Airbus ajuste sa trajectoire et revoit ses prévisions de livraisons à la baisse

Engagé dans une folle course aux cadences, Airbus trébuche quelque peu. Soumis aux aléas d'une supply chain sous tension, le constructeur européen prévoit désormais de ne livrer que 700 appareils sur l'année. Et il a dû repousser de six mois son objectif de production de 65 avions de la famille A320 NEO par mois.
Léo Barnier
Airbus n'atteindre la cadence 65 pour l'A320 NEO qu'en 2024.
Airbus n'atteindre la "cadence 65" pour l'A320 NEO qu'en 2024. (Crédits : Regis Duvignau)

[Article mis à jour le 27/07/2022 à 21:00, avec les déclarations de Guillaume Faury et les résultats semestriels]

La révision est faible mais elle est marquante au moment où Airbus a fait de la montée en cadences son objectif prioritaire. Le constructeur européen vient de réduire sa prévision de livraisons sur l'année, à l'occasion de la publication de ses résultats semestriels, le 27 juillet. Alors qu'il visait jusque-là 720 appareils, il redescend son objectif à 700. L'impact se fera sentir également l'an prochain, avec un ajustement de sa trajectoire de montée en cadences pour la famille A320 NEO. L'objectif d'atteindre les 75 exemplaires par mois en 2025 reste en revanche inchangé.

La nouvelle couvait depuis quelques temps déjà. Malgré une accélération au mois de juin avec le chiffre conséquent de 58 livraisons, dont 53 monocouloirs, Airbus n'a pas réussi à atteindre le niveau de 2021 avec 77 avions. Et il avait déjà pris du retard sur les mois précédents avec moins de 50 avions en avril comme en mai. De fait, il n'a livré que 295 avions à fin juin 2022, contre 297 l'an dernier. Sur l'année entière, Airbus devrait tout de même faire mieux que l'an dernier, où il avait livré 611 appareils.

Le constructeur est pourtant engagé dans une remontée en cadence de grande ampleur depuis l'an dernier. Parti de 40 avions de la famille A320 NEO par mois, conséquence de la baisse brutale de la production en réponse à la pandémie de Covid-19 en 2020, il a atteint la cadence 45 fin 2021. Pour 2022, il devait atteindre 50 avions par mois en cours d'année, et enfin retrouver les niveaux d'avant la crise d'ici l'été 2023, avec 65 appareils mensuels.

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65 appareils par mois en 2024

Avec la révision opérée par Airbus, cet objectif n'est désormais espéré que début 2024. Un retard de six mois donc que Guillaume Faury, président exécutif d'Airbus, impute aux « perturbations persistances » qui secouent la chaine d'approvisionnement mondiale depuis la crise sanitaire.

« Nous avons mis à jour notre objectif de livraison d'avions commerciaux pour 2022 afin de refléter les défis actuels que nous constatons dans la chaîne d'approvisionnement », a-t-il ainsi déclaré. Et même s'il note quelques améliorations, il ajoute qu'avec « la poursuite de la guerre en Ukraine et des sanctions internationales associées, nous continuons à opérer dans une période d'incertitude et de volatilité ».

La montée en cadence de la famille A320 NEO reste sa « priorité absolue » en dépit d'un environnement complexe et difficile. « Notre équipe Airbus est pleinement engagée avec nos fournisseurs et nos partenaires et, si nécessaire, nous continuerons à adapter et à remodeler nos chaînes d'approvisionnement en fonction de l'évolution de la situation », a prévenu le dirigeant. Il estime néanmoins avoir lever les risques au maximum avec le nouveau plan de montée en cadence, en accord avec ses fournisseurs « en particulier mais pas seulement avec les motoristes ». Les discussions ont ainsi été nombreuses ces dernières semaines, y compris à Farnborough.

« Nous pensons que notre plan est raisonnablement solide. L'environnement est difficile et il est assez compliqué d'utiliser la boule de cristal habituelle. Cela semble ne plus fonctionner aussi bien. Blague à part, nous pensons qu'il reflète ce que nous pouvons faire en fonction de notre compréhension actuelle de cet environnement : l'état de l'industrie, la situation de la logistique dans le monde et du marché du travail, la capacité de chaque fournisseurs, surtout les plus critiques, à monter en puissance... », Guillaume Faury, président exécutif d'Airbus.

Et Guillaume Faury a confirmé que l'objectif de produire 75 appareils par mois en 2025 était toujours de mise. Celui-ci représente une accélération sans précédent pour l'industrie aéronautique. S'il était atteint, Airbus livrerait 900 appareils de la famille A320 NEO chaque année, sans compter les appareils long-courriers et la famille A220. Mais là aussi, la supply chain doit pouvoir suivre les ambitions du constructeur, certains équipementiers comme le motoriste Safran ayant exprimé des réserves à ce sujet.

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Impact sur les résultats

Malgré la révision à la baisse des livraisons, Guillaume Faury maintient ses objectifs financiers avec un résultat opérationnel ajusté de 5,5 milliards d'euros et un flux de trésorerie libre de 3,5 milliards d'euros, avant fusions et acquisitions et financement clients.

Mais cette difficulté à tenir le rythme se ressent dans les résultats. Le chiffre d'affaires semestriel progresse de 1 % par rapport à 2019, à 24,8 milliards d'euros, mais cela tient uniquement à la bonne performance des activités de défense (+26 %) d'Airbus Defence & Space et d'Airbus Helicopters. Seuls, les revenus des avions commerciaux reculent même de 2 %, à 17,5 milliards d'euros.

Le résultat opérationnel est également en recul, avec un bénéfice inférieur de 5 % à l'an dernier, à 2,6 milliards d'euros. Mais dans le cas présent, cela tient à une perte de rentabilité de la division Defence & Space, touchée par les retards d'Ariane 6. Elle avait pourtant amélioré son chiffre d'affaires, grâce entre autres à l'activité avions militaires et la signature du contrat Eurodrone en février. Le résultat net du groupe recule de 15 % à 1,9 milliard d'euros.

La bonne nouvelle vient des commandes. Avec 259 nettes, malgré 147 annulations, Airbus fait un sacré bond et multiplie par 7 son bilan par rapport au premier semestre 2021. Et encore, cela ne comprend pas la vente de 292 A320 NEO à quatre compagnies chinoises, annoncée début juillet et en attente de finalisation, ou les (plus modestes) contrats signés au salon de Farnborough la semaine dernière.

Airbus Defence & Space fait également un bond dans ce domaine avec 6,5 milliards d'euros de prises de commandes (+86 %), tandis qu'Airbus Helicopters progresse plus modestement avec 163 commandes nettes (+33 %).

Léo Barnier

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Commentaires 3
à écrit le 28/07/2022 à 8:23
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Qu'est-ce qui se passe avec la production d' A321 à Toulouse est-ce qu'elle a commencé?

à écrit le 28/07/2022 à 0:43
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Travailler chez air bus est la mort du rêve aéronautique !!! Sans parler des mentalités. Bye bye dream....

le 16/08/2022 à 2:12
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Jj'ai travaillé comme sous traitant dans l'aeronautique et tout le secteur etait tres correct.

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