Le tour de cochon du yuan

C'est sabre au clair que la nouvelle administration américaine s'attaque à la Chine, soupçonnée d'utiliser sa monnaie comme arme commerciale. Barack Obama et son secrétaire au Trésor, Timothy Geithner, n'ont pas attendu longtemps pour accuser l'ex-empire du Milieu de « manipuler » sa monnaie. Et on est à court d'arguments pour les contredire. Après avoir, à son rythme, cédé aux pressions américaines en vue d'une revalorisation du yuan, en procédant d'abord à une miniréévaluation en juillet 2005, puis en laissant progressivement sa monnaie s'apprécier de 20 % face au dollar, Pékin a fini par changer son fusil d'épaule. C'était dans la torpeur de l'été, juste avant que ne s'ouvrent les Jeux olympiques, que se préparait en coulisses cette volte-face dont on n'a pas tout de suite pris la mesure.Depuis juillet, le taux de change du yuan face au dollar est quasiment figé, voire en léger retrait : la politique de réévaluation progressive, mais ininterrompue depuis trois ans, du yuan est au point mort. Face au ralentissement de la croissance, la Chine « joue perso ». Et elle dispose de deux atouts uniques pour influer sur le cours de sa monnaie. trésor de guerreD'abord, le yuan n'est pas convertible et ne s'échange donc pas hors des frontières chinoises. Et surtout, en empêchant sa monnaie de s'apprécier trop rapidement face au dollar, la Chine a engrangé des tombereaux de dollars en intervenant sur le marché des changes. Elle dispose des plus importantes réserves de changes du monde, qui frôlent les 2.000 milliards de dollars. Un inestimable trésor de guerre, mais qui va servir de mouchard au cours des prochains mois. S'il commence à fondre, ce sera le signe d'une volonté délibérée de la Banque populaire de Chine de faire baisser le yuan, par vente de dollars interposée. À sa décharge : le redressement généralisé du dollar depuis l'été a fait monter l'indice pondéré du yuan par rapport aux monnaies des principaux partenaires commerciaux de la Chine de 12 % l'an dernier, selon les calculs de JP Morgan.délicat rapport de forceLes États-Unis devront toutefois se garder de trop d'agressivité envers Pékin, car une guerre commerciale serait suicidaire. À l'automne dernier, la Chine a ravi au Japon le rang de premier détenteur étranger de bons du Trésor américain, un marché dont l'encours s'élève à quelque 5.500 milliards de dollars. Elle dispose, elle aussi, d'une arme de chantage à potentiel de destruction massive. Isabelle Croizard2.000 milliards C'est le montant des réserves de changes de la Chine en monnaie américaine.
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