Présentiel, télétravail, tiers-lieu : le bureau déconfiné se cherche encore

Selon une enquête de la chaire Workplace Management de l'ESSEC, que La Tribune s'est procurée en avant-première, les salariés ont une préférence pour les espaces de travail avec peu de collègues autour. En revanche, selon leur catégorie d'appartenance, le choix de l'endroit n'est pas le même.
César Armand
(Crédits : Pixabay / CC)

"Le bureau n'a pas dit son dernier mot !" Ce constat est signé Ingrid Nappi, professeure-chercheuse à l'ESSEC, titulaire de la chaire Workplace Management et auteure d'une enquête sur 2.643 répondants réalisée entre le 7 et le 20 septembre.

Des bureaux avec peu de collègues

"Le travail va évoluer avec la généralisation du télétravail, mais le bureau sera toujours essentiel pour les organisations. Il est l'élément qui rassemble toutes les dynamiques et les acteurs de l'entreprise", poursuit-elle.

De sa première étude réalisée en avril dernier en plein confinement, il ressortait que quel que soit l'âge du salarié, il imaginait son bureau post-Covid comme un mix entre un peu plus de télétravail et de l'open space avec des postes de travail affectés, où l'on peut décider de la distance. Aujourd'hui, la majorité des employés de bureau (55%) est de retour au bureau physique et constate que le présentiel fonctionne avec le télétravail. En six mois, leurs principales attentes n'ont pas changé: ils demandent l'adaptation des espaces collectifs aux règles d'hygiène et sécurité, et le respect des règles de distance de sécurité entre collègues. En résumé, des espaces avec peu de voisin(e)s autour.

Une forte envie de déménager

Dans le même temps, est-ce que la possibilité de travailler n'importe où a changé leurs besoins professionnels et même leur vie personnelle au point de leur donner envie de déménager ? Sans surprise, 71% de ceux vivant en appartement en expriment le souhait, de même que la moitié d'entre eux privilégierait le milieu rural ou la petite ville. Sous réserve bien sûr que leur entreprise leur offre la possibilité de télétravailler ou de se rendre dans un tiers-lieu.

Dans ces conditions, quelle serait la répartition idéale de leur temps de travail entre le bureau, la maison et le tiers-lieu ? "Les grandes tendances commencent à prendre forme", relèvent la professeure Ingrid Nappi. Dans ce domaine, il existe deux "associations significatives". La première porte sur l'emplacement géographique. Seulement un tiers (34%) des Franciliens optent pour le bureau individuel devant le télétravail (23 %), contre 45% des Français. La seconde repose sur le poste hiérarchique occupé: 58% des directeurs choisissent le bureau individuel contre 39% pour les autres collaborateurs.

Le cas des fonctionnaires

Au regard de cette enquête, les fonctionnaires restent par ailleurs des travailleurs à part. 48% d'entre eux souhaitent exercer dans un bureau individuel, contre 38% dans le secteur privé. De même, seuls 2% définissent le flex office - sans bureau fixe - comme l'idéal. C'est deux fois moins que les autres.

"Nous étions très surpris par ces résultats, mais je dirais que la question de l'appropriation de l'espace de travail (besoin d'un espace de travail attitré) et l'importance que les répondants attribuent au bureau comme élément qui permet de participer à la vie de l'entreprise, socialiser, et travailler, jouent un rôle très important", décrypte Ingrid Nappi.

Les Franciliens "plus réceptifs" aux tiers-lieux

Qu'en est-il justement des tiers-lieux, ces endroits qui mêlent espaces de travail partagé, laboratoires de recherche ou encore incubateurs de jeunes pousses, et redevenus la passion des promoteurs immobiliers ? Dans la continuité d'acteurs comme Covivio qui a créé sa filiale Wellio, Nexity a par exemple annoncé fin septembre vouloir créer des "espaces partagés" dans toutes ses futures copropriétés, ainsi que 100 à 150 "espaces intermédiaires" baptisés "Miniburo" dans les villes d'Ile-de-France de plus de 20.000 habitants.

Selon l'étude, les Franciliens s'avèrent effectivement "plus réceptifs" que les habitants des autres métropoles régionales et des petites villes quant à travailler dans un tiers-lieu. Les cadres dirigeants souhaitent de même y passer davantage de temps que les autres (10% de leur temps contre 6%). Idem avec la génération Z (née à partir de 1995, NDLR) avec 12% d'entre eux, versus 5 à 7% pour les autres tranches d'âge. Là encore, la préférence s'opère selon la catégorie d'appartenance du répondant.

"Nous avons pu mener une recherche académique rigoureuse qui soulève de nouvelles problématiques tant territoriales que managériales, notamment concernant les tiers-lieux qui contrairement à toute attente semblent désormais très peu plébiscités par les employés de bureau", conclut l'enseignante-chercheuse.

Toutes ces débats risquent d'en soulever d'autres en matière d'aménagement des collectivités territoriales. A l'heure des nouveaux mandats communaux et intercommunaux qui s'ouvrent, ces questions devront toutefois être tranchées dans les prochains mois.

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Synthèse de l'étude

Bureau

César Armand

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