraintes environnementales, en plus d'une énergie moins chère.

Pris en étau, les industriels de l'UE sonnent l'alarme. « De nombreuses entreprises délocalisent déjà partiellement ou totalement leur production », avertit BusinessEurope, l'organisation patronale européenne. Des milliers d'emplois sont en jeu dans la chimie, la sidérurgie et toutes les filières de la transition écologique. Luca de Meo, directeur général de Renault et président de l'Association des constructeurs européens d'automobiles (ACEA), a souhaité mardi « une politique industrielle ambitieuse » soulignant que la filière, engagée dans la révolution de l'électrification, « perdait progressivement du terrain par rapport à ses principaux concurrents mondiaux ».

  (Avec AFP)

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Commentaires 3
à écrit le 01/02/2023 à 17:51
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La fin de l'Arehn et du marché européen de l'énergie? La fin des sanctions économiques suicidaires? La fin des accords de libre échange? Non, juste des subventions supplémentaires à distribuer aux potes.

à écrit le 01/02/2023 à 11:03
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Et encore les pays du sud quasie en failliete trottent pour plus d'argent des pays reussis.

à écrit le 01/02/2023 à 8:37
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En imposant la sémantique climatique et pas les autres continents il faudrait être complètement demeurés pour ne pas protéger ce phénomène sinon autant brader directement nos dernières usines et entreprises et politiciens d'ailleurs devenus marchandi...

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