Faut-il des volcans artificiels pour sauver le climat ?

Ni la volonté politique, ni la vitesse à laquelle se développent les technologies bas carbone ne semblent suffire à limiter de façon significative nos émissions de CO2. Cette impuissance risque de laisser le champ libre aux tentatives de quelques apprentis sorciers de modifier artificiellement le climat. Ces expériences aux conséquences incertaines permettraient de surcroît aux politiques de délaisser encore un peu plus ces enjeux environnementaux... Bertrand Guillaume, maître de conférence à l'Université des technologies de Troyes, nous fait part de ses réticences.
Copyright Reuters

Les rapports se suivent et malheureusement se ressemblent. A quelques jours de Rio+20, donc 20 ans après la mise en ?uvre des premières politiques de protection de l'environnement dans la foulée de Rio 92, l'ONU et l'Agence internationale de l'Energie (AIE), notamment, tirent la sonnette d'alarme sur la situation de la planète et le réchauffement climatique prévisible.

L'AIE veut néanmoins croire qu'il est encore possible en combinant les technologies existantes de contraindre les émissions et donc les températures à une hausse de 2°C d'ici à 2100. Au-delà de ce plafond, les bouleversements sur les éco-systèmes pourraient devenir incontrôlables.

Mais l'agence regrette, dans sa publication « Energy technology perspectives 2012 » rendue publique cette semaine, que pour les neuf dixièmes des technologies bas carbone, la courbe de progression soit très en deçà de ce qui serait nécessaire pour y parvenir.

Si les énergies renouvelables progressent à un rythme respectable, les investissements, qui ont battu un nouveau record en 2011 à 257 milliards de dollars, restent insuffisants. L'AIE évalue à 30.000 milliards de dollars le montant nécessaire d'ici à 2050, tout en soulignant que cet investissement permettrait de réaliser à cette échéance une économie en carburant d'une valeur de 100.000 milliards.

Concernant l'efficacité énergétique et le captage/stockage de CO2, qui pourraient contribuer à 20 % de la réduction d'émissions nécessaire d'ici à 2050, on en est encore au stade des expérimentations.

Reproduire artificiellement les conséquences d'une éruption volcanique

Dans ce contexte, les pistes de modification à grande échelle du système climatique (baptisées « géoingéniérie ») pourraient bien trouver à se financer auprès de généreux mécènes (tels que Bill Gates ou Richard Branson, sensibles à la problématique du changement climatique) séduits par ces professeurs Nimbus, voire de pouvoirs publics aux abois. « Difficile de faire le tri entre des scientifiques convaincus prêts à lancer leur start up pour développer leur idée et les chasseurs de subventions », met en garde Bertrand Guillaume, maître de conférences à l'Université de technologie de Troyes (UTT), qui travaille sur ces questions et vient d'y consacrer un ouvrage.*

Les projets de transformation artificielle des interactions entre la terre, l'atmosphère et l'océan ne datent pas d'hier. La période de la guerre froide a été particulièrement favorable à des scénarios dignes de la science fiction, à la fois côté américain et russe.

« Mais ces idées font aujourd'hui leur entrée dans des cénacles scientifiques sérieux », observe Bertrand Guillaume. La plus répandue, connue sous le nom de « volcanisme artificiel » et notamment explorée par le prix Nobel de chimie 1995 Paul Crutzen, consiste à reproduire artificiellement certaines conséquences d'éruptions naturelles entraînant une baisse de la température terrestre, en injectant dans la stratosphère du sulfate de souffre destiné à capter la chaleur solaire (à l'instar des cendres volcaniques). Evidemment, les risques purement physiques existent, puisqu'on ignore les conséquences la modification du régime des pluies qui s'ensuivrait, notamment en cas d'éruption volcanique concomitante, naturelle celle-ci.

Une fuite en avant technologique couronnant l'échec du politique

D'autres pistes ont la faveur des professeurs Nimbus, telles que la fertilisation des océans, qui consiste à les enrichir en fer pour favoriser le développement d'un phytoplancton capable d'absorber de grandes quantités de CO2 grâce à la photosynthèse, ou, encore plus fou, l'envoi de miroirs réfléchissants dans l'espace.

Le captage et stockage du CO2, plus avancé, se situe à la lisière de la géoingéniérie. Même l'idée de peindre les toits en blanc, appliquée à grande échelle, pourrait entrer dans le champ.

L'urgence climatique est telle qu'il faudrait néanmoins éviter de « jeter le bébé avec l'eau du bain ». A cet effet, un « atelier de recherche prospectif » devrait prochainement voir le jour sous l'égide de l'Agence nationale de la recherche (ANR) afin de donner un corpus sur lequel s'appuyer pour évaluer les différents projets. « Un travail que le Royaume-Uni a déjà mené », observe Bertrand Guillaume.

Mais la plus grande réticence du chercheur se situe ailleurs. En plus de risques géopolitiques et de possibles dérives militaires, il souligne essentiellement celui d'une fuite en avant technologique.

Sous prétexte de gagner du temps, les politiques pourraient se sentir moins pressés de mettre en ?uvre des solutions qui, pour Bertrand Guillaume, relèvent moins de la technologie que de l'organisation sociale et politique. « En basculant l'échec politique vers le technique, on continue la fuite en avant ».
 

* « Scénarios d'avenir - Futurs possibles du climat et de la technologie » Bertrand Guillaume et Valéry Laramée de Tannenberg - Editions Armand Colin




 

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 20
à écrit le 18/06/2012 à 1:08
Signaler
Nous sommes tous responsables des situations de dégradation de notre planète, tout un chacun. Les solutions existent tentant de se développer davantage en luttant parfois bien durement pour essayer de s'imposer face à la gloutenneries des industriels...

à écrit le 17/06/2012 à 16:30
Signaler
bizarre cet épouvantail de "la fuite en avant technologique", la nature même de l'univers est changement, la faculté propre à l'homme est l'adaptation de son environnement à ses besoins, saisir l'occasion pour apprendre à prendre en main l'avenir de...

à écrit le 17/06/2012 à 0:29
Signaler
Un très bon site parmi d'autres pour répondre aux pseudo-arguments des lobbies ultra-pollueurs qui se disent "climatosceptiques" avec des arguties bidons de type pensée unique : http://www.skepticalscience.com/ocean-acidification-global-warming.htm

à écrit le 16/06/2012 à 18:03
Signaler
Pertinent, comme réflexion. Et ce serait en plus essayer de traiter les effets plutôt que la cause... Voyez ce que ça donne rien qu'en Médecine.

à écrit le 15/06/2012 à 21:54
Signaler
Une solution "volcan artificiel" permet de réduire la température, ce qui est déjà considérable. Mais elle ne peut pas empêcher l'acidification de l'océan, autre conséquence de l'augmentation de la concentration de CO2 dans l'atmosphère.

le 15/06/2012 à 23:43
Signaler
Encore du grand n'importe quoi, cette histoire d'acidification des océans ! Arrêtez d'essayer de faire peur avec des arguments éculés qui ne résistent pas à l'analyse objective des faits. La fête est finie ; vous avez perdu la bataille de la communic...

le 17/06/2012 à 0:24
Signaler
C'est vrai que si 70 Académies des Sciences dans le monde rien que çà, entre autres, confirment une tendance rapide vers l'acidification des océans, que l'on constate par ailleurs dans tous les Instituts de Biologie marine, entre autres, c'est forcém...

à écrit le 15/06/2012 à 21:23
Signaler
Ni les fraudes massives, ni l'argent public déversé par milliards pour qu'on prouve ce qui n'existe pas ne suffisent à changer la réalité. Il serait bon que quelques un des journalistes encore sérieux de ce bas monde aient le courage de le rapporter,...

le 17/06/2012 à 1:19
Signaler
C'est vrai que tous les scientifiques depuis Arhénius avant 1900 qui prévoyaient déjà les effets des excès de CO2 et Ges et tous les autres scientiques qui ont suivi confirmant ces faits sont tous corrompus. Par contre les pollueurs qui manipulent à ...

à écrit le 15/06/2012 à 19:03
Signaler
Il n'y a aucune urgence climatique. Le CO2 n'est pas un GES, encore moins un polluant. Le CO2 est au contraire indispensable à la vie sur terre. Malgré toutes les prédictions apocalyptiques, les températures ne montent pas, les glaces des pôles ne fo...

le 15/06/2012 à 20:21
Signaler
Quand on a de la Mxxxde dans les yeux, on s'informe : http://www.google.fr/search?q=LES+ILES+s%27enfonce+dans+l%27oc%C3%A9an&ie=utf-8&oe=utf-8&aq=t&rls=org.mozilla:fr:official&client=firefox-a

le 15/06/2012 à 21:11
Signaler
on veut changer le climat... une nouvelle tour de babel ...

le 15/06/2012 à 21:41
Signaler
@ux yeux: Allez donc troller ailleurs ou offrez un point de vue valide et etayé. Au fait saviez vous que les fonds déversés sur les organismes dont la vocation est de prouver le réchauffement climatique excède très largement tous les autres lobbies ...

le 15/06/2012 à 22:20
Signaler
Lisez les articles de Sylvestre Huet, un des rare journaliste Français qui mène depuis 15 ans des enquêtes sérieuses sur le changement climatique http://sciences.blogs.liberation.fr/home/terre/

le 16/06/2012 à 23:06
Signaler
Vous plaisantez? Huet n'a rien d'un sientifique et tout d'un militant. A partir de là, soit vous êtes comme lui et l'encensez, soit vous arrêtez de le lire. L'avez vous vu une seule fois écrire qu'il sétait trompé? Je m'en doutais.

le 17/06/2012 à 0:50
Signaler
Le CO2 est bien un Ges (voir autres planètes loin du soleil comme Wasp-b12 et ses effets). Oui les températures continuent de monter, notamment celle des océans, bizarre hein. http://www.skepticalscience.com/translation.php?lang=12 Oui la glace des ...

à écrit le 15/06/2012 à 19:02
Signaler
Qu'est-ce qu'on ne ferait pas pour conserver notre système basé sur la croissance infinie. Quand on aura multiplié le PIB par deux, il faudra combien de volcans artificiels ? Avec quelles conséquences sur l'écosystème planétaire ? Et que faudra-t-il ...

le 15/06/2012 à 21:31
Signaler
Vous n'avez pas compris que ceux qui font la promotion de ce genre d'idée, ne cherchent en fait qu'à faire peur au peuple? Histoire qu'il accèpte des choses aussi bégnines en apparence que la confiscation sous mandat de l'ONU de tous les espaces enco...

le 16/06/2012 à 7:29
Signaler
il y a-t-il quelque chose ou quelq'un qui pourrait stopper la domination des Illuminati en marche?

le 17/06/2012 à 0:59
Signaler
Comment le lobby des climato-sceptiques s?organise : des fuites révèlent les efforts des lobbys climato-sceptiques pour influer sur les politiques http://bigbrowser.blog.lemonde.fr/2012/02/15/fuites-comment-le-lobby-des-climato-sceptiques-sorganise/#...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.