La startup fondée par le cabinet d'architecture navale breton VPLP, réputé dans le monde de la voile, a choisi son camp de base. En décembre, Ayro investira un bâtiment situé en bordure du canal qui relie le port de Caen-Ouistreham à la mer pour lancer l'assemblage de quatre premiers mâts ailes. Ces ailes rétractables de 360 m2 chacune (33 mètres de haut et 11 de large) équiperont le Canopée : un navire roulier de 120 mètres de long en cours de construction par VPLP qui acheminera les composants du lanceur Ariane 6 depuis l'Europe jusqu'à la Guyane à compter de 2023.
Cette première commande (de 5 M€) pour le compte d'Arianespace marque l'entrée en phase industrielle de la technologie vélique prometteuse développée par la jeune société pour propulser des navires en complément de leur motorisation classique. Eprouvé depuis 2007 d'abord sur un trimaran prototype de sept mètres puis à bord du catamaran laboratoire Energy Observer, le concept du nom d'OceanWings se présente sous la forme de mâts articulés et intelligents, pilotés en temps réel par un logiciel couplé à des anémomètres de haute précision.
Pour les navires neufs ou rétrofités
Cible visée : les grands armements maritimes fortement émetteurs de gaz carbonique à qui sont promis des économies de carburant de l'ordre de 30 à 70% suivant les routes maritimes. « L'intérêt est que nos mâts sont facilement pluggables sur des méthaniers, des pétroliers et des rouliers neufs ou rétrofités à partir de l'équivalent d'un support de grue. Nous avons également démontré qu'ils étaient opérants sur un porte conteneur de 2.500 EVP* », détaille Ludovic Gerard, DG d'Ayro et ex cadre de CMA CGM (où il dirigeait la filiale CMA Ships en charge de la gestion de la flotte du groupe).
En discussion « avancée » avec plusieurs armements européens et asiatiques, l'intéressé table sur au moins une deuxième commande l'hiver prochain. A l'entendre, tous les signaux sont au vert.
« Les armateurs prennent conscience que l'échéance approche et ils ne réfléchissent plus seulement en terme de retour sur investissement, constate t-il. Ils cherchent avant tout maintenir l'attractivité de leur flotte ».
Sur le port de Caen, on se félicite de l'implantation de cette pépite à fort potentiel qui devrait créer une quinzaine d'emplois dès cette année avec un objectif de 60 en trois ans. Le site, anciennement occupé par Renault Trucks, coche toutes les cases, vantent les autorités portuaires. « Il est relié directement à la mer et les navires jusqu'à 200 mètres de long peuvent escaler au pied du bâtiment ce qui facilitera les opérations d'installation des mâts», souligne Antoine de Gouville, directeur du port. Détail qui n'a pas échappé aux dirigeants d'Ayro : l'usine aura pour voisine la société Shoreteam Yard, l'un de ses fournisseurs de pièces composites.
*Conçu par VPLP, Ayro et Alwena Shipping et le chinois SDARI, le projet de porte conteneur dit Tradewings 2500 repose sur une propulsion mixte : ailes OceanWings et moteur GNL. Sur une route transatlantique type, il permettrait une réduction des émissions de CO2 de 35% par rapport à un navire classique. Laquelle a été attestée par le Bureau Veritas qui lui a accordé une homologation de principe en mai dernier.
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