Gaz : la suspension du Nord Stream 2 pourrait coûter près de 1 milliard d'euros à Engie

La suspension du gazoduc Nord Stream 2, suite aux sanctions contre la Russie, expose de nombreuses compagnies énergétiques européennes au regard du montage financier ayant permis de financer cette infrastructure de plus de 11 milliards d'euros. Le groupe français Engie annonce une exposition à un risque de crédit de 987 millions d'euros.
Outre Engie, OMV, Wintershall Dea, Uniper et Shell ont investi dans cette infrastructure pharaonique, dont le montant total est de 11 milliards d'euros.
Outre Engie, OMV, Wintershall Dea, Uniper et Shell ont investi dans cette infrastructure pharaonique, dont le montant total est de 11 milliards d'euros. (Crédits : STEPHANE MAHE)

987 millions d'euros. C'est le montant de l'investissement de l'entreprise française Engie dans le gazoduc Nord Stream 2. Environ un milliard d'euros de financement qui l'expose à une perte sèche. Car les préparatifs militaires pour l'invasion de l'Ukraine et finalement l'assaut donné par l'armée russe la semaine dernière ont précipité le sort de cette installation qui a une capacité de 55 milliards de m3 annuels et qui était prête à entrer en fonction. Ce tube sous-marin de 1.230 kilomètres d'une valeur de 11 milliards de dollars a été achevé fin 2021, mais n'avait pas encore été mis en service dans l'attente d'une certification de l'Allemagne.

"Engie en tant que prêteur est exposé à un risque de crédit pour un montant maximal de 987 millions d'euros qui pourrait se matérialiser notamment en cas de dépôt de bilan, a indiqué dans un communiqué le groupe.

Les questions autour de la participation d'Engie dans ce projet se multiplient ces derniers jours. Mardi matin, le ministre français de l'Économie Bruno Le Maire, interrogé sur les activités des géants hexagonaux TotalEnergies et Engie en Russie, avait estimé qu'il y avait désormais "un problème de principe à travailler" avec toute personnalité proche du pouvoir russe.

Au sujet d'Engie, Bruno Le Maire a estimé que le sujet était "un peu différent", car le groupe français a converti sa participation dans le projet en un "prêt". Cela n'a toutefois pas empêché une chute du titre Engie en Bourse mardi à la suite des propos du ministre : l'action Engie perdait plus de 13% en fin d'après-midi. Ce jeudi matin, le titre cédait encore 4,5%, à 11,58 euros.

"Nos liens commerciaux avec la Russie portent sur des contrats d'approvisionnements de gaz" et "sur la période récente, nous avons augmenté nos achats de gaz d'origine norvégienne et de GNL", a indiqué Engie dans une déclaration, soulignant n'avoir "pas d'activité industrielle en Russie".

Défaillance en cascade

Concernant Nord Stream 2, Berlin avait finalement annoncé la suspension du chantier pharaonique sur lequel elle comptait accomplir sa transition énergétique. Une décision qui fait renaître le débat sur la nécessité de l'atome nucléaire Outre-Rhin tandis que la consommation de charbon repart à la hausse.

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Ce projet a été co-financé par plusieurs groupes énergéticiens européens : outre Engie, OMV, Wintershall Dea, Uniper et Shell ont investi dans cette infrastructure pharaonique.

Si le groupe français évoque pour le moment seulement un "risque", plusieurs acteurs du projet ont déjà annoncé des conséquences concrètes de la suspension du projet.
L'opérateur du gazoduc germano-russe Nord Stream 2, basé dans le canton suisse de Zoug, a déposé le bilan, victime des mesures de rétorsion.

L'énergéticien Wintershall Dea, un des groupes allemands impliqués dans le gazoduc Nord Stream II, a de son côté annoncé mercredi passer dans ses pertes son investissement d'un milliard d'euros dans le projet gelé sine die, refusant également tout nouveau projet en Russie. La direction "a décidé de ne pas avancer ou mettre en oeuvre de nouveaux projets de production de gaz et de pétrole en Russie et de comptabiliser une dépréciation d'un montant total d'environ un milliard d'euros pour son financement de Nord Stream 2", selon un communiqué. Le groupe va par ailleurs "suspendre à effet immédiat les paiements envers la Russie".

L'épineuse question des sanctions sur le gaz russe

Alors que les sanctions s'accumulent contre les entreprises russes, la suspension de Nord Stream 2 semble plutôt symbolique. Car, sur le terrain de l'énergie, et alors qu'une partie de l'Europe est dépendante du gaz russe, les mesures de rétorsions sont moins directes. Pour preuve, alors que l'Union européenne a exclu sept banques russes du réseau Swift, le géant russe Gazprom a été épargné. En dépit de la crise actuelle, la Russie continue aujourd'hui d'injecter via des pipelines ce combustible fossile à l'Europe, qui ne se presse pas pour arrêter ces échanges. "Impossible de s'en passer dans l'immédiat", affirmait même la semaine dernière le PDG de TotalEnergies, Patrick Pouyanné.

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Mais Engie indique par ailleurs qu'il se "conformerait en tout point" à d'éventuelles sanctions qui auraient un impact sur la poursuite des approvisionnements russes, qui représentent 40% du gaz importé en Europe.

"Dans ces circonstances exceptionnelles, les autorités de régulation et gouvernements seraient amenés à prendre des mesures face aux très fortes tensions à prévoir sur l'approvisionnement à l'horizon 2022/23 et le groupe travaillerait étroitement avec les autorités", indique le groupe. Engie précise : "utilise(r) toutes les opportunités possibles pour continuer à sécuriser son approvisionnement" et rappelle disposer de contrats de long terme avec plusieurs pays, outre la Russie (Norvège, Pays-Bas, Algérie, Etats-Unis).

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Commentaires 5
à écrit le 07/03/2022 à 17:27
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Enfin on parle de gens qui se fond massacrés par un dictateur meme s'il a du gaz il reste un dictateur et des enfants n'ont pas besoin de ca pour grandir quils soient D'Alep de Kiev ou de BAMAKO les grandes succes story du Kamarad Vadimir

à écrit le 04/03/2022 à 18:25
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Au dernière nouvelle ce n'est pas la France, ni l'Europe qui a décidé de rentrer en conflit avec la Russie, bien au contraire. On a fermé les yeux autant que l'on pouvait, jusqu'à ignorer les milices pro-russe qui sont en guerre avec l'Ukraine depuis...

à écrit le 04/03/2022 à 1:15
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Encore une success story au palmarès du président sortant...

à écrit le 03/03/2022 à 15:30
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Les marines Finlandaise et Suédoise procèdent à des manoeuvres communes dont un des objets est la destruction immédiate du North-Stream-II en cas d'agression Russe !

à écrit le 03/03/2022 à 14:34
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il faudra que l'etat francais compense a l'euro pres, vu qu'il est responsable

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