Gaz russe : les livraisons via Nord Stream ont repris mais à un rythme toujours inquiétant pour l'Europe

Après onze jours de maintenance programmée sur le gazoduc clé reliant la Russie à l'Allemagne, l'opération touche à sa fin, a annoncé jeudi le gestionnaire de l'équipement. Nord Stream 1, dont dépend la sécurité énergétique de l'Europe, est emblématique de la dépendance du continent aux matières premières de Moscou et indispensable au Vieux Continent pour éviter une crise énergétique cet hiver.
Après dix jours d'entretien annuel, les livraisons ont bien repris vers 6 heures (heure de Paris) jeudi dans cette conduite qui relie directement les champs gaziers sibériens au nord de l'Allemagne, d'où le gaz est ensuite exporté à d'autres pays européens.
Après dix jours d'entretien annuel, les livraisons ont bien repris vers 6 heures (heure de Paris) jeudi dans cette conduite qui relie directement les champs gaziers sibériens au nord de l'Allemagne, d'où le gaz est ensuite exporté à d'autres pays européens. (Crédits : HANNIBAL HANSCHKE)

 « Il fonctionne » a déclaré un porte-parole de la société Nord Stream a propos du gazoduc qui relie la Russie à l'Allemagne. Après dix jours d'entretien annuel, les livraisons ont bien repris vers 6 heures (heure de Paris) dans cette conduite qui relie directement les champs gaziers sibériens au nord de l'Allemagne, d'où le gaz est ensuite exporté à d'autres pays européens.

Dans le contexte de la guerre en Ukraine et du bras de fer entre Moscou et les Occidentaux sur l'énergie, aucun scénario n'était pourtant écrit et l'Europe s'était préparée à ce que l'énergéticien Gazprom, propriétaire du gazoduc, coupe le robinet pour de bon ou réduise davantage le débit. Le gazoduc, qui représente plus d'un tiers des exportations de gaz naturel russe vers l'Union européenne, était en maintenance annuelle depuis le 11 juillet.

D'après l'opérateur allemand du réseau, le pipeline devrait livrer 530 GWh durant la journée. Soit seulement 30% de ses capacités, selon le patron de l'Agence allemande des réseaux, Klaus Müller. Il s'agirait de dix points de moins qu'avant les travaux. Le géant russe a déjà drastiquement réduit depuis mi-juin ses flux vers l'Europe et avant la maintenance il était à 40% de sa capacité. Insuffisant pour garantir l'approvisionnement des particuliers et des entreprises cet hiver.

L'Europe prépare un plan

C'est néanmoins un soulagement pour le gouvernement allemand et l'Europe, qui craignaient que ce pipeline ne soit pas rouvert du tout par Moscou après ces travaux.  « La Russie utilise le gaz comme une arme », a encore dénoncé mercredi la présidente de l'exécutif européen, Ursula von der Leyen, en présentant un plan d'urgence visant à réduire de 15% la demande européenne de gaz.

Lire aussiBaisser de 15% la consommation de gaz : un objectif plus facile à réaliser en France qu'ailleurs dans l'UE

Le compte à rebours jusqu'à la fin de la maintenance a apporté mercredi quelques signaux positifs avec l'annonce de livraisons programmées au point d'arrivée allemand du gazoduc, à Lubmin. « Nous partons du principe que (...) le transport de gaz via Nord Stream reprendra », a affirmé l'opérateur du réseau en Allemagne, Gascade. Mais il faudra attendre que le gaz s'écoule effectivement pour vérifier le niveau des volumes fournis par Gazprom.

Même avec la reprise des livraisons de gaz via Nord Stream, l'Europe se prépare à des pénuries. En Allemagne, des pénuries pourraient se produire dès février si le débit n'augmente pas, selon les évaluations de l'Agence fédérale des réseaux.

Des problèmes de turbines comme « prétexte »

Or, Vladimir Poutine a laissé entendre cette semaine que le gazoduc pourrait ne fonctionner qu'à 20% de sa capacité dès la semaine prochaine. La faute, selon le président russe, à des turbines qui équipent le pipeline et dont la Russie a fait un nouvel instrument de pression sur les Occidentaux. Une première de ces turbines, qui alimentent les stations de compression, vient de faire l'objet d'une réparation au Canada dans les usines du groupe allemand Siemens. Le composant a quitté le Canada pour être renvoyé en Russie mais Gazprom affirme n'avoir pas encore reçu de Siemens « les documents officiels » qui permettraient de l'acheminer. Or une seconde turbine doit, selon Vladimir Poutine, partir en maintenance la semaine prochaine, susceptible de diviser encore les livraisons par deux.

Les décisions de Gazprom sur les livraisons de gaz sont depuis le début jugées « politiques » par le gouvernement allemand, qui ne cesse d'accuser la Russie d'invoquer des problèmes de turbines comme « prétexte ».

Explosion du coût de l'énergie

Si les pénuries de gaz sont craintes cet hiver, l'explosion du coût de l'énergie se fait déjà sentir, menaçant de récession les économies européennes qui se remettent à peine de la pandémie de Covid-19. Les particuliers « seront choqués lorsqu'ils recevront un courrier de leur fournisseur d'énergie » avec un triplement voire un quadruplement de la facture à la clé, a alerté Klaus Müller, président de l'Agence fédérale des réseaux, pour inciter la population à réduire sa consommation.

En Allemagne, l'urgence est déjà là pour le premier stockeur de gaz en Allemagne, et à ce titre plus gros client de Gazprom : le groupe énergétique Uniper qui risque la faillite s'il ne reçoit pas à très court terme une aide de l'Etat. Il doit, faute de gaz russe, faire ses emplettes sur le marché comptant où les prix ont explosé. Une entrée de l'Etat au capital devrait être annoncée, Berlin craignant des effets en cascade comparables à un « Lehman Brothers » de l'énergie en cas de faillite du groupe.

(Avec AFP)

Commentaires 3
à écrit le 22/07/2022 à 9:39
Signaler
@Chamechaude C'est une question de temporalité : l'UE veut diminuer sa dépendance aux gaz russe dans les années à venir. Du coup la Russie les prends de cours en diminuent les volumes en quelque semaine. Du coup c'est panique à bord pour trouvé des...

à écrit le 21/07/2022 à 15:42
Signaler
L'Union Européenne ne cesse d'utiliser le gaz et l'économie comme une arme pour ouvertement déstabiliser la Russie et la contraindre à mener une autre politique. Et là elle se plaindrait de ce que la Russie utiliserait le gaz comme une arme ? Seule l...

à écrit le 21/07/2022 à 15:14
Signaler
Je ne comprends pas: il y a encore quelques semaines, nos gouvernements se disputaient pour savoir à quelle vitesse on cesserait d'acheter du gaz aux Russes pour les sanctionner le plus durement possible; et aujourd'hui, on se bat pour qu'ils veuill...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.