FFR : des appels d'offres contestés

Echaudé par le tapage médiatique de ce qu'il est désormais convenu d'appeler l'affaire de la Fédération française de rugby (FFR), le ministre des Sports a décidé de frapper fort. Tirant les leçons des conclusions de l'enquête menée par deux inspecteurs généraux sur les conditions d'attribution des droits télévision et marketing de la FFR, Guy Drut a placé hier la Fédération sous haute surveillance administrative. Mais ce n'est pas tout. En raison « de faits troublants portant atteinte au droit de la concurrence », il s'apprête à transmettre le dossier au parquet. A l'origine de l'enquête administrative menée par le ministère de la Jeunesse et des Sports depuis un mois, l'attribution, en janvier 1995, par la FFR des droits de retransmission télé du rugby à France 2. Un contrat dénoncé haut et fort par TF1 à qui l'on avait fait croire jusqu'à la dernière minute qu'il allait emporter l'exclusivité des retransmissions. Bernard Lapasset, le pré- sident de la FFR, lui avait effectivement donné personnellement son accord de principe avant même que le comité directeur de la Fédération ne se réunisse. Seulement voilà. Ce dernier s'est prononcé le 20 janvier 1995, par 23 voix contre 3, en faveur de l'offre de France Télévision. De quoi susciter des doutes sérieux sur les méthodes d'attribution par la FFR des droits de retransmissions. Les révélations successives du quotidien l'Equipe et la parution du livre Sport et Télé, les liaisons secrètes, par Eric Maitrot (voir ci-dessous), ont achevé de convaincre le ministre de diligenter l'enquête dont les conclusions ont été rendues public hier. Un accord de partage des droits à 50-50 Sur les procédures d'attribution des contrats télévision et marketing de la FFR, le rapport se contente de souligner quelques « manque- ments » - le vote du contrat n'était pas inscrit à l'ordre du jour du comité du 20 janvier - et s'interroge sur les discussions entamées avec TF1 alors qu'un appel d'offres avait été lancé. Jusque-là, rien de bien méchant. En revanche, les inspecteurs généraux porte des accusations sans ménagements sur le déroulement de l'appel d'offres des droits marketing : « Deux des sociétés candidates avaient préalablement passé accord assimilable à une entente. » Les deux sociétés concernées, ISE (International Sport ans Events) et FRP (France Rugby Promotion, de Jean-Claude Darmon) ont, selon les enquêteurs, « conclu au préalable un accord de partage à 50 % de ces droits entre eux ». Or c'est précisément FRP qui l'a emporté pour 24,5 millions de francs. C'est cet éventuel délit d'entente qui fera prochainement l'objet de poursuites judiciaires. Si le ministre des Sports n'a pas mis personnellement en cause Bernard Lapasset dans la gestion de la FFR, il a tenu à poursuivre l'inspection, voire à l'approfondir. L'enquête sera effectivement étendue à l'ensemble des contrats passés par la FFR. Dénonçant la « campagne de dénigrement » et « l'amalgame épouvantable » entourant cette affaire, Bernard Lapasset reconnaissait néanmoins hier que des imperfections avaient probablement été commises, jetant la pierre à l'absence de règle régissant les pratiques commerciales des fédérations. Un vide juridique qui sera prochainement comblé, puisque Guy Drut a annoncé hier la préparation d'un projet de loi visant - enfin - à clarifier les rapports des fédérations sportives avec l'argent privé. Géraldine Meignan
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