Les nouveaux enjeux de la Sécu en temps de crise

Jean-Michel Laxalt, ancien instituteur, syndicaliste puis mutualiste qui vient de céder son fauteuil de président de la Mutuelle Générale de l'Éducation nationale (MGEN) qu'il occupait depuis une décennie, signe-t-il avec son livre une sorte de testament intellectuel ? En tout cas, l'approche provocatrice et éclectique choisie sous la forme d'entretiens interpelle les esprits par la diversité des interlocuteurs : le délégué général d'Emmaüs, Patrick Dugois, ou le fondateur du grand groupe d'assurance Axa, Claude Bébéar, aujourd'hui président de l'Institut Montaigne, en passant par Alain Bazot, le président d'UFC-Que choisir, ou le sociologue Michel Wieviorka. Défendant ses convictions, Jean-Michel Laxalt apostrophe par exemple Patrick Dugois sur la création de la complémentaire maladie universelle (CMU), « bouclier » pour les populations les plus démunies, dont le financement est depuis 2009 entièrement assuré par les complémentaires via une taxes sur les cotisations. « Ce n'est donc plus de la Sécurité sociale et plus un système de solidarité nationale », souligne l'auteur.Sur le sujet plus polémique du transfert de certaines charges de la Sécurité sociale vers le secteur privé, Jean-Michel Laxalt demande à Jean-François Chadelat, aujourd'hui inspecteur général des affaires sociales (Igas), s'il préconise toujours de rendre obligatoire l'affiliation à une couverture complémentaire santé comme c'est déjà le cas pour les retraites ? « Le mot obligatoire ne me convient pas. Surtout pas pour les personnes à revenus élevés », répond Jean-François Chadelat, qui admet toutefois que la complémentaire est « indispensable » pour les personnes à bas revenus.L'idée du « bouclier sanitaire », pourtant au centre du projet de réforme du gouvernement actuel, est à peine effleurée. « Il s'agit de prendre l'ensemble des dépenses de santé et de définir le seuil à partir duquel intervient l'assurance-maladie de façon que le reste à charge soit limité afin d'éviter les dérives », explique Jean-François Chadelat, estimant que cette idée « doit être creusée ». Jean-Michel Laxalt y voit au contraire le risque d'avoir des contributions proportionnelles au revenu « avec des prestations inversement proportionnelles ». C'est le même constat qu'il oppose sur l'articulation entre assurance privée et assurance-maladie obligatoire lors de son échange avec Claude Bébéar.Au final, ce livre aborde toutes les grandes questions sur l'avenir de la Sécurité sociale : bouclier sanitaire, égalité ou équité, assurance complémentaire obligatoire, place de la médecine libérale, financement public ou privé. À ce titre, c'est un tour d'horizon à la fois des problèmes posés et des différentes opinions du moment. Mais ceux qui pensent y trouver des solutions seront déçus, car l'objectif de la publication de cet ouvrage est ailleurs. Il tient lieu de rampe de lancement du futur Institut Montparnasse, adossé à la MGEN, que présidera Jean-Michel Laxalt à la rentrée, dont la vocation est précisément de favoriser les échanges d'idées et les travaux universitaires sur le thème de la solidarité. Séverine Sollier« Et si demain? la Sécurité sociale éclatait ? » par Jean-Michel Laxalt, éditions Jacob-Duvernet, 175 pages, 19,90 euros.
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