Mobilité décarbonée  : comment Mobivia (Norauto, Midas, Carter Cash...) se réinvente

Le numéro un européen de l'entretien et de la réparation aux multiples marques (Norauto, Midas, Carter Cash, A.T.U, etc.) a créé près de Lille une « Move Factory », nouveau lieu totem dédié à l’innovation tous azimuts et pierre angulaire désignée de la mutation accélérée de son modèle économique vers l’électrification des mobilités et le serviciel (MaaS).
À  Villeneuve-d'Ascq (près de Lille), lors de l'inauguration de la « Move Factory » de Mobivia, dans l'atelier autotech de Car Studio où s'élabore la recherche et développement des marques Norauto, Midas, ATU et Auto 5.
À Villeneuve-d'Ascq (près de Lille), lors de l'inauguration de la « Move Factory » de Mobivia, dans l'atelier autotech de Car Studio où s'élabore la recherche et développement des marques Norauto, Midas, ATU et Auto 5. (Crédits : Public Address / Julien Briche)

La voiture, un logiciel à quatre roues ? « Avec un véhicule assisté, connecté et électrique, la réparation et l'entretien se complexifient, en nécessitant notamment de plus en plus l'échange de datas », justifie Matthieu Cauberghs, responsable projets R&D de CarStudio, l'accélérateur autotech de Mobivia, dont le but est de développer la transformation des marques​ Norauto, A.T.U, Midas et Auto 5.

« Notre fierté aujourd'hui, c'est d'avoir par exemple une mallette d'intervention multi-marques, qui sert de passerelle de communication entre la voiture et les logiciels des différents constructeurs, même avec de nouveaux entrants comme Tesla. »

Mobivia : l'ex-Norauto est devenu un groupe tentaculaire, présent dans 18 pays

L'arrivée ultra rapide de la voiture électrique sur le marché automobile a déjà complètement chamboulé le business model du tentaculaire groupe Mobivia.

Mobivia, c'est le nouveau nom d'un groupe dédié à l'entretien automobile dont l'aventure a commencé en 1970, avec un premier garage Norauto, ouvert par Éric Derville, le fondateur et père de l'actuel président du conseil d'administration Fabien Derville, à Englos, près de Lille. Cette enseigne Norauto, qui appartient à la galaxie des entreprises de la famille Mulliez (dont Auchan, Decathlon...), s'était ensuite développée dans les années 2000 par acquisitions et prises de participations.

Transformée en Mobivia en 2010, la nouvelle entité, présente dans 18 pays, compte aujourd'hui une dizaine de marques. D'abord en France, comme Midas (spécialiste de l'entretien de proximité et des services rapides automobiles toutes marques), Synchro Diffusion (accompagnement des professionnels du service automobile comme des stations services ou distributeurs stockistes automobiles depuis la conception de leur offre produits jusqu'à l'implantation en magasin) ou Vroomly (comparateur de prix, de réputation et de disponibilité de garages partout en France).

Mais aussi et surtout à l'échelle de l'Europe comme Carter Cash (implanté en Espagne, en Italie et au Maroc pour vendre des pneus, pièces détachées, produits d'entretien et quelques services d'entretien type pneus et vidange à prix bas toute l'année). Ou alors dans certains pays du continent, à l'image de Fifteen (leader européen des services de vélos partagés), Auto 5 (réseau de magasins libre-service et ateliers d'entretien et de réparation multi-marques en Belgique) ; ATU (numéro un allemand, racheté en 2016, avec plus de 530 ateliers-boutiques proposant une large gamme d'accessoires de mobilité et de pièces détachées de qualité en Allemagne) ; Bythjul (offre complète de pneus, de jantes et de roues montées implantée en Suède, Norvège et en Finlande), Skruvat.se (e-commerce de pièces et d'accessoires automobiles, présent en Suède et en Norvège).

Le passage à l'électrique : moins de réparations, plus de compétences

La majorité du chiffre d'affaires de ces enseignes est historiquement centré sur le modèle thermique. Or, avec l'arrivée des moteurs électriques, le métier originel de Mobivia, la réparation automobile, va connaître une profonde transformation.

En effet, la voiture électrique comporte une batterie, un système de transmission sans boîte de vitesse et... beaucoup d'électronique.

Terminé les vidanges, changements de courroie de distribution ou d'alternateurs, panne de bougies, réglages de carburateurs ou d'injecteurs, changements de pots d'échappement, etc. Même les boîtes de vitesse automatiques préservent l'embrayage.

Restent les pneus, amortisseurs, essuies-glaces à changer régulièrement mais, même les plaquettes de freins s'usent moins vite car les systèmes de récupération d'énergie au freinage les préservent plus longtemps. Revers de la médaille, la voiture électrique exige en revanche des compétences bien plus pointues, notamment en matière d'informatique et d'électronique.

« Connect, project, talent », le leitmotiv de la « Move Factory »

Mais même avant même la crise du Covid-19, Mobivia commençait à perdre de l'argent : en 2019, l'exercice affichait 28 millions de perte (contre 30 millions de bénéfice en 2018), pour un chiffre d'affaires de 3,2 milliards d'euros, dont plus de la moitié réalisé à l'international.

C'est pourquoi le groupe nordiste s'est « connecté » à 22 jeunes pousses, incubées notamment au sein de Via ID, son « accélérateur » de startups de la mobilité durable et de l'autotech. Notamment, des pépites prometteuses comme iWip (filières de recyclage des produits usagés issus de la réparation automobile, ou Black-Star (pneumatiques reconditionnés avec ouverture d'une unité de rechapage à Béthune).

C'est dans ce contexte que s'insère la création de la « Move Factory », inaugurée début décembre, et dont Mobivia, qui en est locataire, a fait son nouveau siège. Ce « lieu totem » incarne la volonté de centralisation de la réflexion autour de la transformation des mobilités avec un leitmotiv : « connect, project, talent ».

« Le groupe fonctionnait déjà en écosystème mais, désormais, ce bâtiment Move Factory nous donne la possibilité de rayonner plus loin que nos propres entreprises », résume Florence Sanson, directrice générale de CarStudio Innovation, qui se présente comme « leader innovation ».

Une pépinière à idées et projets pour tout l'écosystème

C'est en 2018 qu'avait émergé l'idée de centraliser tous les acteurs gravitant autour de Mobivia dans un seul et même lieu, déployant 18.000 m2 d'espaces de travail, dont 600 m2 d'ateliers pour de la mécanique traditionnelle mais aussi autour des mobilités douces, hybrides et autres nouvelles technologies.

« Ce lieu de travail se veut à la fois inspirant pour l'ensemble de nos 1.200 collaborateurs de la métropole lilloise qui sont désormais réunis en un seul et même lieu », décrit Alexandra Schiltz, directrice du projet de Move Factory, « mais l'espace entend aussi être un lieu de corpoworking [*], avec espaces de travail clef en main à destination de tous les acteurs de la mobilité. »

Parmi les membres de cet écosystème extra-Mobivia, on trouvera par exemple le cabinet conseil Bartle, mais aussi Bpifrance, Cap Digital (pôle de compétitivité et de transformation numérique), EDF, E-Totem (service de recharge pour véhicules électriques), EVzen (bornes de recharge), G'Impacte (mesure des impacts), Hello Lille (agence d'attractivité de la métropole), i-Trans (pôle de compétitivité à vocation mondiale de la région Hauts-de-France, dédié aux transports et à la logistique), OuiKeep (pièces auto issues de l'économie circulaire), Platana (digitalisation du service après-vente) ou encore CCI France International.

Cap sur la « mobilité servicielle » (ou MaaS, Mobility-as-a-Service)

Le groupe n'a eu de cesse d'étendre son champ d'action, avec par exemple Mobivia Fleet Solutions (aide à la gestion des flottes de véhicules), Mobivia Data Base (collecte, traitement et analyse de données), Mobivia Supply Solutions (logistique de pièces détachées), etc. Avec pour objectif de faire évoluer Mobivia vers des activités annexes, comme les solutions de chargement des véhicules électriques, l'économie circulaire autour des pneus, la gestion de la data pour la conduite, etc.

En visant ce nouveau domaine qu'on appelle « la mobilité servicielle » (décrite par l'acronyme MaaS pour Mobility-as-a-Service), le groupe Mobivia vise désormais aussi tous les nouveaux services numériques dont l'usager peut avoir besoin, s'engageant à « accompagner la mobilité des hommes, en anticipant les nouveaux moyens de déplacements, en faisant émerger de nouvelles formes de collaboration, avec notamment des mobilités plus vertueuses ».

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(*) Corpoworking : contraction de corporate et de coworking, désigne une déclinaison de l'espace de travail collaboratif - où quand le coworking s'invite dans l'entreprise même.

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Commentaire 1
à écrit le 27/01/2023 à 15:33
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Mobivia semble lentement se positionner comme un interlocuteur crédible alternatif pour l'entretien et la réparation des Véhicules Electriques pendant que les concessions traditionnelles avancent à reculons sur le sujet. Maintenant que le marché déco...

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