Les scénarios de Terra Nova sur l’avenir du logement

Même si l’habitat a été peu abordé dans le Grand débat, il est au cœur des solutions à la crise sociale. Dans un rapport prospectif, « Habiter dans 20 ans », Terra Nova, le laboratoire d’idées progressiste, développe quatre scénarios sur l’évolution des relations villes et territoires qui sont aussi le résultat de choix collectifs à faire dès aujourd’hui.
César Armand
Concentration des villes et saturation urbaine. Dans les deux cas, l'impact social sera terrible, avec la multiplication des inégalités dans l'accès aux besoins comme l'habitat.
Concentration des villes et saturation urbaine. Dans les deux cas, l'impact social sera terrible, avec la multiplication des inégalités dans l'accès aux besoins comme l'habitat. (Crédits : DR)

« Comment habiterons-nous dans vingt ans? Quels seront nos nouveaux usages? Comment nos manières d'habiter seront influencées par les évolutions de nos modes de vie? Comment nous organiser pour préserver nos ressources, garder la ville ouverte à tous et adapter les logements à de nouveaux styles de vie ? Comment favoriser l'inclusion sociale par le logement ? Comment développer l'habitat durable ? » À l'invitation de la Fabrique de la cité, la fondation Terra Nova, le laboratoire d'idées progressiste créé par Olivier Ferrand et dirigé actuellement par Thierry Pech, a présenté le 19 avril dernier son étude « Habiter dans 20 ans », en présence du ministre du Logement, Julien Denormandie. Marc-Olivier Padis, directeur des études du think tank, a tempéré le discours selon lequel la construction ne cesse de baisser dans notre pays. « La situation française n'est pas aussi négative : on construit énormément, avec 546 logements pour 1.000 habitants. » Il n'empêche : les octrois de permis de construire sont en recul depuis au moins un an, et la situation ne va pas s'arranger de sitôt avec les élections municipales qui approchent.

À l'horizon 2040, entre les zones peu peuplées qui perdent de la population et les plus peuplées comme l'Île-de-France qui gagnent « peu » de population, « ceux qui vont en gagner le plus sont les zones intermédiaires ». « On a cette possibilité de rééquilibrage », assure ainsi Marc-Olivier Padis. Là encore un problème méthodologique se pose : la métropole du Grand Paris, au cœur de la région francilienne, centralisera pour longtemps la majorité des emplois. L'expert poursuit : le développement se fera dans les zones les plus littorales et de montagne. Cela a un même nom : l'héliocentrisme, la recherche du soleil. En revanche, en matière de taille de commune, les aspirations ne semblent pas changer entre aujourd'hui et demain. Les Français veulent habiter dans une petite ville ou une ville moyenne à proximité d'un grand centre urbain, 17 des 26 millions d'actifs actuels étant d'ailleurs des « navetteurs ». Invité à commenter ces résultats, le ministre de la Ville et du Logement, Julien Denormandie, acquiesce : « Notre conviction, c'est de recréer des pôles de centralité. C'est pourquoi nous concentrons beaucoup de notre action sur les villes moyennes », citant le programme Action cœur de ville, le dispositif fiscal Denormandie dans l'ancien, ou encore le plan Territoires d'industries.

 >> Lire aussi : Grand débat : élus et professionnels du logement tirent la sonnette d'alarme

Par ailleurs, Terra Nova comme le représentant du gouvernement tombent également d'accord sur la montée en puissance du télétravail. Il fera économiser 80 minutes, a cal- culé Marc-Olivier Padis. « Le rapprochement des bassins de vie et des bassins d'emplois peut se faire par les nouveaux usages », abonde Julien Denormandie, qui cite, lui, des temps de transport de 40 minutes en 1980 à 60 aujourd'hui. Si le télétravail reste effectivement une alternative au travail classique, il ne concernera jamais l'ensemble des salariés et des employés. C'est un mythe... Deux des quatre scénarios évoqués par Terra Nova, celui de la concentration métropolitaine, où « les métropoles se renforcent et s'étalent », et celui de la saturation urbaine, c'est-à-dire que « le manque ,de place, le prix des logements et de la vie quotidienne [...] détériorent la qualité de vie en ville », ne font pas rêver. Dans les deux cas, l'impact social sera terrible, avec la multiplication des inégalités dans l'accès aux besoins comme l'habitat. « Le logement et le territoire arrivent très peu dans les contributions du Grand débat national, mais toutes les injustices transpirent le logement », corrobore le ministre.

Prévisions plus optimistes

Les deux autres scénarios de Terra ,Nova s'avèrent plus optimistes. Le
premier a été intitulé « la révolution du partage » avec, pêle-mêle, la voiture autonome, un changement de l'architecture et un échange de biens et de services. Sur ce point, Julien Denormandie se fait son propre promoteur, rappelant qu'il a donné, avec la loi Elan, le pouvoir aux maires et aux préfets de s'opposer à des centres commerciaux en périphérie pour faire revivre les centres-villes. Il n'est pas à un paradoxe près : ne serait-ce que pour citer un exemple, le gouvernement ainsi que la cité-hôte de Gonesse soutiennent le grand complexe Europacity, tout en plaçant cette commune sur la liste des 222 qui peuvent bénéficier du programme de revitalisation Action Cœur de ville...

Le second scénario, baptisé « le réseau des métropoles » imagine un dynamisme métropolitain qui se « diffuse et irrigue une vaste partie
du territoire » où « même les zones rurales éloignées ont des avantages comparatifs dont elles tirent parti ». Terra Nova, qui conseillait en 2012 au PS « d'abandonner les classes populaires », se réveille soudain sur les effets négatifs d'une métropolisation « malheureuse », un effet sans doute de la crise des « gilets jaunes ». Il faut espérer enfin que la notion « d'habitat durable » n'attende pas 2040 pour se réaliser concrètement. « Les quatre scénarios nous invitent  enfin à nous éloigner des schémas réducteurs, voire binaires, entre les villes et les périphéries », a conclu la présidente de la Fabrique de la cité, Cécile Maisonneuve.

César Armand

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Commentaires 3
à écrit le 26/04/2019 à 16:05
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Terra Nova, le laboratoire d’idées socialistes, avec scénarios sur l’évolution des relations villes et territoires qui sont aussi le résultat de choix collectivistes à faire dès aujourd’hui.

à écrit le 26/04/2019 à 12:12
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On ne peut pas résoudre le problème du logement sans passer par les propriétaires privés, donc d'un côté faciliter l'accès à quiconque donc l'éjection dans les trois mois maximum au mauvais payeur et sans passer par un juge, puisque ça fait partie du...

à écrit le 25/04/2019 à 19:40
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logement durable, c'est encore de la novlangue a la con pour culpabiliser les gens et leur faire passer des taxes avant, les logements duraient des decennies, et etaient en general mis au tas par des guerres et/ou des incendies le bon progres ecolo...

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