L'électricité dans le monde n'est pas plus propre aujourd'hui qu'avant la pandémie. Le dernier rapport du think tank allemand Ember montre que la croissance des énergies renouvelables (le solaire et l'éolien représentent désormais plus de 10% du mix électrique mondial) n'est pas parvenue à compenser la hausse de la demande mondiale d'électricité au premier semestre 2021. Résultat : le recours au charbon, un combustible fortement émetteur, a été plus important, ce qui a conduit mécaniquement à une hausse des émissions de CO2 du secteur.
Selon l'étude, qui s'est penchée sur les données de production électrique de 63 pays à travers le monde, les émissions de carbone ont augmenté de 5% au premier semestre 2021, par rapport au premier semestre 2019. Dopée par la reprise économique, la demande mondiale d'électricité a, elle aussi, augmenté de 5% au cours des six premiers mois de l'année par rapport au premier semestre 2021. Mais, 43% de cette hausse a été couverte par de l'électricité produite à partir de charbon, ce qui explique la poussée des émissions de gaz à effet de serre.
Les conclusions du think tank allemand confirment ainsi le message d'alerte lancé un peu plus tôt dans l'été par l'Agence internationale de l'énergie (AIE). Cette dernière anticipe, pour l'année 2021, un rebond bien plus rapide de la demande mondiale de courant que la croissance des énergies renouvelables pour produire cette électricité. L'agence s'attend ainsi à ce que la moitié de la hausse de la demande soit comblée par des combustibles fossiles. D'après ses prévisions, les émissions de gaz à effet de serre associées devraient grimper de 3,5% sur la totalité de l'année, puis de 2,5% en 2022 - aboutissant à un niveau record.
En Chine, les centrales à charbon se multiplient
Comme l'AIE, l'étude d'Ember montre que la hausse de la demande mondiale d'électricité est largement tirée par la Chine où la demande a progressé de 14% au premier semestre 2021. "Seulement 29% de cette augmentation a été couverte par les énergies éolienne et solaire, tandis que 68% l'a été par le recours au charbon", note l'étude. Résultat, les émissions du secteur électrique chinois ont également progressé de 14%.
Problème, cette tendance n'est pas prête de s'arrêter tant les projets de centrales à charbon se multiplient. Selon le dernier décompte réalisé par Carbon Tracker, quelque 368 centrales à charbon sont actuellement en cours de construction dans le pays pour une capacité totale de 187 gigawatts.
A cela s'ajoute, l'arrêt, pour une durée indéterminée, d'un des deux réacteurs EPR de la centrale nucléaire de Taishan, après la survenue d'un problème d'étanchéité de quelques crayons combustibles.
Et la Chine, n'est pas le seul pays à recourir encore massivement au charbon. Toujours selon Carbon Tracker, environ 230 centrales devraient prochainement voir le jour en Inde, en Indonésie, au Japon et au Vietnam. Ces cinq pays asiatiques concentrent ainsi 80% des nouvelles centrales au charbon prévues dans le monde.
Une électricité plus propre dans l'UE
L'étude du centre de réflexion Ember ne dresse pas un tableau totalement noir de la situation. Plusieurs régions du monde ont, en effet, vu leurs émissions liées à la production électrique diminuer. A chaque fois, cependant, cette baisse des émissions était accompagnée d'une baisse de la demande électrique. C'est le cas notamment aux Etats-Unis, au Canada, dans l'Union européenne ou encore en Australie et au Japon.
Sur le Vieux continent par exemple, les émissions de CO2 ont chuté de 12% au cours du premier semestre 2021 par rapport à la même période en 2019. La demande d'électricité chute, elle aussi, au cours de cette période, mais de manière beaucoup plus contenue. Elle n'a diminué que de 1%.
Cette bonne performance s'explique par un recours au charbon en baisse de 16% au premier trimestre 2021. Désormais, l'éolien et le solaire représentent plus de 20% du mix électrique de l'UE.
On notera que la France, dont le mix électrique fait partie des plus décarbonés, régresse. Selon les données d'Ember, les émissions liées au secteur électrique y ont augmenté de 4%, malgré une demande en repli de 0,7 %. Cela s'explique notamment par une moins grande disponibilité du parc nucléaire, dont le calendrier de maintenance a été chamboulé par la pandémie.
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