Climat : mobilisation inédite des banques centrales à quelques mois de la COP26

Christine Lagarde, Jerome Powell, François Villeroy de Galhau et autres banquiers centraux se réuniront les trois prochains jours pour évoquer comment ils peuvent aller plus loin pour contribuer à la lutte contre le changement climatique. Un rendez-vous clé en amont de la COP26 qui se tiendra en novembre prochain à Glasgow.
Juliette Raynal
La Banque de France organise une conférence inédite, The Green Swan Conference, du 2 au 4 juin prochain, pour définir comment le secteur financier peut prendre des mesures immédiates contre les risques liés au changement climatique.
La Banque de France organise une conférence inédite, The Green Swan Conference, du 2 au 4 juin prochain, pour définir comment le secteur financier peut prendre des mesures immédiates contre les risques liés au changement climatique. (Crédits : CHARLES PLATIAU)

Comment, dans la pratique, le secteur financier peut-il prendre des mesures immédiates contre les risques liés au changement climatique ? Pour apporter des éléments de réponse à cette vaste question, la Banque de France organise une conférence inédite, The Green Swan Conference, du 2 au 4 juin prochain, en partenariat avec la BRI, souvent présentée comme la banque centrale des banques centrales, et le Fonds monétaire international.

Ce rendez-vous, décisif à quelques mois de la COP26 de Glasgow marquée par le retour des Etats-Unis dans les négociations, réunira notamment le gouverneur de la Fed Jerome Powell, le gouverneur de la Banque centrale de Chine Yi Gang, ou encore François Villeroy de Galhau, à la tête de la Banque de France, et Christine Lagarde, présidente de la BCE.

« Mobilisation exceptionnelle »

« Les banques centrales vont s'exprimer sur comment elles peuvent aller plus loin pour contribuer à la lutte contre le changement climatique », a expliqué Nathalie Aufauvre, directrice générale de la stabilité financière et des opérations à la Banque de France, lors d'un point presse ce mardi 1er juin. « La mobilisation des banques centrales et des superviseurs est exceptionnelle. Rarement, on a pu observer un mouvement aussi rapide des banques centrales que celui sur le changement climatique », a-t-elle poursuivi.

Les prémices de l'implication des banques centrales dans la lutte contre le changement climatique remontent à septembre 2015. Mark Carney, alors directeur de la banque d'Angleterre, prononce un discours qui marque les esprits « briser la tragédie des horizons ». L'objectif est de jeter un pont entre les intérêts de court terme et de long terme de la finance, aujourd'hui contradictoires. Lors de ce discours, le gouverneur alerte les investisseurs sur une classe de risque d'un nouveau genre : le risque climatique, qu'il soit physique (impact financier des catastrophes naturelles), juridique (procès intentés par les victimes du changement climatique) ou liés à la transition vers une économie bas carbone (dépréciation des actifs liés aux énergies fossiles).

La Banque de France comme moteur

La mobilisation des banques centrales sur le sujet s'accélère fin 2017 sous l'impulsion de la Banque de France, qui lance le réseau pour le verdissement du système financier (plus connu sous son acronyme anglais NGFS). Il regroupe aujourd'hui 90 membres, contre huit à ses débuts.

Ses premiers travaux consistent à démontrer que la question du changement climatique entre bien dans le mandat des banques centrales, dont l'objectif principal est d'assurer la stabilité du système financier et d'identifier les risques qui pèsent sur le système financier.

« Nous restons dans notre mandat car le risque climatique constitue une source de risque financier qui peut avoir un impact potentiel sur la stabilité financière. Le changement climatique peut aussi avoir un impact sur la croissance économique et l'inflation, ce qui nécessite une réponse adaptée de la politique monétaire des banques centrales », explique Nathalie Aufauvre, qui préside également le nouveau Centre sur le changement climatique de la Banque de France.

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Le risque d'un choc stagflationniste

Les banquiers centraux redoutent, en effet, un choc stagflationniste lié au changement climatique, avec une réduction de la croissance économique sous l'effet de la baisse de la productivité et, en même temps, une hausse des prix via une perturbation des chaînes de production.

« Nous avons un énorme travail à réaliser sur la modélisation, qui nous permet de faire des prévisions », explique Nathalie Aufauvre.

Lors des trois prochaines journées de conférence, les banquiers centraux se pencheront aussi sur la question de la transparence et l'accès crucial aux données sur l'engagement des institutions financières et des entreprises vers une économie bas carbone.

L'épineux exercice des stress tests climatiques

Ce sera aussi l'occasion d'échanger sur les stress tests climatiques, une première mondiale menée par la Banque de France et l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) auprès de neuf groupes bancaires et quinze groupes d'assurance, dont les résultats ont été dévoilés il y a un mois.

Lors de cet exercice, « nous avons pu voir à quel point il était difficile de se projeter 30 ans en avant, de prendre en compte les différences sectorielles et d'imaginer la réponse des banques et des acteurs économiques à des chocs climatiques. Nous apprenons en faisant », a résumé Nathalie Aufauvre.

Juliette Raynal

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