Électricité : ces moyens pour faire baisser la facture des entreprises

Confrontées à la flambée des prix de l'énergie, une entreprise de taille intermédiaire sur dix envisagerait de diminuer, voire d'arrêter son activité cet hiver, selon le Mouvement des entreprises de taille intermédiaires (Meti). Sans effet immédiat, des solutions existent toutefois pour alléger sa facture énergétique, à l'instar de l'autoconsommation, ou encore des PPA, ces contrats d'électricité à long terme.
Maxime Heuze
Les prochaines factures risquent d'être salées pour les entreprises qui souscriront à de nouveaux contrats cet hiver.

La période de septembre et décembre est traditionnellement une grosse période de renouvellement des contrats d'énergie fixes des entreprises, qui s'étalent en général sur une période de un à trois ans. Or, cette année, cette période tombe très mal puisque les prix de l'électricité sur le marché de gros (qui influence le prix des contrats fixes) se situent entre 350 et 450 euros le mwh, soit des prix dix fois supérieurs à ceux d'il y a un an.

« Un chef d'entreprise qui réalise 100 millions d'euros de chiffre d'affaires annuel nous a expliqué qu'avec les nouveaux contrats, il allait passer d'une facture énergétique annuelle de 5 millions d'euros à 20 millions d'euros. Ça va sérieusement rogner sur ses marges », alerte Alexandre Montay, délégué général du Mouvement des entreprises de taille intermédiaires (Meti).

 Lire aussi : Électricité : les prix risquent de tripler en France cet hiver

Face à l'urgence de la situation « certains chefs d'entreprise qui voient leurs contrats s'arrêter au 1er janvier nous disent qu'ils vont essayer de beaucoup produire avant la fin de leur contrat pour stocker puis arrêter leur production cet hiver (à l'image de l'entreprise Duralex) plutôt que de produire à perte à cause d'un prix de l'énergie beaucoup trop fort », confie Laurent Petizon, consultant chez le cabinet de conseil AlixPartners.

Une entreprise sur dix pourrait arrêter son activité cet hiver

Le Meti estime qu'une ETI sur dix envisage de diminuer voire d'arrêter leur activité cet hiver. Comment éviter la fermeture en série des usines cet hiver? « Il n'y a pas de solution à part plafonner en urgence le prix de l'électricité entre 120-130 euro mwh et cela doit se jouer à Bruxelles », martèle le délégué général du Meti.

Si de nombreuses entreprises semblent condamnées à acheter cet hiver un électron hors de prix faute de plafonnement mis en place, pour celles qui ont la chance d'être couvertes jusqu'à fin 2023, les possibilités pour diminuer sa facture d'électricité dans les prochaines années existent.

L'autoconsommation pour alléger la facture des entreprises

La première des solutions pour alléger le poids de l'énergie, dans le bilan des entreprises, s'appelle l'autoconsommation. Installer des panneaux solaires sur son toit ou sur un terrain bordant son usine peut être un bon moyen pour les entreprises, qu'elles soient très petites ou gigantesques, d'alléger leur facture énergétique pendant plusieurs dizaines d'années.

« Beaucoup d'entreprises étaient en réflexion depuis quelques années, mais la crise actuelle pourrait compromettre leurs projets d'autoconsommation à cause du manque de visibilité sur leur future trésorerie. Installer des panneaux solaires dans une entreprise coûte en général plusieurs millions d'euros et il faut compter 24 mois entre le début des travaux d'un parc et sa mise en activité », regrette le délégué général du Meti. Pour redonner un élan d'investissement dans les ENR, l'association des ETI souhaite mettre en place un mécanisme de suramortissement (un avantage fiscal) pour les entreprises qui installeraient un parc éolien ou solaire.

Lire aussi : Hausse du prix de l'électricité, cette situation va-t-elle durer ?

Le développement de l'électricité hyper-locale est aussi freiné par des problèmes réglementaires pour le Meti. « Il faudrait assouplir la revente du surplus de l'électricité produite par les entreprises qui est aujourd'hui trop contraignante et établir un cadre assurantiel pour les installations renouvelables car nous faisons face à des refus pour assurer les panneaux solaires installés sur les toits des usines », ajoute Alexandre Montay.

Le contrat d'achat d'électricité verte à long terme (PPA)

Si la première solution semble encore incertaine face aux problèmes de trésorerie des entreprises, le power purchase agreement (PPA), aussi appelé contrat d'électricité à long terme, est aussi un bon moyen pour diminuer la facture d'électricité des entreprises françaises dans le futur.

Un PPA n'est autre qu'un contrat d'achat d'une certaine quantité d'électricité pendant une période de 15 ou 20 ans, « avec une décote de 15 à 30% par rapport aux contrats traditionnels », présente Laurent Petizon. Ce système, mis en place par les producteurs d'énergie (Engie, Iberdrola, Total), leur permet de construire un parc solaire ou éolien en étant assuré de pouvoir vendre leur production à un prix fixe sur une longue période, et ainsi rentabiliser leur investissement. « Le prix du mwh représente en fait le coût de construction et n'est pas corrélé au marché de gros », précise le consultant. Adieu les pic à 500 euros le mwh, le PPA propose un électron à moins de 100 euros.

Les nombreux avantages du PPA semblent séduire en ces temps difficiles. « Quelques ETI avaient déjà sauté le pas il y a quelques années mais on voit vraiment un regain d'intérêt en ce moment », constate Alexandre Monday. En 2021, Orange a par exemple signé un contrat à long terme avec Engie. Le producteur va construire deux installations photovoltaïques dans les Hautes-Alpes et va commencer à fournir de l'électricité à Orange à partir du 1er janvier 2023.

Les limites du PPA et des énergies renouvelables

Si ce type de contrat est idéal sur de nombreux points, il n'est pas parfait non plus. D'abord car il faut compter 2 ans entre la souscription à un PPA et la production des premiers électrons du parc construit pour l'occasion. Ensuite, mieux vaut bien regarder les petites lignes car il existe trois types de contrats et une multitude d'options : le PPA physique on-chain, où le client est directement relié à la centrale renouvelable ; le PPA physique off-chain où l'électricité produite par la centrale passe par le réseau pour rejoindre les bâtiments de l'entreprise et le PPA virtuel ; ou encore un contrat commercial qui ne garantit pas que le client recevra les électrons de la centrale renouvelable.

« En fonction des conditions inscrites dans le contrat, l'entreprise pourrait ne pas avoir de compensation d'énergie du réseau les jours où le parc ne produit pas assez d'électricité pour subvenir aux besoins du client. Il y a aussi un risque de faillite du fournisseur qui pourrait obliger l'entreprise à acheter en urgence de l'électricité sur le marché de gros, donc, à prix fort », prévient Emmanuel Fages, consultant chez le cabinet Roland Berger.

Le contrat vert de long terme ne convient pas non plus à tous types d'entreprises. « Pour les électro-intensifs, le PPA pourrait devenir un complément marginal de 10 à 15% de leur consommation électrique. Mais nous n'aurons jamais assez d'énergies renouvelables en France pour financer toute la production industrielle. Il n'y a que le nucléaire qui a cette capacité », nuance Nicolas de Warren, président de L'Union des Industries Utilisatrices d'Énergie (Uniden).

Pour le reste des entreprises, le PPA sonne tout de même comme une solution d'avenir. A condition qu'il y ait assez d'énergies renouvelables. Un coup de pouce va devoir être donné à la construction des parcs éoliens et solaires d'après le Meti et les consultants interrogés. C'est justement l'objectif du projet de loi du gouvernement «relatif à l'accélération de la production d'énergies renouvelables» qui a été présenté lundi 26 septembre en conseil des ministres.

Maxime Heuze

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Commentaire 1
à écrit le 30/09/2022 à 16:14
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Faire une pause dans 'la politique de l'offre' et attendre la confiance des consommateurs n'est pas une forcément une mauvaise idée, il n'y a que "le capricieux" pour s'inquièter de sa bêtise !

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