Hausse des taux : le FMI appelle les banques centrales européennes à « tuer la bête » de l'inflation

Les banques centrales européennes doivent, selon le FMI, « tuer la bête » de l'inflation, sans être tentées de faire une « pause » dans leur relèvement des taux d'intérêt. Le Fonds appelle également les pays européens à réduire leurs déficits budgétaires et la taille de leurs dispositifs de soutien à l'inflation.
Pour le directeur du FMI pour l'Europe, la politique de resserrement monétaire de la BCE doit durer « jusqu'à mi-2024, afin de ramener l'inflation à son objectif de 2% quelque part en 2025 ».
Pour le directeur du FMI pour l'Europe, la politique de resserrement monétaire de la BCE doit durer « jusqu'à mi-2024, afin de ramener l'inflation à son objectif de 2% quelque part en 2025 ». (Crédits : HEIKO BECKER)

« Tuer la bête de l'inflation ». La formule est d'Alfred Kammer, directeur du FMI pour l'Europe. « Si potentiellement vous commencez à faire une pause, que vous faites prématurément une fête, l'histoire est pleine d'exemples où il vous faut un deuxième essai pour freiner l'inflation et vous faites une deuxième fois des dégâts à l'économie », a-t-il souligné s'adressant aux banques centrales européennes lors d'un point presse sur l'économie du Vieux-Continent organisé à Stockholm.

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Début avril, déjà, Kristalina Georgieva, patronne du FMI estimait que les banques centrales ne devaient surtout pas « reculer » malgré les risques que cela peut faire courir au secteur financier, dans un entretien à l'AFP.

 « À l'heure actuelle, nous n'envisageons pas que les banques centrales doivent reculer dans leur lutte contre l'inflation, car l'inflation est toujours là, et tant qu'elle ne baisse pas de manière suffisamment marquée, les banques centrales doivent poursuivre » leur hausse des taux, soulignait-elle.

L'inflation, dans la zone euro, a bien connu un ralentissement en mars. Les prix à la consommation ont, en effet, augmenté de 6,9% sur un an, soit le taux le plus bas enregistré depuis un an, et nettement en dessous du pic de 10,6% atteint en octobre.

La BCE appelée à encore relever ses taux d'intérêt

Ça n'est pas suffisant néanmoins. Ainsi pour la Banque centrale européenne (BCE), qui a déjà relevé ses taux d'intérêt au plus haut depuis octobre 2008, dans une fourchette de 3% à 3,75%, cela doit se traduire par « davantage » de hausses de taux pour « plus longtemps », a estimé Alfred Kammer. Cette politique de resserrement monétaire de la BCE doit durer « jusqu'à mi-2024, afin de ramener l'inflation à son objectif (de 2%, NDLR) quelque part en 2025 », selon l'économiste allemand.

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Pour le FMI, le besoin de ralentir l'inflation passe bien avant les inquiétudes à l'égard du système bancaire et financier, à même selon lui d'encaisser les tensions. « Et il n'y a pas de débat là-dessus », a-t-il tranché. « Nous estimons que le système bancaire doit être capable de gérer le stress venu de ce côté ». Malgré les inquiétudes provoquées par les récentes déconfitures de la banque américaine SVB ou du géant helvétique Crédit Suisse, « en Europe, nous avons un système bancaire sain, bien capitalisé, très régulé et bien surveillé », a justifié le responsable du FMI.

Une consigne que la BCE devrait suivre. En témoignent les propos de son économiste en chef qui a estimé, le 25 avril dernier, que ce n'était « pas encore le moment » de mettre fin aux hausses de taux d'intérêt, et ce, même si l'inflation dans la zone euro commence à ralentir.

Les données actuelles « indiquent qu'il faudra augmenter de nouveau les taux d'intérêt », a déclaré Philip Lane, dans un entretien au journal Le Monde publié sur le site de la BCE. « Ce n'est pas encore le moment d'arrêter », a-t-il ajouté.

Réponse le 4 mai, date de la prochaine réunion de l'institution monétaire. De son côté, Isabel Schnabel, membre du directoire de la BCE, a également laissé entendre que l'institution de Francfort n'hésiterait pas à procéder à de nouvelles augmentations de taux. « Il est clair que de nouvelles hausses de taux sont nécessaires, mais l'ampleur de ces hausses dépendra des données à venir », a-t-elle déclaré dans une interview au site Politico. En fonction de ces données, un relèvement de 50 points de base en mai « n'est pas exclu », a-t-elle dit.

Réduire la taille des dispositifs de soutien à l'inflation

En plus des efforts des banques centrales, le Fonds appelle également les pays européens à réduire leurs déficits budgétaires et la taille de leurs dispositifs de soutien à l'inflation pour accompagner le mouvement.

Concernant son endettement, l'Espagne fait notamment figure de bon élève puisque son gouvernement a fait savoir le 27 avril dernier qu'il s'engageait à passer son déficit public sous la barre des 3% du PIB dès 2024, contre 2025 jusque-là. Et ainsi de revenir un an plus tôt que prévu dans les clous du Pacte de stabilité imposé par Bruxelles, qui exige également que la dette publique ne représente pas plus de 60% du PIB des États membres.

De son côté, le gouvernement français prévoit de réduire le déficit public pour le faire passer résolument sous la barre des 3% du produit intérieur brut (PIB) à 2,7% en 2027. Après avoir atteint 4,7% en 2022, il devrait légèrement remonter cette année (4,9%) avant de commencer à refluer progressivement à partir de 2024. De son côté, le désendettement sera réduit à 108,3% du PIB à cette échéance, contre 111,6% fin 2022, un ratio de plusieurs points moins élevé qu'envisagé précédemment.

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Enfin, interrogé sur les risques pour la croissance, Alfred Kammer a souligné que le chômage restait faible en Europe et que l'économie européenne « était à pleine capacité ». Quant aux salaires, il n'y a pas jusqu'ici d'emballement constaté avec la hausse des prix. « Pour l'instant, nous avons vu des hausses plutôt modérées (...) et il y a un peu de marge pour des hausses de salaire ».

Au Japon, la banque centrale (BoJ) réfléchit à mettre fin à sa politique monétaire ultra-accommodante

La Banque du Japon (BoJ) a décidé ce vendredi de lancer un examen approfondi de sa politique monétaire actuellement ultra-accommodante, augurant de futurs changements majeurs sous la houlette de son nouveau gouverneur Kazuo Ueda, mais probablement pas de sitôt. La BoJ compte en effet prendre son temps pour mener à bien cet examen : de 12 à 18 mois. Elle a notablement cessé d'indiquer noir sur blanc que ses taux d'intérêt de court et long termes devraient rester « à leurs niveaux actuels ou plus bas ».

En attendant, l'institution a conservé comme prévu son taux d'intérêt négatif de 0,1% sur les dépôts des banques auprès d'elle, et n'a pas non plus modifié son outil non conventionnel le plus controversé, son contrôle de la courbe des rendements obligataires japonais à dix ans, qu'elle veut maintenir entre -0,5% et +0,5%.

L'inflation dans le pays a atteint 3% en 2022/23, un plus haut depuis 41 ans sous l'effet de la flambée des prix de l'énergie avec la guerre en Ukraine combinée à la chute du yen. Un pic de 4,2% a été atteint en janvier.

(Avec AFP)

Commentaires 2
à écrit le 28/04/2023 à 16:49
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Rien n'est plus simple que des monnaies locales qui "travaillent" les unes par rapport aux autres mais, gênent forcement le "commerce" mondialisé ! ;-)

à écrit le 28/04/2023 à 11:40
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lagarde va bien nous expliquer que c'est provisoire, donc des taux a 3% avec 10% d'inflation, c'est parfait, et en plus la bce peut financer la transition energetique pour sauver les ours quand la chine ouvre des centrales a charbon ( alors que soit ...

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