LA TRIBUNE - Pourquoi ce groupe Ecologie, démocratie, solidarité à l'Assemblée nationale au lendemain du déconfinement ?
CEDRIC VILLANI - Après le confinement lié au Covid-19, c'est le moment de relancer les choses sur des bases vertueuses et de veiller à ce que les enjeux soient au plus haut niveau. L'écologie, la démocratie, la solidarité sont trois enjeux prioritaires de cette période qui devront être pris au plus haut niveau.
C'étaient des sujets que nous avions poussé lors de nos élections respectives en 2017, mais il faut désormais faire mieux. Il ne s'agit pas d'être dans l'opposition, nous sommes prêts à travailler constructivement avec la majorité comme avec les groupes.
Pourquoi maintenant, 3 ans après votre élection à l'Assemblée nationale ? Qui dit, pour reprendre vos mots sur France Inter, que vous serez désormais "suffisamment costauds et à la hauteur des enjeux" ?
Depuis 2017, avons-nous progressé sur la question des pesticides ? Pas vraiment. Sur les nouvelles mobilités, et par exemple l'hydrogène ? Pas assez. Sur la souveraineté européenne ? Pas du tout. C'est, j'insiste, le moment d'accélérer et l'occasion de le faire de manière plus forte et plus efficace.
A dix-sept sur cinq cent soixante-dix-sept, la marge de manœuvre reste étroite...
L'heure du débat politique et du débat parlementaire va reprendre ses droits, voulons-nous continuer comme si de rien n'était ? Pour ma part la réponse est non. Ce groupe permettra de porter au débat des initiatives pour une société plus sobre, souveraine, évidemment plus écologiste et profondément européennes.
Allez-vous vous appuyer sur les travaux de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) dont vous êtes le vice-président ?Des études sont en effet en cours sur la pollution plastique, la production d'énergie dans le secteur agricole de même qu'une note sur la production d'hydrogène.
À l'OPECST, nous avons fait et ferons des travaux sur bien des sujets qui seront au cœur de notre action : biodiversité, pollution des déchets de plastique, rénovation thermique, transition vers une mobilité propre.... Nous nous appuierons sur ces travaux, et de façon générale, notre groupe s'appuiera sans cesse sur la science.
Nous défendons une écologie pragmatique, ambitieuse et réaliste. Cette ligne est déjà suivie par mes nouveaux collègues Delphine Batho et Matthieu Orphelin. Nous demeurons en outre attentifs à marier la voix scientifique et la voix politique avec la voix citoyenne, dans l'esprit de la consultation "Le jour d'après", animée notamment par Paula Forteza.
Parmi vos priorités en matière de transition écologique, vous appelez à "soutenir massivement les investissements des collectivités locales" avec au moins 5 milliards d'euros sur 3 ans, pour la mobilité, les transports, l'aménagement, la rénovation des bâtiments, le changement du modèle agricole... Ces dernières sont déjà très atteintes par les dépenses nouvelles liées à la covid-19. Comptez-vous profiter du troisième projet de loi de finances rectificative prévu avant l'été ?
Dès le troisième projet de loi de finances rectificative, il faudra effectivement des sommes considérables. Il est très important que les investissements soient dirigés vers l'économie verte, ne serait-ce que pour prendre les bonnes habitudes.
De même que vous comptez préparer "un plan de réindustrialisation pour une souveraineté et une autonomie retrouvées, nationales et européennes, centré sur nos territoires". Le programme "Territoires d'industrie" serait-il insuffisant ?
C'est le moment - je me répète - d'être encore plus ambitieux. Créons des filières européennes pour les panneaux photovoltaïques ou les batteries, renforçons-les pour le textile ! Notre manque de capacité en la matière a été cruellement exposé pendant cette crise. Que l'on songe qu'à Taiwan où l'on produit 50 fois plus de masques par habitant....
La souveraineté technologique demeure tout autant importante. Amazon a gagné le plus d'argent avec le confinement de même que nous avons tous réalisé des visioconférences avec des outils qui nous dépassent. Comme une claque qu'on s'est prise sans rien pouvoir dire !
Sujets les + commentés